Nos plans pour sauver le climat inquiètent les chercheurs

D’un point de vue gaz à effet de serre, il y a une différence entre zéro émission et zéro émission nette. Et cette différence, ce ne sont pas moins de 12 milliards de tonnes d’équivalent CO2 ! Voici pourquoi les chercheurs jugent que cela est inquiétant.

« Pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C, conformément à l’objectif de l’Accord de Paris sur le climat, il convient de réduire les émissions de 45 % d’ici à 2030 et d’atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici à 2050 », nous rappelle l’Organisation des Nations unies (ONU) sur son site. Et ils sont quelque 50 pays à avoir soumis des plans en ce sens. Bonne nouvelle ?

Le saviez-vous ?

« Zéro émission nette » signifie que les émissions de gaz à effet de serre sont réduites à un niveau aussi proche que possible de zéro. Les émissions restantes sont réabsorbées par la nature ou par une technologie.

Pas tant que ça, craignent des chercheurs engagés dans une équipe internationale. Ils ont passé tous ces plans au crible. Ce qu’il en ressort, c’est qu’une fois l’ensemble des mesures de réductions des émissions de gaz à effet de serre (GES) mis en œuvre dans tous ces pays, en 2050, il restera toujours 12 milliards tonnes d’équivalent CO2 à éliminer chaque année — à comparer avec les quelque 40 milliards de tonnes émises en 2022 et les 12 milliards de tonnes déjà stockées par les océans du monde. Et les pays comptent sur la technologie ou la restauration de la nature pour éliminer ces émissions « résiduelles ».

« Nous avons été gentils, nous avons tablé sur les estimations d’émissions les plus prudentes de chacun d’ici 2050 », explique Jens Friis Lund, professeur à l’université de Copenhague (Danemark), dans un communiqué. Comprenez qu’il pourrait donc en réalité rester bien plus de GES à éliminer chaque année que ça. Or, déjà, « éliminer 12 milliards de tonnes de CO2 par an, c’est irréaliste », souligne le chercheur.

Les arbres et la technologie ne sont pas la solution

Parmi les moyens évoqués dans les plans des pays pour atteindre le zéro émission nette, il y a le reboisement et la conservation de vastes étendues de nature. « Ces très grandes surfaces, qui doivent être mises de côté pour éliminer le CO2, entreront en concurrence avec les terres agricoles et la sécurité alimentaire. La vitesse à laquelle les forêts ou les cultures biologiques doivent être plantées constituera un risque pour les populations du monde entier, car elle ne laissera pas assez de temps pour veiller à ce que les gens soient correctement entendus ou indemnisés », déclare Jens Friis Lund.

Pour ce qui est des technologies de captage et de stockage ou de valorisation du carbone, le chercheur n’est pas beaucoup plus confiant. « Aujourd’hui, ces technologies nous permettent d’éliminer quelques milliers de tonnes de CO2 chaque année. Cette capacité doit être multipliée par mille si nous voulons éliminer les émissions que les pays s’attendent à avoir en 2050. Cela signifie d’énormes exigences sur la façon dont les terres sont utilisées et un déploiement massif d’énergies renouvelables dans le seul but d’éliminer le CO2 de l’atmosphère (ndlr : parce que ces technologies sont gourmandes en énergie)Et cela doit s’ajouter à tout ce que nous devons déjà faire pour réduire les émissions. C’est une facture énorme que nous laissons aux générations futures ».

Mais alors, c’est l’impasse ? Non. Il reste la solution de réduire de manière plus drastique nos émissions. « Des réductions plus rapides, ici et maintenant, sont bien plus préférables que d’investir dans une solution technologique incertaine, dans un avenir où la crise climatique s’est aggravée, avec des phénomènes météorologiques encore plus graves et des dommages climatiques ultérieurs », conclut Jens Friis Lund.

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