Grippe aviaire : des nouvelles mutations identifiées chez une personne infectée au Chili

La grippe aviaire circule toujours chez les oiseaux, exposant ainsi des personnes ayant un contact rapproché avec eux à une contamination accidentelle. Le génome de la souche qui a infecté un Chilien de 53 ans a été décortiqué par les scientifiques. Que révèle-t-il ?

Le 29 mars 2023, le ministère chilien de la Santé annonçait un cas de grippe aviaire H5N1 sur son territoire, le deuxième en Amérique du Sud après celui d’une enfant de 9 ans en Équateur. Aujourd’hui, le National Influenza Centre du Chili publie les résultats des analyses génétiques réalisées sur la souche qui a infecté l’homme de 53 ans en mars dernier. Cette souche appartient au clade 2.3.4.4b, la même qui circule partout dans le monde et tue de nombreux oiseaux, mais elle possède des mutations inédites impliquées dans la capacité du virus à se répliquer dans les cellules de mammifères.

Des mutations qui trahissent une adaptation aux mammifères ?

L’ARN du virus a été collecté à la suite d’un lavage bronchopulmonaire effectué sur le patient infecté et hospitalisé pour une pneumonie sévère. L’hémagglutinine est une protéine située à la surface des virus influenza qui permet aux virions d’entrer dans les cellules à infecter. En comparant la séquence génétique de l’hémagglutinine prélevée sur le patient avec les autres virus H5N1, les scientifiques ont noté seulement trois mutations qui ne modifient pas la biologie du virus.

Ces dernières ne lui permettent pas de mieux infecter les cellules mammaliennes. La neuraminidase est la deuxième protéine de surface des virus influenza qui permet la libération des virions néo-formés. Ici, pas de différence notable avec les souches H5N1 qui circulent chez les oiseaux au Chili.

Les scientifiques se sont aussi intéressés aux gènes du complexe de réplication, l’ensemble des enzymes qui permettent au virus de la grippe aviaire de répliquer son matériel génétique, dont la protéine PB2 ou polymerase basic protein 2. Il y a deux différences entre la PB2 isolée chez le patient chilien et celle isolée chez les oiseaux.

La première mutation est une substitution d’acides aminés qui pourrait être une adaptation aux mammifères puisqu’elle améliore l’activité de l’ARN polymérase – l’enzyme virale qui permet de répliquer les génomes à ARN – dans les cellules mammaliennes. Une deuxième substitution, plus rare, augmente l’efficacité de la réplication du virus de la grippe aviaire dans les cellules mammaliennes.

La grippe aviaire infecte de nombreux oiseaux domestiques et sauvages. © PordeeStudio, Adobe Stock

LA GRIPPE AVIAIRE INFECTE DE NOMBREUX OISEAUX DOMESTIQUES ET SAUVAGES. 

Un virus en passe de devenir zoonotique ?

Le CDC note dans son rapport que la combinaison de ces deux mutations a déjà été observée chez des souches zoonotiques de grippe aviaire H7N9. Néanmoins, il apparaît que ces deux mutations ne sont pas fréquentes chez les oiseaux malades au Chili, ce qui suggère selon le CDC, qu’elles sont apparues une fois que le virion avait infecté l’homme de 53 ans et que sa maladie progressait.

En effet, les virus peuvent accumuler des mutations quand ils se répliquent après avoir infecté un hôte, c’est un phénomène courant, surtout quand l’infection est longue ou intense. Ces mutations ne suffisent pas pour qualifier le H5N1 de virus zoonotique et ne lui confèrent pas la capacité d’infecter les mammifères ou encore de se transmettre entre les humains. Le H5N1 reste sous étroite surveillance.

futura

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