Festival Théâtre enfin ! : à Dijon, le pouls du spectacle vivant rebat

Première manifestation du genre à rouvrir après une année de pandémie, le festival fait la part belle aux formes documentaires sur l’état du monde.

Un pangolin court dans les rues de Dijon : le petit animal écailleux, qui nous a tant occupé l’esprit depuis plus d’un an, figure sur les affiches du festival Théâtre enfin !, ouvert le 21 mai, et qui se poursuivra jusqu’au 2 juillet. Un festival de théâtre qui en remplace un autre, le traditionnel Théâtre en mai, qui faisait les belles heures de la jeune création depuis trente ans.

Théâtre enfin ! est la première manifestation théâtrale à rouvrir en France, après une année de pandémie qui a entraîné la fermeture des lieux culturels. Benoît Lambert, le directeur du Théâtre Dijon-Bourgogne, avait décidé de la lancer dans tous les cas, même si elle n’avait pu être suivie que par les professionnels, pour qui Dijon est toujours une plate-forme de découvertes. Tout était prêt donc, quand est tombée la bonne nouvelle que les théâtres pouvaient rouvrir au public dès le 19 mai.

Routes de l’exil

Malgré la présence graphique du pangolin, le Covid-19 ne s’est pas invité dans la programmation, qui reste néanmoins sérieusement branchée sur l’état du monde, un monde qui ne se résume pas à l’épidémie. Ce sont donc les formes documentaires, de plus en plus présentes dans le théâtre contemporain, qui ont donné le « la » de ce festival. La création d’ouverture, Traverses, est signée par une metteuse en scène, Leyla-Claire Rabih, qui travaille sur la Syrie depuis plusieurs années. Elle a, notamment, monté Chroniques d’une révolution orpheline, une trilogie basée sur des textes du jeune auteur de Damas, Mohammad Al Attar.

Avec Traverses, elle s’intéresse à ce qu’elle appelle le 5e acte de la tragédie syrienne : le sort des réfugiés, la manière dont ils se reconstruisent après les traumatismes de la guerre et de l’exil, et la question de l’identité. Son dispositif formel est simple, mais la qualité du spectacle réside dans sa constante justesse de ton, dans son absence de pathos et dans l’intimité créée avec les spectateurs.

Quelques chaises et tables posées au milieu du public, réparti en rond autour de l’espace de jeu, et c’est parti pour remonter les routes de l’exil : celles des réfugiés syriens rencontrés par Leyla-Claire Rabih en France, en Grèce ou au Liban, mais aussi celles, plus anciennes, de sa propre famille, d’origine syrienne, et des familles de ses deux acteurs, Philippe Journo et Elie Youssef. Des réfugiés rencontrés par la metteuse en scène, on ne verra jamais le visage, sur les écrans qui surplombent le plateau : seulement leurs mains, et des détails de leur habillement. Mais on entend leurs voix. Leyla-Claire Rabih, en jouant ainsi avec sensibilité entre la présence et l’absence, ne saurait mieux dire combien ces exilés sont devenus les fantômes qui hantent notre présent.

Source: newsbk.com

 

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