La vague de chaleur exceptionnellement précoce vécue par l’Espagne connaît son pic à partir de jeudi, une situation qui préoccupe les autorités dans ce pays en première ligne du réchauffement climatique en Europe.
«Il est très probable que le pic de cet épisode soit atteint jeudi et vendredi», a indiqué l’agence météorologique espagnole (Aemet), qui a évoqué «des maximales plus proches de celles de début juillet et des records généralisés pour un mois d’avril».
À Séville, où les éventails et les ombrelles sont de sortie, les salariés en première ligne sont déjà harassés par les fortes chaleurs.
«Il fait extrêmement chaud, on cherche de l’ombre et de l’eau à chaque instant», témoigne Juan Benito, serveur de 33 ans dans la capitale andalouse.
«De par son intensité et son caractère précoce», l’épisode observé depuis lundi «rentre dans le cadre des conséquences du changement climatique», a souligné Ruben Del Campo, porte-parole de l’Aemet, pour qui «il est possible qu’avril 2023 (…) soit l’un des deux mois d’avril les plus chauds» depuis que les relevés existent.
À Valence (est), si certains touristes se réjouissaient de pouvoir aller à la plage, des habitants affichaient au contraire leur inquiétude. Ramón Cabanyal, 66 ans, expliquait ainsi vouloir «faire prendre conscience à (son) entourage que ce que nous vivons est quelque chose qu’il faut arrêter.»
Dans ce contexte, les autorités espagnoles sont contraintes de s’adapter et le ministère de la Santé a proposé aux régions, dotées de larges compétences, d’avancer au 15 mai l’activation de leur plan chaleur, fixée auparavant au 1er juin.
Ces plans déterminent les différents niveaux de risques pour la population, en particulier vulnérable, en fonction des températures.
Celle de Madrid a déjà annoncé mercredi l’activation de son plan qui prévoit notamment la possibilité d’adapter les horaires des écoles, ce qui se fait habituellement à partir du mois de juin.
Le pays avait ainsi connu l’an dernier son année la plus chaude jamais enregistrée, avec plusieurs vagues de chaleur à partir du mois de mai, selon l’Aemet.
Selon une étude de l’Université polytechnique de Catalogne publiée mardi, le nombre de jours de l’année marqués par des températures estivales est passé en Espagne de 90 à 145 entre 1971 et 2022.
Toujours sur cette période, les épisodes de vagues de chaleur diurnes se sont multipliés par sept et les nocturnes par près de 11 tandis que la température a augmenté en moyenne de 3,54°C dans les principales villes espagnoles.
Risque «très élevé» d’incendie
Au-delà des températures, l’Espagne, qui exporte une grande partie de sa production agricole vers le reste de l’Europe, fait face à une sécheresse catastrophique qui inquiète agriculteurs et autorités.
Selon le Coag, principal syndicat d’agriculteurs, 60% des terres agricoles espagnoles sont actuellement «asphyxiées» par le manque de précipitations.
Sols secs et températures très élevées constituent un cocktail détonnant qui renforce les risques d’incendie.
La majeure partie du territoire a donc été placée jeudi en alerte pour risque «très élevé» ou «extrême» d’incendies par l’Aemet tandis que le ministère de l’Intérieur a convoqué une réunion de coordination exceptionnelle avec les régions sur ce sujet vendredi.
L’Espagne est déjà sur un record de surfaces brûlées depuis le début de l’année, avec plus de 54 000 hectares contre 17 126 hectares sur la même période de 2022, année pourtant record en matière d’incendies, d’après le Système européen d’information sur les feux de forêt (Effis)
Le Portugal voisin est lui aussi touché par cette vague de chaleur précoce. Les températures, qui sont de «10 à 15 degrés Celsius au-dessus de la normale», pourraient y atteindre les 37 degrés jeudi après un maximum de 35,4 degrés atteint mercredi dans le sud du pays, selon l’institut météorologique national.
AFP