Une équipe japonaise a montré qu’il est possible d’étudier la structure interne de notre étoile grâce aux ondes gravitationnelles.
L’étude des ondes gravitationnelles est encore une discipline balbutiante. Depuis qu’elles ont été observées pour la première fois par les équipes du LIGO et de Virgo qu’en 2015, les travaux qui y font référence sont décrivent généralement sur des sources particulièrement énergétiques, et donc plus faciles à repérer, comme des fusions entre des corps célestes extrêmement massifs.
Mais avec l’apparition progressive de nouveaux instruments de plus en plus sophistiqués, les astrophysiciens pourront bientôt réaliser des observations de plus en plus précises. Cela permettra d’observer notre univers sous un nouveau jour.
En effet, les ondes gravitationnelles théorisées par Albert Einstein ne se comportent pas exactement comme les ondes électromagnétiques, comme la lumière visible. Elles affichent un certain nombre de points communs, mais aussi une différence fondamentale dans leurs interactions avec les objets physiques. Contrairement à la lumière, les ondes gravitationnelles sont en effet capables de traverser directement la matière.
Cette distinction, déjà très importante pour les théoriciens, pourrait bientôt devenir la clé de voûte d’une nouvelle catégorie d’observations concrètes. Ryuichi Takahashi, astrophysicien à l’Observatoire astronomique national du Japon, a publié avec ses collègues un papier de recherche repéré par Universe Today qui décrit un nouveau concept intéressant. Ils proposent d’explorer l’intérieur du Soleil grâce aux ondes gravitationnelles.
Ausculter les étoiles grâce aux pulsars
Ce que nous savons de l’intérieur notre étoile aujourd’hui, nous le devons exclusivement à l’étude des phénomènes observables en surface. Parfois, il est possible d’en déduire des informations sur son activité interne. C’est notamment l’objectif d’une discipline nommée héliosismologie. Elle repose en grande partie sur l’étude de la propagation d’ondes sonores qui génèrent des pulsations assez faibles, mais néanmoins détectables en surface.
L’idée de l’équipe japonaise est très différente. Ils comptent se baser sur des étoiles à neutrons en rotation rapide (des pulsars). Certains de ces objets, relativement communs dans l’univers observable, émettent un flux d’ondes gravitationnelles tout au long de leur vie.
La méthode proposée consiste à chercher un pulsar placé précisément sur l’axe Terre-Soleil. Dans ces conditions, les ondes gravitationnelles traversent directement l’étoile. Les chercheurs pourraient ensuite étudier l’influence de cette traversée sur le signal.
Les ondes gravitationnelles sont effectivement capables de passer à travers notre étoile. Mais elles n’en ressortent pas entièrement indemnes pour autant. Même si les mécanismes physiques en jeu sont assez différents et qu’il s’agit d’un gros abus de langage, elles se comportent un petit peu comme des ondes sismiques. Elles sont directement affectées par la densité du matériel. En étudiant le signal à l’entrée et à la sortie du Soleil, les chercheurs peuvent donc déterminer la densité des différentes structures internes.
Dans leur étude, Takahashi et ses collègues se sont concentrés sur trois pulsars positionnés de façon avantageuse. Ils ont déterminé qu’il était possible de mesurer la densité des structures internes du Soleil en différents points avec une précision assez intéressante.
Des résultats encourageants
Pour déterminer si une observation est vraiment significative, les chercheurs raisonnent en termes d’écart-type. Il est généralement exprimé à l’aide de la lettre grecque sigma (σ). Très vulgairement, c’est une façon d’estimer la cohérence statistique d’un ensemble de données. Plus le chiffre associé à ce sigma plus élevée, plus on peut avoir confiance dans le fait qu’une mesure est significative et qu’elle ne provient pas d’une fluctuation aléatoire.
Les différentes disciplines scientifiques travaillent avec des standards assez différents à ce niveau. Par exemple, en sociologie, un résultat est généralement considéré comme significatif à partir de 2σ.
Cela correspond à une « certitude » de 95 %. En physique fondamentale, qui nécessite un degré de précision largement supérieur, les spécialistes visent généralement le 5σ, ce qui signifie qu’on peut avoir confiance à environ 99,999 94 % dans les résultats.
Takahashi et son équipe ont estimé pouvoir atteindre 3σ dans ces travaux. C’est donc un premier pas très encourageant. Cela signifie qu’avec davantage de données et des instruments plus sophistiqués, il serait effectivement possible d’analyser les profondeurs du Soleil avec un degré de précision important grâce aux ondes gravitationnelles émises par les pulsars.
Il ne reste donc plus qu’à identifier de nouveaux pulsars compatibles pour réitérer cette expérience. Cela permettra d’en apprendre davantage sur la structure et la dynamique interne du Soleil. À terme, une fois qu’une nouvelle génération de télescopes gravitationnels entrera en piste, les chercheurs pourront aussi envisager d’ausculter d’autres étoiles. Cela permettra certainement de faire de nouvelles découvertes fascinantes sur ces objets très importants dans la dynamique globale de l’univers.
Universe Today