L’eczéma est une dermatose prurigineuse caractérisée par une inflammation non contagieuse de la peau qui s’accompagne de rougeurs, de fines vésicules, de squames et de démangeaisons. Comment reconnaître l’eczéma ? Quelles en sont les causes et les facteurs de risque ? Peut-on prévenir l’eczéma ? Comment le soigner ? Voici nos explications.
Comment reconnaître l’eczéma ?
L’eczéma est une dermatose prurigineuse caractérisée par une inflammation non contagieuse de la peau qui s’accompagne de :
- rougeurs ;
- fines vésicules ;
- squames, c’est-à-dire de fines lamelles de peau qui se détachent de l’épiderme ;
- démangeaisons.
L’eczéma peut commencer très tôt dans la vie, et s’observe même chez les nourrissons. Les personnes atteintes connaissent des périodes communément appelées « poussées d’eczéma », durant lesquelles les symptômes s’aggravent. Ces poussées, de durée variable, sont entrecoupées de périodes de rémission. L’eczéma est souvent associé à :
- l’asthme ;
- diverses réactions allergiques.
Le mécanisme de l’eczéma n’est pas encore bien compris. Il toucherait à la fois le système immunitaire et les cellules de la peau qui agissent comme barrière pour les allergènes. L’eczéma serait un désordre de nature génétique, mais des facteurs environnementaux influenceraient son apparition, tels que :
- la présence d’irritants chimiques ;
- le stress .
Parmi toutes les maladies de la peau, l’eczéma est la plus fréquente : cette maladie motive jusqu’à 30 % des consultations en dermatologie. Dans les pays industrialisés, elle atteindrait de 15 à 30 % des enfants et de 2 à 10 % des adultes2. Selon de récentes estimations, les cas d’eczéma auraient doublé et peut-être même triplé depuis les 30 dernières années.
Eczéma chez le bébé
Pour expliquer cette incidence croissante de l’eczéma, diverses hypothèses ont été avancées. Par exemple, on soupçonne que la modification des habitudes alimentaires du nourrisson engendrée par le délaissement de l’allaitement et l’exposition précoce aux allergènes alimentaires jouerait un rôle dans l’apparition de cette maladie en bas âge.
En effet, il semble que l’allaitement exclusif du nourrisson durant les 3 premiers mois protège en partie contre la dermatite atopique3. En revanche, il n’y aurait pas de lien entre l’introduction précoce des aliments solides et l’apparition de l’eczéma chez les jeunes enfants4.
Quels sont les principaux types d’eczéma ?
Il existe plusieurs types d’eczéma, bien que le terme « eczéma » soit habituellement employé pour désigner les différentes variantes de la maladie.
Eczéma atopique ou dermatite atopique
C’est la forme la plus courante d’eczéma chronique. L’atopie est la tendance à réagir par des réactions allergiques médiées par des anticorps appelés IgE au contact d’allergènes normalement inoffensifs pour le reste de la population tels que :
- _les poussières ;
- _le pollen ;
- _les poils d’animaux ;
- _etc.
Les personnes atopiques présentent souvent, simultanément ou en alternance, diverses réactions allergiques, comme :
- _le rhume des foins ;
- _l’urticaire ;
- _l’asthme ;
- _les allergies alimentaires.
Ces allergies ont souvent une composante héréditaire puisqu’elles s’observent dans bien des cas à l’intérieur de familles dont au moins un des membres en souffre.
La dermatite atopique touche :
- 10 à 20% des enfants ;
- 2 à 3% des adultes en Europe.
La maladie débute le plus souvent chez le nourrisson et persiste le plus souvent durant l’enfance jusqu’à 5-6 ans, mais elle perdure parfois à l’âge adulte chez environ 15% des patients.
La dermatite atopique est une maladie multifactorielle qui fait intervenir :
- des facteurs environnementaux ;
- des facteurs génétiques : 50 à 70% des parents d’enfants atopiques ont un signe d’atopie tel qu’un eczéma dans l’enfance par exemple et 70% des vrais jumeaux font tous les deux de l’eczéma atopique. Ce facteur génétique est polygénique, car il touche au moins deux types de gènes.
Facteurs génétiques
Des gènes de la barrière cutanée superficielle
La peau comporte une barrière superficielle très fine et très résistante. Or, les patients ayant une dermatite atopique sont porteurs de mutations génétiques, notamment sur le gène codant pour la filaggrine. Celle-ci est une protéine de structure de l’épiderme jouant un rôle dans la structure de la barrière cutanée et maintenant un niveau d’hydratation cutanée optimal. La peau jouant moins bien son rôle de barrière, les antigènes et les irritants chimiques peuvent alors plus facilement y pénétrer.
Des gènes du système immunitaire cutané
Les personnes atopiques réagissent plus à leur environnement et déclenchent des réactions inflammatoires cutanées en présence d’antigènes, impliquant notamment :
- les cellules de Langherans, à savoir des cellules présentatrices d’antigènes ;
- les lymphocytes ou globules blancs producteurs d’anticorps ;
- etc.
Facteurs environnementaux
La dermatite atopique est une maladie dans laquelle des facteurs environnementaux sont impliqués et notamment :
La flore digestive
On découvre depuis quelques années à quel point le microbiote, ou composition de la flore bactérienne digestive, joue un rôle dans de nombreuses maladies et dans la réponse individuelle aux traitements. La dermatite atopique ne fait pas défaut à cette règle puisqu’on a découvert que le microbiote est un écosystème complexe qui intervient dans la maturation du système immunitaire. Des anomalies de diversification précoce du microbiote intestinal ont été observées chez les enfants à risque atopique ainsi chez les nouveau-nés à risque d’atopie.
La flore cutanée
Le microbiome cutané du nouveau-né se constitue progressivement après la naissance à partir du microbiome de la mère et de l’environnement. Comme pour le microbiote intestinal, il existe des différences entre le microbiome cutané des enfants atopiques et celui des enfants non atopiques, notamment lors des poussées de la dermatite atopique.
En effet, durant ces poussées, on observe une prolifération des souches de staphylocoques, dont le staphylocoque doré dans 90% des cas et le staphylocoque épidermidis, en rapport avec un déficit de l’immunité cutanée par le biais d’un déficit en « antibiotiques naturels » de la peau : les béta défensines.
Ainsi, les traitements locaux de la dermatite atopique tendent à favoriser la diversité bactérienne naturelle à la surface de la peau pour limiter la place au staphylocoque doré. De ce fait, il faut éviter dans la dermatite atopique les antiseptiques. En revanche, la corticothérapie locale, tant redoutée par les mamans, tend à favoriser la diversité bactérienne, au détriment du staphylocoque doré.
L’augmentation de la fréquence de la dermatite atopique est régulière depuis plusieurs décennies dans les pays en voie de développement, ce qui suggère que des facteurs d’environnement jouent un rôle majeur dans la physiopathologie de la maladie et notamment la diminution de l’exposition aux agents infectieux dans la tendre enfance.
De récentes études confirment que le mode de vie de type « occidental urbain » expose à un risque accru de maladies atopiques par rapport au mode de vie de type « rural ». En effet, le mode de vie occidental urbain, se caractérise par une exposition à des bactéries et parasites dès la prime enfance, en particulier dans des populations prédisposées génétiquement et dans les mêmes zones géographiques.
Ceci évoque donc aussi d’autres facteurs plus présents dans le mode de vie « occidental urbain » qui restent à prouver scientifiquement tels que :
- _le rôle de l’abandon de l’allaitement maternel ;
- _l’allergie au lait ;
- _la plus grande concentration de substances polluantes et d’allergènes dans l’environnement.
Enfin, il faut noter qu’il existe plus d’eczéma de l’enfant dans les pays du Nord de l’Europe que dans les pays du Sud de l’Europe. On peut donc se demander s’il n’existe pas des facteurs pouvant entraîner un eczéma de l’enfant dans les pays du Nord.
L’hygiène méticuleuse des enfants en bas âge dans les pays du Nord est-elle responsable de l’augmentation de l’eczéma de l’enfant dans ces pays ? Les enfants des pays du Nord sont-ils plus soumis aux allergènes que dans le Sud ? Le climat plus froid peut-il expliquer la plus grande fréquence d’eczéma de l’enfant dans les pays du Nord ?
L’ensemble de ces données a permis de développer une « théorie de la biodiversité » protectrice de la dermatite atopique, qui associe biodiversité environnementale et biodiversité des différents microbiomes cutané et digestif.
Comment se manifeste la dermatite atopique ?
Chez le nourrisson, les lésions débutent sur les joues, voire le front et le cuir chevelu, puis elles s’étendent sur les faces d’extension des bras et des jambes et le tronc. Il s’agit de rougeurs sèches et rugueuses ou suintantes et croûteuses, qui démangent toujours. Le nourrisson tend à y porter les mains, ce qui peut engendrer des griffures ;
- Après 2 ans, les lésions de dermatite atopique vont prédominer dans les plis de flexion des coudes et des genoux, voire des poignets ;
- Chez l’adolescent et l’adulte, les lésions se localisent surtout au niveau du visage et du cou – les anglo-saxons parlent de « head and neck dermatitis » – et les membres. Elles sont souvent épaissies. On parle de lichénification de la peau.
Complications de la dermatite atopique
La surinfection par le staphylocoque doré ou « impétiginisation », est responsable d’un écoulement purulent, parfois de bulles et de croûtes jaunes comme du miel.
La surinfection par le virus de l’herpès, surtout HSV-1, est est rare. Elle touche 5% des enfants atteints de dermatite atopique. Néanmoins, elle est redoutable, et se traduit par :
_une aggravation brutale de la maladie ;
- _l’apparition de petites lésions vésiculeuses multiples évoquant celles de la varicelle, donnant des plaies.
On parle de syndrôme de Kaposi-Juliusberg.
La prise en charge de la dermatite atopique de l’enfant recourt donc à la limitation des facteurs favorisants et notamment les éléments accentuant la sécheresse cutanée en :
_appliquant des crèmes hydratantes ;
- _en évitant les bains trop chauds et prolongés ;
- _en utilisant des savons doux, de type huile de bain ou surgras par exemple.
Le thermalisme est une des armes thérapeutiques permettant de lutter contre l’eczéma atopique, mais il n’est généralement utilisé que conjointement aux traitements classiques à base de crèmes contenant de la cortisone lors des poussées notamment.
Dermatite de contact
La dermatite allergique de contact se caractérise par des lésions d’eczéma apparaissant en moyenne 3 jours après un contact de la peau avec certaines substances appelées allergènes. Ce délai peut être porté à 10 jours s’il s’agit du premier contact avec l’allergène. Il s’agit d’une réaction allergique à la substance.
Cette réaction allergique ne survient pas nécessairement lors du premier contact et peut apparaître après plusieurs mois ou années de tolérance à l’allergène. On peut ainsi devenir allergique à une substance que l’on tolérait, par exemple, le nickel des bijoux ou des pièces de monnaie.
Évolution et complication de l’eczéma
Évolution de l’eczéma
Selon le type d’eczéma, les symptômes peuvent durer 1 ou 2 semaines, ou se prolonger pendant plusieurs années.
Complications
Lorsqu’elles sont grattées, les plaques d’eczéma suintent et s’irritent davantage. Parfois, ces zones peuvent s’infecter. Il est possible notamment de contracter :
- une impétiginisation, qui est une surinfection bactérienne, notamment à Staphylococcus Aureus, de l’eczéma, caractérisée par l’apparition de croûtes mélicériques, c’est-à-dire des croûtes ressemblant à du miel cristallisé ;
- une cellulite. Cette complication se caractérise par l’apparition subite d’une enflure sur la peau d’un membre, qui devient sensible, rouge et chaud.
Dans ces cas-là, il est important de consulter rapidement.
passeportsante