Un cessez-le-feu d’une semaine a été conclu, samedi soir, entre les belligérants au Soudan. À la veille de son entrée en vigueur, des combats ont éclaté, dimanche, dans la capitale Khartoum.
Après l’annonce d’un cessez-le-feu d’une semaine, accepté par l’armée et les paramilitaires se disputant le pouvoir au Soudan, des raids aériens, des tirs et des explosions ont éclaté, dimanche 21 mai, dans la capitale soudanaise, Khartoum. Le cessez-le-feu est censé commencer lundi soir.
Les médiateurs américains et saoudiens ont annoncé avoir obtenu, après deux semaines de négociations en Arabie saoudite, une trêve d’une semaine à compter de lundi à 19 h 45 GMT.
Les deux camps ont annoncé par communiqué vouloir respecter cette trêve, que l’ONU, l’Union africaine et le bloc de l’Afrique de l’Est, l’Igad, ont saluée. Mais en plus de cinq semaines de guerre, une dizaine de cessez-le-feu ont déjà été promis et aussitôt violés.
« On ne leur fait pas confiance : à chaque fois, ils annoncent une trêve et reprennent leurs combats aussitôt », témoigne Adam Issa, un commerçant du Darfour, la région de l’ouest du pays la plus meurtrie par les combats avec Khartoum.
« Le plus important, ce n’est pas d’annoncer une trêve mais de la respecter et de garantir des couloirs sécurisés pour la nourriture et l’aide », renchérit un autre habitant de la capitale.
Depuis le 15 avril, la guerre entre l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo a fait un millier de morts dans ce pays d’Afrique de l’Est, l’un des plus pauvres du monde, et plus d’un million de déplacés et de réfugiés.
Infrastructures endommagées
Les infrastructures ont été très endommagées : la quasi-totalité des hôpitaux de Khartoum et du Darfour ne fonctionnent plus, et la plupart des cinq millions d’habitants de la capitale, terrés chez eux pour ceux qui n’ont pas pu fuir, n’ont ni eau ni électricité.
Dans un pays aux banques fermées et aux convois d’approvisionnement interrompus par les raids aériens, les tirs d’artillerie et les combats à l’arme lourde entre les immeubles des quartiers résidentiels, les vivres se font de plus en plus rares et la plupart des usines agro-alimentaires ont été détruites ou pillées.
Les humanitaires réclament des couloirs sécurisés pour acheminer médicaments, nourriture et carburant, afin de relancer des services déliquescents depuis des décennies.
Dimanche de nouveau, le patron de l’action humanitaire de l’ONU, Martin Griffiths, a plaidé pour « la livraison sécurisée d’aide humanitaire » alors que plus de 25 des 45 millions de Soudanais ont besoin d’aide.
Si la guerre se poursuit, avertit l’ONU, un million de Soudanais supplémentaires pourraient se réfugier dans les pays voisins, qui redoutent une contagion.
« Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu »
Cette fois, assurent Riyad et Washington, il y aura « un mécanisme de surveillance du cessez-le-feu », regroupant des représentants des deux camps ainsi que des États-Unis et de l’Arabie saoudite.
Hussein Mohammed, qui vit à Khartoum, veut y croire : « Cette fois-ci, on espère que les médiateurs surveilleront les belligérants » et qu’ils seront forcés de faire taire leurs armes. « Cela me permettra d’emmener ma mère chez le médecin : elle doit le voir chaque semaine mais nous n’avons pas pu y aller depuis le 13 avril », raconte-t-il à l’AFP.
Sawsan Mohammed, elle, espère pouvoir revoir ses parents. « Ils vivent dans le nord de la capitale et moi dans le sud, je ne les ai pas vus depuis le 5 avril », affirme-t-elle à l’AFP.
Au Vatican, le pape François a appelé « la communauté internationale à ne ménager aucun effort (…) pour alléger les souffrances de la population ».
Le Soudan s’est aussi invité au festival de Cannes : premier réalisateur soudanais à avoir un film en sélection, Mohamed Kordofani s’est dit « honoré, fier, heureux (…) mais aussi coupable » car « pendant que je suis sur le tapis rouge, des gens tentent de fuir les bombes ».
Invectives par médias interposés
Les deux généraux rivaux avaient évincé ensemble les civils du pouvoir au Soudan par un putsch en octobre 2021. Mais le 15 avril, ils sont entrés en guerre et vendredi, le général Burhane a remplacé le général Daglo au poste de numéro deux du pouvoir militaire par Malik Agar, un ancien rebelle qui avait signé en 2020 la paix avec Khartoum. Il a également nommé trois de ses fidèles au sommet de l’armée.
Malik Agar a déclaré, samedi, vouloir « arrêter la guerre et s’asseoir à la table des négociations ». Mais pour lui, ces négociations passent par l’intégration des FSR dans l’armée régulière, pomme de discorde entre les deux généraux qui a déclenché le conflit.
Depuis le début de la guerre, les deux généraux s’invectivent par médias interposés, mais ne se sont pas exprimés depuis cette annonce.
L’émissaire de l’ONU pour le Soudan, Volker Perthes, est parti samedi pour New York, où il doit s’adresser, lundi, au Conseil de sécurité.
AFP