En Afrique du Sud, l’épidémie de choléra suscite la colère des habitants de Hammanskraal

A woman carries buckets to collect water from a tank in an informal settlement in Hammanskraal on May 23, 2023. An outbreak of cholera has killed at least 15 people near South Africa's capital of Pretoria, as city officials urged residents of Hammanskraal and surrounding areas not to drink from the tap, adding water tankers were being supplied. Cholera has experienced a global resurgence since 2021 after a decade of steady decline, according to the United Nations, which this week warned one billion people in 43 countries were at risk. The disease is not endemic in South Africa. (Photo by Michele Spatari / AFP)

Alors que quinze personnes sont mortes depuis février, la population de cette petite ville dénonce un problème de traitement des eaux usées, un manque d’infrastructures et la corruption des élus locaux.

La famille rassemblée dans ce jardin d’un quartier déshérité d’une petite ville sud-africaine, près de Pretoria, est en deuil : un proche, parmi les quinze victimes de l’épidémie comptabilisées dans le pays, est mort du choléra mais aussi du manque de soins.

L’Afrique du Sud a enregistré son premier décès dû à la maladie en février. Le Mozambique et le Malawi voisins sont les pays du monde les plus gravement touchés cette année par le fléau, selon les Nations unies. Le choléra, généralement causé par l’absorption d’eau ou d’aliments contaminés par une bactérie, est en forte recrudescence sur le continent depuis 2021 et un milliard de personnes dans 43 pays sont à risque, a alerté cette semaine l’ONU. L’Afrique du Sud compte désormais plusieurs cas.

A Hammanskraal, à environ 50 km au nord de la capitale, Kagiso Sadika, 37 ans, raconte ne pas boire l’eau du robinet, non potable, d’aussi loin qu’il se souvienne. Le mort que l’on veille est son cousin. « Tout le monde a le droit d’avoir accès à de l’eau propre », tempête-t-il, décrivant le flot marron qui sort habituellement des robinets dans le coin. Assis les jambes croisées sous un citronnier et visiblement ébranlé, il dit à l’AFP espérer que son cousin ne soit « pas mort en vain ».

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Ce dernier a souffert de diarrhées et de vomissements continus, raconte Kagiso Sadika. Il s’est rapidement affaibli, n’ayant plus la force de marcher, de se laver ou même de dormir. Il est mort en une semaine. Conduit à l’hôpital le plus proche, l’hôpital Jubilee, Michael Sadika n’a pas été pris en charge : pas assez de lits, manque de personnel. Transporté une seconde fois, il est finalement mort aux urgences. Il avait 53 ans.

« Les infirmières n’ont que deux mains. Et lorsqu’elles ne sont pas assez nombreuses, les patients souffrent et certains finissent par mourir », a reconnu Mogomotsi Seleke, porte-parole du syndicat du personnel soignant (Denosa), interrogé par l’AFP devant l’hôpital Jubilee.

Camions-citernes
Sur 34 personnes contaminées, quinze sont décédées depuis vendredi. L’infection montre « un taux de mortalité très élevé », a souligné lors d’une conférence de presse, mardi 23 mai, le docteur Sandile Buthelezi, directeur général au ministère de la santé.

La municipalité de Pretoria, dont dépend Hammanskraal, a exhorté les habitants à ne pas boire l’eau du robinet, promettant l’arrivée de camions-citernes. Mais selon les habitants, les passages ne se font qu’une ou deux fois par semaine. « Pas d’eau, pas de maison… Nous n’avons rien », se désespère Rosa Kovani, 61 ans, empruntant un chemin de terre dans une commune voisine pour chercher de l’eau à l’un de ces camions-citernes. Un bébé accroché dans le dos et un seau à la main, elle ne croit pas qu’elle aura un jour de l’eau courante et potable dans sa baraque en tôle.

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Ils sont nombreux ici à passer leurs après-midi assis devant leur maison. Le chômage est endémique dans le pays et frôle les 35 %. Et derrière les minces clôtures de fil barbelé protégeant les modestes propriétés, la colère enfle. L’épidémie mortelle est due au dysfonctionnement du traitement des eaux usées, à un manque d’infrastructures et à la corruption des élus locaux, dénoncent des habitants.

Le ministère de l’eau et de l’assainissement a annoncé l’ouverture d’une enquête sur les problèmes d’eau à Hammanskraal. « C’est un problème qui aurait pu être résolu il y a longtemps », estime Kagiso Sadika.

Avec la crise de l’eau, certains commerces se sont lancés dans la vente d’eau purifiée. Mais beaucoup ne peuvent pas s’offrir les précieuses bouteilles.

AFP

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