Les inégalités « demeurent béantes » en France entre classes populaires et aisées, en termes de revenus mais aussi de patrimoine, de réussite scolaire et même de santé, affirme dans un rapport publié jeudi l’Observatoire des inégalités. L’organisme indépendant s’alarme d’une « fracture sociale » dangereuse pour la démocratie.
« La vie est belle, le destin s’en écarte, personne ne joue avec les mêmes cartes ». Plus de vingt ans après la sortie de la chanson « Nés sous la même étoile » du groupe IAM, les paroles pourraient résumer le rapport publié, jeudi 8 juin, par l’Observatoire des inégalités. Aussi bien en termes de revenus que de patrimoine, de réussite scolaire et de santé, les inégalités « demeurent béantes » en France entre classes populaires et aisées, selon cet organisme indépendant qui s’alarme d’une « fracture sociale » dangereuse pour la démocratie.
« Ce qui choque, c’est le décalage entre le discours public sur l’égalité des chances et la réalité », a affirmé lors d’une conférence de presse l’un des deux auteurs du rapport, Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités, qui dresse un état des lieux tous les deux ans.
Depuis quelques années, le débat public s’est surtout focalisé sur les inégalités liées à la couleur de peau, à l’âge ou au genre, au point que l’analyse « en termes de positions sociales » a pu paraître « disqualifiée », a déploré Louis Maurin, qui dénonce une « hypocrisie très répandue dans différents camps politiques ».
Pourtant, non seulement les cadres sont bien mieux payés que les ouvriers et employés – les 10 % les plus riches gagnent près de trois fois plus que les 10 % les plus pauvres –, mais ils sont également beaucoup moins touchés par la précarité du travail et par le mal-logement. Ils souffrent aussi moins de certains problèmes de santé, au point qu’un cadre « peut compter sur six années de vie supplémentaires » par rapport à un ouvrier, détaille le rapport.
L’école « ne réduit pas assez » les inégalités
En outre, la « fracture sociale » se fait nettement sentir à l’école, qui certes « n’augmente pas les inégalités », mais « ne les réduit pas assez ».
Considérée dans son ensemble, la population française est de plus en plus diplômée, mais dans ce domaine les écarts entre classes sociales ne baissent pas, a souligné l’autre autrice du rapport, Anne Brunner.
Ainsi, entre 2010 et 2020, la part d’enfants d’ouvriers ou d’employés ayant obtenu un diplôme de niveau bac +5 a doublé, de 6 à 13 %, mais celle des enfants de cadres et de professions intermédiaires aussi, de 22 à 40 %.
Malgré le déclin du monde ouvrier constaté depuis au moins 30 ans, les différences entre classes sociales « restent un puissant moteur de fracturation » et donc de tensions dans la société, insistent les auteurs du rapport.
Ils appellent à un débat sur une redistribution plus équitable des richesses, mais sans se focaliser sur une « poignée d’hyper riches » – car dans ce cas « on n’aura rien réglé du tout ».
AFP