Le phénomène est récurrent au Sénégal, la participation des enfants aux manifestations publiques.
Il s’observe depuis plusieurs décennies dans les zones de la bande océanique fortement peuplée d’enfants de la rue.
À Dakar, ces mineurs sans domicile fixe, participent spontanément aux manifestations publiques ou acceptent d’être enrôlés.
Djiby Diakhaté, sociologue, enseignant chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar soutient que, « ce ne sont pas seulement des manifestations de type politique. On les voit dans des manifestations après les combats de lutte, par exemple. Et cela crée au Sénégal, aujourd’hui, ce qu’on appelle le phénomène « Small », qui en anglais signifie, « Petit ». Donc, ce sont ces petits qui sont dans des groupes d’agresseurs, de petits bandits qui accompagnent des délinquants adultes dans la réalisation de leurs actes déviants. »
Montée du phénomène
Face aux contraintes socio-économiques actuelles, le phénomène « Petit » s’est accru dans plusieurs quartiers de Dakar en raison de la promiscuité et des faibles revenus des parents.
Les rares campagnes de sensibilisation et d’éducation organisées par les communautés, peinent à changer le comportement de ces jeunes souvent livrés à eux-mêmes.
« Notre village est tellement étroit. La plupart des manifestants habitent dans les garages. Ils ne dorment presque pas. Nous essayons de les récupérer, de les inciter à aimer l’école et les formations », explique Fatma Traoré, monitrice des collectivités éducatives à Ngor village.
Le rôle des réseaux sociaux
Cheikh Ahmeth Tidane Sy, le président du Cadre Unitaire de l’Islam au Sénégal, précise qu’au Sénégal, deux systèmes éducatifs cohabitent : l’école traditionnelle et l’école conventionnelle catholique qui ne sont pas pourvoyeuses de mineurs délinquants. Pour lui, la déperdition scolaire et les réseaux sociaux sont à l’origine de ce phénomène.
« Il faut aussi reconnaître qu’au Sénégal, qu’il y a un conflit de génération entre les jeunes et les moins jeunes. Les jeunes qui sont férus de réseaux sociaux, qui sont beaucoup plus déconnectés aujourd’hui des réalités familiales. Cela crée des situations qui les mettent, plus ou moins, dans une position de contestation des règles préétablies dans le cadre de la famille, dans le cadre de la société. Il y a un glissement vers de nouveaux paradigmes auxquels les parents et la société ne sont pas préparés », affirme Cheikh Ahmeth Tidane Sy.
Face à cette dérive inquiétante, Cheikh Ahmeth Tidiane Sy appelle les parents et les professionnels de l’éducation, à s’impliquer davantage dans la gestion sociale des enfants.
Le vendredi 16 juin, d’autres mineurs vont comparaître devant le tribunal des mineurs à Dakar pour participation à des manifestations non autorisées.
DW