L’endométriose, qui touche une femme sur 10, possède des origines génétiques. Toutefois, une équipe japonaise vient de mettre en lumière un possible lien avec une infection de bactéries de type Fusobacterium.
L’endométriose, qui touche environ une femme sur 10 dans le monde, possède des origines encore mal comprises. Elle se caractérise par la migration et le développement de tissus de la muqueuse utérine hors de l’utérus, dans l’endomètre, mais également dans d’autres parties de la zone pelvienne (ovaires, trompes, vessies, péritoine, etc.). Pour le moment, il n’existe pas à proprement parler de traitement contre la maladie. La prise d’hormones pour stopper le cycle menstruel constitue une piste. Dans les cas les plus avancés, une chirurgie peut être proposée mais elle reste complexe. Les personnes atteintes d’endométriose sont plus susceptibles de souffrir d’infertilité et de développer des cancers de l’ovaire.
L’état actuel de la recherche va dans le sens d’une maladie multifactorielle, avec des facteurs hormonaux, environnementaux et génétiques (le risque de développer une endométriose est multiplié par cinq chez les femmes qui ont une sœur ou une mère touchée par cette maladie). Mais le microbiote pourrait bien être impliqué également, selon de récents travaux publiés dans la revue Science par une équipe japonaise.
Fusobacterium, en cause dans l’inflammation ?
Une équipe de l’Université de Nagoya a prélevé du tissu de l’endomètre de 28 personnes dont la moitié étaient atteintes d’endométriose. Après analyse génétique, l’équipe a constaté des anomalies dans les fibroblastes, des cellules du tissu conjonctif. Parmi les 13 gènes surexprimés dans les fibroblastes figure le gène TAGLN.
Ce dernier entraîne la production d’une protéine qui pousse les cellules à proliférer et migrer dans les tissus, ce qui pourrait expliquer pourquoi les cellules endométriales se développent en dehors de l’utérus dans l’endométriose. Or, l’activité de TAGLN est aussi boostée par l’inflammation. L’équipe s’est donc mise à la recherche d’une bactérie qui pourrait causer cette inflammation.
En analysant les bactéries présentes chez 155 participantes, les travaux ont montré que 64% d’entre elles qui avaient de l’endométriose étaient aussi porteuses de Fusobacterium, une bactérie qui fait partie de la flore buccale, dans l’appareil gastro-intestinal et dans les voies génitales féminines. Parmi celles qui n’en souffraient pas, seules 7% portaient également cette bactérie. Des résultats qui laissent penser que Fusobacterium serait largement plus présent chez les personnes avec de l’endométriose.
Un essai en cours sur l’humain
Pour comprendre si Fusobacterium pouvait directement avoir un impact sur le développement de l’endométriose, l’équipe a transplanté du tissu de l’endomètre d’un groupe de souris à un autre. En l’espace de quelques semaines, des lésions typiques de l’endométriose se sont formées chez les souris ayant reçu la greffe.
Avec ce modèle, les chercheurs ont pu constater que les lésions étaient plus importantes et plus fréquentes chez les souris chez qui Fusobacterium avait été inoculé que chez les autres. Enfin, les rongeurs ont reçu un traitement antibiotique, du métronidazole ou du chloramphenicol, par voie vaginale, ce qui a ralenti le développement de la maladie et a permis de réduire la taille ainsi que le nombre de lésions déjà présentes.
L’étude présente tout de même quelques limites. La bactérie mériterait par exemple d’être observée au sein d’une population plus diversifiée d’un point de vue ethnique et de genre, note la revue Nature. Par ailleurs, des recherches sur l’humain sont d’autant plus nécessaires que les souris sont un modèle limité dans ce genre de recherche : en effet, ces rongeurs n’ont pas de menstruations spontanément et n’ont pas de lésions de l’endomètre.
L’étude japonaise se concentre sur les lésions causées par l’endométriose sur les ovaires, tandis que sur l’humain, elles peuvent survenir à de nombreux endroits comme le colon et la vessie. Pour aller plus loin, l’Université de Nagoya a déjà lancé une nouvelle étude : un essai clinique est actuellement en cours afin de voir si les antibiotiques permettent également de soulager les symptômes chez l’humain.
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