Comment fonctionne le paracétamol ?
« Il bloque la cascade de la douleur »
Vous avez probablement glissé du paracétamol au fond de votre sac, de votre tiroir de bureau ou dans l’armoire à pharmacie de votre maison. Si vous avez mal à la tête, des règles douloureuses ou d’autres douleurs, vous en avalerez probablement un comprimé. Mais, savez-vous comment il agit exactement dans notre corps ?
Qu’est-ce que le paracétamol ?
Le paracétamol est une molécule. Ce médicament est utilisé comme analgésique (pour lutter contre la douleur) et comme antipyrétique (contre la fièvre). Il est souvent utilisé pour traiter des douleurs légères ou modérées ou la fièvre.
On confond souvent le paracétamol, qui est le nom du composé chimique, avec les noms de médicament qui en contiennent : le Doliprane, le Dafalgan ou l’Efferalgan, par exemple.
Si la prise de paracétamol est presque devenue banale, sa prescription n’a pas toujours été associée à la douleur. À la fin du 19e siècle et au long du 20e siècle, il est plébiscité pour sa capacité à réguler la température.
« Le mode d’utilisation du paracétamol a évolué. Les médecins voulaient en premier lieu faire baisser la fièvre, car elle était vue comme le premier signe de la maladie. Calmer la douleur n’était pas une priorité », nous raconte Faïza Bossy, médecin généraliste à Paris. L’histoire du paracétamol montre bien comment la médecine a évolué, et accorde aujourd’hui une place plus importante à la douleur.
En combien de temps agit le Doliprane ?
Le paracétamol agit en une vingtaine de minutes après sa prise. Il agit ensuite pendant environ 4 heures.
Comment le Doliprane sait-il où se trouve la douleur ?
On peut avoir l’impression que ce composé chimique « sait » où nous avons mal, qu’il parvient à localiser la douleur dans notre corps. Pourtant, ce n’est pas ainsi qu’il fonctionne. « Le paracétamol ne cible pas la douleur en périphérie, il joue sur le système nerveux central », nous éclaire Faïza Bossy.
Quelle est l’action du Doliprane ?
Que se passe-t-il lors d’une prise de paracétamol puis qu’il passe dans notre sang ? Le paracétamol joue un rôle sur notre hypothalamus, une partie du cerveau de la taille d’une amande. Elle est impliquée dans de nombreux processus, comme la thermorégulation.
Cette structure du système nerveux central sécrète une enzyme (une protéine) portant le nom de « COX » — pour cyclo-oxygénase. La COX sécrète une hormone, la prostaglandine.
« Le paracétamol joue sur la COX, au niveau du système nerveux central, et donc sur la prostaglandine, en périphérie. En d’autres termes, il bloque la cascade de la douleur », poursuit Faïza Bossy.
Le paracétamol n’est pas anti-inflammatoire, à la différence de l’ibuprofène, par exemple. Les anti-inflammatoires, eux, « soulagent des signes liés au processus de l’inflammation. Ils ne traitent pas la cause directement, mais soulagent les symptômes », nous explique Faïza Bossy. Si l’on a une entorse à la cheville, un anti-inflammatoire (non stéroïdien) va pouvoir traiter l’inflammation, mais ne sera pas suffisant pour régler le problème.
Règles : pourquoi le paracétamol ne fonctionne-t-il pas toujours ?
Le paracétamol peut parfois s’avérer insuffisant pour calmer les douleurs liées aux menstruations. « Pendant les règles, il y a des processus inflammatoires. On sait, par exemple, que l’utérus sécrète des protéines de l’inflammation, ou prostaglandine, qui vont permettre d’expulser le sang », indique Faïza Bossy.
Il y a aussi le cas du syndrome prémenstruel (SPM), qui peut survenir dans les jours précédant l’arrivée des règles. « On a découvert que lors du SPM, le foie sécrète une protéine de l’inflammation ou CRP (protéine C réactive) en grande quantité, qui pourrait être impliquée dans les symptômes éprouvés lors du SPM », poursuit la médecin.
Dans tous les cas, le paracétamol n’étant pas un anti-inflammatoire, ce n’est pas le médicament recommandé lors du SPM.
Quel est l’effet de la caféine sur le paracétamol ?
La caféine a la réputation d’augmenter l’efficacité du paracétamol. « La caféine potentialise ou augmente l’action de certains antalgiques, dont le paracétamol, confirme Faïza Bossy. À la dose de 100 mg par jour, soit une tasse de café, l’effet des antalgiques serait augmenté de 5 à 10 %. »
Un lien entre le Doliprane et les AVC ?
Le lien entre la prise du paracétamol et la survenue d’accidents cardiovasculaires reste à étudier. Une étude publiée dans Annal Rheumatic Disease en 2015 estimait que le paracétamol était susceptible d’accroître de 20 % le risque de maladies cardiovasculaires, d’infarctus ou d’AVC.
« La dangerosité du paracétamol augmenterait avec la dose absorbée régulièrement et a été constatée chez des patients qui prenaient soit de fortes doses, ou qui en prenaient sur de longues périodes, note Faïza Bossy. Il n’y a jamais eu d’autres études depuis sur le sujet à proprement parler […]. Pour résumer, il faut encore faire des études sur le sujet. »
Est-ce dangereux de prendre du paracétamol tous les jours ?
Le paracétamol « n’est pas une molécule anodine. Notre foie le transforme en substance toxique et cela peut détruire les cellules », prévient Faïza Bossy. Cette toxicité est atteinte à forte dose, complète le docteur de pharmacie Raphaël Piarroux par email : « Le paracétamol est toxique en prise unique à partir de 10g, avec des lésions hépatiques (du foie) pouvant nécessiter une greffe.
La dose est de 1g par prise maximum. En prise continue, la posologie maximale autorisée est de 4g par jour (et ne devrait pas dépasser 3g sauf avis médical) avec un espace de 6h entre deux prises de 1g ou 4h entre deux prises de 500mg. » Comme tout médicament, la prise de paracétamol à dose toxique peut être mortelle et il convient de respecter les règles de bon usage.
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