Après avoir transformé la Biélorussie en vassal de la Russie, Loukachenko hérite du groupe Wagner

Le président biélorusse a annoncé l’arrivée mardi du chef du groupe Wagner, dans le cadre d’un accord ayant mis fin à sa rébellion en Russie. Alexandre Loukachenko affirme haut et fort depuis samedi 24 juin avoir joué le rôle de médiateur dans cette affaire. Après avoir accepté la vassalisation de son pays en échange de son maintien au pouvoir, le voici désormais contraint d’accueillir sur son territoire les mercenaires d’Evguéni Prigojine.

Alexandre Loukachenko a affirmé mardi 27 juin qu’Evguéni Prigojine, le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, était arrivé en Biélorussie. Dans le cadre d’un accord ayant mis fin à sa rébellion armée en Russie le week-end dernier, des milliers de mercenaires du groupe doivent rejoindre leur chef dans ce pays. L’autocrate biélorusse a-t-il vraiment, comme il le laisse entendre, eu son mot à dire dans le dénouement de cette crise ? Est-il en mesure de s’opposer aux diktats du Kremlin alors que son régime est inféodé à la Russie ?

La question reste posée, tant Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis 1994, a, au fil des ans, totalement lié son sort à celui du pouvoir russe et accepté la vassalisation de son pays par son voisin.

Notamment depuis sa réélection en août 2020, dénoncée comme frauduleuse par l’opposition et non reconnue par les pays occidentaux, qui a provoqué un mouvement de contestation sans précédent, au point de menacer la survie même de son régime.

Malgré des semaines de mobilisation et de manifestations, Alexandre Loukachenko est parvenu, par une répression implacable, à museler la contestation. Arrestations de masse, violences policières, procès opaques, emprisonnement ou exil forcé des principales figures du mouvement de protestation, mais aussi d’opposants politiques, de responsables de médias et d’ONG, font encore plus ouvertement basculer son régime dans l’autoritarisme.

Pour faire face aux pressions occidentales et aux multiples sanctions européennes qui ont suivi la répression et l’interception, en mai 2021, d’un avion de ligne survolant le territoire biélorusse – les autorités avaient alors arrêté le journaliste d’opposition Roman Protassevitch et sa compagne Sofia Sapega, qui se trouvaient à bord –, Alexandre Loukachenko s’est plus que jamais tourné vers la Russie.

Mainmise russe sur un président acculé
Sans surprise, Moscou a offert son soutien à un président fragilisé et acculé – qui a longtemps cultivé une certaine distance vis-à-vis de Vladimir Poutine –, lui promettant notamment d’envoyer des forces russes si la contestation devait devenir violente.

Un soutien décisif pour Alexandre Loukachenko qui n’avait, jusqu’alors, jamais vraiment écarté l’idée d’un rapprochement avec l’Union européenne. Même s’il essayait, parallèlement, de négocier des concessions financières de la Russie. L’idée d’un tel rapprochement est devenu caduque après une nouvel épisode de tension, en novembre 2021, quand Minsk a été accusé d’orchestrer une crise migratoire aux portes de l’UE, en représailles aux sanctions européennes.

Cette nouvelle crise a fini par placer totalement la Biélorussie – dont la dépendance économique et énergétique envers son puissant voisin a été renforcée par les sanctions occidentales – sous l’emprise d’un pouvoir russe obnubilé par l’Ukraine.

À force de multiplier les signes d’allégeance envers Moscou, la Biélorussie devient acteur du conflit en permettant que son territoire devienne une base arrière de l’armée russe – des milliers de soldats y sont déployés à la veille de l’invasion de l’Ukraine lancée le 24 février 2022.

La Russie ne se prive pas d’ailleurs pas d’utiliser le territoire de son voisin pour lancer, au début de l’invasion, ses chars contre Kiev, distante d’une centaine de kilomètres de la frontière. En représailles, de nouvelles sanctions américaines et européennes sont prises contre Minsk et Alexandre Loukachenko, qualifié de « complice » de l’invasion russe par Emmanuel Macron.

Un « complice » qui a fini par entériner l’annexion de la Crimée, après avoir longtemps résisté aux pressions russes, et par accepter d’accueillir une partie de l’arsenal nucléaire russe, après avoir fait modifier la constitution de son pays à la demande de Moscou.

Cette démarche acte une perte de souveraineté et une présence militaire russe permanente dans cette ancienne république soviétique finalement restée un satellite de la Russie. Et qui est donc devenue, avec l’affaire Prigojine, le nouveau camp de base des mercenaires de Wagner.

france24

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