Paul Rusesabagina : les Rwandais sont « prisonniers dans leur propre pays »

Les Rwandais sont « des prisonniers dans leur propre pays », a estimé samedi Paul Rusesabagina, farouche opposant au président rwandais Paul Kagame et connu internationalement pour avoir sauvé des centaines de personnes pendant le génocide des Tutsi en 1994.

Dans son premier message public depuis sa remise en liberté le 25 mars, après plus de 900 jours dans une prison rwandaise, le héros du film « Hotel Rwanda » a remercié les Etats-Unis pour l’organisation de sa libération surprise de ce qu’il a décrit comme un « enfer ».

Il a expliqué que son message vidéo sur YouTube coïncidait avec la proclamation de l’indépendance du Rwanda le 1er juillet 1962.

« Malheureusement aujourd’hui, 61 ans plus tard, les Rwandais ne sont toujours pas libres. Les Rwandais sont des prisonniers dans leur propre pays », a-t-il déclaré depuis son domicile à San Antonio au Texas (Etats-Unis).

Le gouvernement rwandais est « un gouvernement autoritaire qui n’accorde aucun droit à ses citoyens et ne tolère aucune contestation de la part de ses citoyens« , a-t-il ajouté, l’accusant d’avoir « tenté de (le) réduire au silence en utilisant la politique, la surveillance et la violence » depuis la sortie du film en 2014, montrant « au monde ses vraies couleurs ».

« Ils kidnappent, emprisonnent de force, torturent, tuent et organisent des procès montés de toutes pièces pour quiconque n’est pas d’accord avec eux« , a-t-il poursuivi. « J’ai simplement eu de la chance de n’avoir pas été tué comme tant d’autres. Mon procès a fait les gros titres dans le monde entier mais je suis le seul parmi les milliers dans cette situation chaque année« .

M. Rusesabagina, 69 ans, a été rendu célèbre par le film « Hôtel Rwanda » qui raconte comment ce Hutu modéré qui dirigeait l’Hôtel des Mille Collines dans la capitale rwandaise a sauvé quelque 1 200 personnes durant le génocide des Tutsi en 1994.

M. Rusesabagina, qui possède la citoyenneté belge et réside de façon permanente aux Etats-Unis, avait été remis en liberté en mars au terme de 939 jours de détention après avoir vu sa peine de 25 ans de prison pour « terrorisme » commuée par arrêté présidentiel.

Sa condamnation en septembre 2021 avait suscité la réprobation internationale.

Les défenseurs des droits humains accusent le Rwanda -dirigé d’une main de fer par M. Kagame depuis la fin du génocide au cours duquel 800 000 personnes ont été tuées- de réprimer la liberté d’expression et l’opposition.

M. Rusesabagina vivait depuis 1996 en exil aux Etats-Unis et en Belgique, avant d’être arrêté à Kigali en 2020 dans des circonstances troubles, à la descente d’un avion qu’il pensait à destination du Burundi.

L’opposant a été jugé de février à juillet 2021, accusé notamment de « terrorisme » pour des attaques menées par le Front de libération nationale (FLN), organisation classée terroriste par Kigali, qui ont fait neuf morts en 2018 et 2019.

Les soutiens de l’opposant estiment que son procès a été une imposture marquée d’irrégularités.

Il a admis avoir participé à la fondation en 2017 du Mouvement rwandais pour le changement démocratique (MRCD), dont le FLN est considéré comme le bras armé, mais a toujours nié toute implication dans les attaques.

AFP

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