La crise alimentaire mondiale et l’inflation causées par la guerre en Ukraine et la hausse des cours des céréales et de l’énergie ont rendu d’une actualité pressante la recherche de l’autosuffisance alimentaire en Afrique.
Dans ce contexte, plusieurs pays africains se sont tournés vers des États expérimentés dans le domaine de la production agricole, comme la Corée du Sud.
La Corée du Sud compte partager son savoir-faire
Ce lundi 10 juillet, après plusieurs mois d’échanges et de visites de terrain, Séoul et huit pays africains ( le Sénégal, la Gambie, la Guinée, le Ghana, le Cameroun, l’Ouganda, le Kenya et la Guinée-Bissau) lancent l’initiative « Korean Rice Belt ». Ce projet, qui entre dans le cadre de l’aide publique au développement sud-coréenne, prévoit de se concentrer sur le riz, l’un des aliments de base en Afrique.
La Corée du Sud a été en mesure de produire suffisamment de riz pour répondre à plus de 90 % de la demande locale, bien qu’elle dépende encore fortement de certaines autres importations alimentaires. Le but est de fournir des variétés de riz de qualité à haut rendement, des machines agricoles, et de partager le savoir-faire agricole.
Objectif : aider à stimuler la production de riz et à réduire la dépendance aux importations alors que des inquiétudes persistent concernant la sécurité alimentaire sur le continent.
Développer la production locale
L’Afrique représente 32 % des importations mondiales de riz pour 13 % de la population mondiale, selon Africa Rice, un centre de recherche à Abidjan, formé de 28 pays membres. « La production locale de riz ne couvre qu’environ 60 % de la demande actuelle en Afrique subsaharienne », a récemment souligné le centre.
En 2020, les pays africains ont consommé 301,16 millions de tonnes de riz mais n’en ont produit que 210,54 millions de tonnes en raison du manque d’infrastructures et de technologies nécessaires et de faibles rendements agricoles.
Les prix du riz ont presque doublé ces dernières années en raison des perturbations de la chaîne d’approvisionnement et les importations n’ont eu cessent de peser sur les réserves de change des pays.
Des pays comme la Côte d’Ivoire, le Sénégal ou le Nigeria s’emploient depuis quelques années à mettre en ?uvre des stratégies plus efficientes afin de freiner les importations. Le Sénégal, qui produit environ quelque 840 000 tonnes de riz mais en importe en moyenne chaque année 900 000 tonnes, mise de plus en plus sur le riz local.
L’objectif est de réduire cette dépendance et de devenir autosuffisant d’ici dix ans. Au-delà de la quantité, la supposée moins bonne qualité du riz produit au Sénégal a longtemps détourné les consommateurs. Le pays veut suivre l’exemple ivoirien, pays où « les quantités importées d’Inde ont connu une régression de 24 % de 2021 à 2022.
Il y a eu une substitution vers le riz ivoirien en nette progression et secondairement vers d’autres origines », a déclaré à l’AFP Régina Adea, chargée de communication de l’Agence pour le développement de la filière riz en Côte d’Ivoire (Aderiz). Autre stratégie, celle du Nigeria, où le riz importé est ultrataxé à l’arrivée dans les ports et interdit d’entrer par la route.
Un partenariat qui pourrait rapidement s’étendre
« Nous avons signé un protocole d’accord avec le pays respectif pour mieux répondre aux besoins spécifiques de chaque pays compte tenu des circonstances uniques et pour obtenir des résultats tangibles.
Cela va au-delà de la simple aide alimentaire, car nous cherchons à leur faire savoir comment cultiver eux-mêmes », a déclaré le ministre de l’Agriculture de la Corée du Sud, Chung Hwang-keun, dont le pays a mis en place une nouvelle approche de la coopération Sud-Sud.
Ainsi, Séoul prévoit de construire des installations au Ghana, en Guinée, en Guinée-Bissau, en Gambie, au Sénégal, au Cameroun, en Ouganda et au Kenya pour produire des semences de riz mieux adaptées aux conditions locales et ayant des rendements deux à trois fois supérieurs aux variétés domestiques, a déclaré le ministre dans une récente interview.
« Ce projet aidera non seulement à résoudre la crise alimentaire en Afrique, mais développera son industrie agricole et l’économie au sens large. Il aidera également à atteindre les objectifs de développement durable du monde en protégeant le continent africain », a ajouté le ministre.
La Corée du Sud prévoit d’allouer 80 millions de dollars au projet d’ici à 2027, et elle « peut encore étendre le projet car davantage de pays africains ont exprimé leur espoir de participer », selon le ministre.
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