Un navire de l’ONU est arrivé dimanche dans les eaux yémenites pour permettre le transfert complexe du pétrole actuellement stocké dans un supertanker délabré après des années de guerre au Yémen, pour éviter une gigantesque marée noire en mer Rouge.
Mais la menace d’un désastre au large de Hodeida, ville portuaire de l’ouest, continue de planer avec les températures extrêmes et la présence de mines marines dans cette région qui a fait l’objet de batailles sanglantes.
« Le risque est très élevé », a insisté Mohammed Mudawi, représentant du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) sur ce dossier.
« Mais nous espérons qu’une fois cette opération terminée, ce risque sera éliminé », a-t-il ajouté. Les travaux doivent durer environ trois semaines.
Des expertises ont permis de conclure que « le transfert du pétrole peut avoir lieu, avec un niveau de risque acceptable », a déclaré lors d’une réunion du Conseil de sécurité, cette semaine, le coordinateur humanitaire de l’ONU pour le Yémen, David Gressly.
« Nous sommes assez confiants », a-t-il confirmé plus tard auprès de l’AFP, à bord du Nautica. « Nous pensons (…) que le transfert se fera. »
Autour du Safer, des dauphins sautent hors de l’eau et des cormorans ont élu domicile sur le gouvernail du navire en ruine, dans cette zone abritant une faune et une flore qui pourraient être dévastées par une marée noire.
– « Très chaud » –
Le Safer est amarré depuis les années 1980 à une cinquantaine de kilomètres du port stratégique de Hodeida et à neuf kilomètres de la côte la plus proche.
Sa maintenance a été interrompue en 2015 avec la guerre qui oppose le mouvement des Houthis, soutenu par l’Iran, et les forces du gouvernement appuyées par une coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite.
Le navire, qui menaçait d’exploser à tout moment, transporte quatre fois plus de pétrole que celui qui s’est déversé lors de la marée noire de l’Exxon Valdez en 1989 au large de l’Alaska, l’une des pires catastrophes écologiques au monde.
En cas de marée noire, qui pourrait affecter l’Arabie saoudite, l’Erythrée, Djibouti et la Somalie, le coût du seul nettoyage a été estimé à 20 milliards de dollars (17,8 milliards d’euros) par l’ONU.
Si l’état du navire permet l’opération prévue, celle-ci démarrera alors que les températures estivales culminent à environ 50°C dans la péninsule arabique.
« Il se met à faire très chaud, très vite », souligne Nick Quinn, un expert qui participe à l’opération.
Ces températures extrêmes augmentent les risques de « glisser, trébucher et de chuter » pour les travailleurs qui portent des équipements de protection lourds.
– « Déplacer le problème » –
C’est précisément le genre de scénario cauchemar que les Houthis ont été accusés de favoriser en rejetant initialement les demandes d’accès de l’ONU pour inspecter le Safer.
Les Houthis contrôlent non seulement la capitale Sanaa mais se sont aussi emparés, au fil de la guerre, de pans entiers du territoire, notamment à Hodeida.
Ils accusent de leur côté l’Arabie saoudite, affirmant que son blocus aérien et maritime imposée au Yémen avait privé le navire de l’entretien nécessaire.
Dénoncé par les ONG, ce blocus est défendu par Ryad qui dit vouloir limiter l’acheminement d’équipements militaires vers les Houthis.
Le Nautica, qui sera rebaptisé Yemen, restera dans la région avec le pétrole à son bord. La question de la propriété de cet or noir se posera alors, car la rivalité entre les Houthis et le gouvernement continue de faire rage, bien que les violences aient largement diminué sur le terrain.
De même, le « problème » de l’entretien du nouveau navire sera victime de ces rivalités, a estimé Idriss Al-Chami, patron de la compagnie pétrolière et gazière yéménite, nommé par les Houthis à Sanaa.
« Nous déplaçons donc le problème d’un vieux navire vieillissant vers un navire plus récent. »
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