Complotisme ? «Tout ça, c’est écrit d’avance» : polémique autour des propos de Mélenchon, qui n’entend pas se désavouer

Head of La France Insoumise (LFI) left-wing party and candidate for the 2022 presidential election Jean-Luc Melenchon takes part in a rally by striking workers of FerroPem against a social plan at "Les Clavaux" factory on June 5, 2021 in Livet-et-Gavet, near Grenoble, eastern France . (Photo by PHILIPPE DESMAZES / AFP)
Lors d’une émission politique dimanche sur France Inter, le candidat LFI à la présidentielle a tenu un discours qui fleurait le complotisme, prédisant qu’ «un grave incident» aurait lieu en amont de la présidentielle de 2022, provoquant un tollé.
Il faut toujours rester en éveil avec Jean-Luc Mélenchon. Chaque mot compte. La banalité n’existe pas. Dimanche, le candidat à la présidentielle était invité à la radio, sur France Inter plus précisément. Une guerre des mots tout au long de l’entretien. Personne ne se montre offusqué. Une interview avec l’insoumis est une lutte. Celle-ci se termine sur la campagne suprême qui approche. Il explique à sa manière que les puissants soutiennent toujours les puissants. Jean-Luc Mélenchon prend pour exemple Emmanuel Macron. Le président de la République est, à ses yeux, une fabrication du «système». Il pose une question : est-ce qu’il y aura une autre fabrication l’an prochain ?
Le candidat insoumis poursuit son propos. Les journalistes l’écoutent. Et ça donne : «De même que vous verrez que dans la dernière semaine de la campagne présidentielle, nous aurons un grave incident ou un meurtre. Ça a été Merah en 2012, ça a été l’attentat la dernière semaine sur les Champs-Elysées, avant on avait eu Papy Voise, dont plus personne n’a jamais entendu parler après. Tout ça, c’est écrit d’avance.»

On récapitule. Trois exemples différents. Mohamed Merah, auteur jihadiste des tueries de Toulouse et de Montauban, notamment dans un établissement scolaire juif en mars 2012 ; le policier Xavier Jugelé, assassiné sur les Champs-Elysées le 20 avril 2017 ; Paul Voise, un retraité agressé chez lui à Orléans en avril 2002. On se pose des questions : Jean-Luc Mélenchon entend quoi par «écrit d’avance» ? Les puissants organisent des attentats en cachette pour faire régner la terreur à quelques jours du vote afin d’installer leur candidat sur le trône ?

«Les complotistes anticomplotistes sont de sortie»

Les propos de l’insoumis ne sont pas passés inaperçus. Le parcours est identique. La séquence tourne sur les réseaux sociaux, puis sur les chaînes d’infos avant de terminer dans les journaux et à la radio. Les réactions atterrissent de partout. Des politiques, des journalistes, des syndicats de policiers et des anonymes. Tout ce que déteste Jean-Luc Mélenchon. Un socialiste qui lui tombe dessus ? Un marcheur qui le classe avec les dangereux ? Un syndicat de policiers qui lui demande des comptes ? L’insoumis part au combat. Pas question de se désavouer. Il se retrousse les manches. Il a tapoté dimanche sur les réseaux sociaux : «Les complotistes anticomplotistes sont de sortie. Ils nient que les assassins font leur coup au moment qui fait parler d’eux. Propos ineptes. A moins que ce soit pour les couvrir.»

Le premier d’une série de tweets avant un post Facebook dans lequel il dénonce le retour d’un «harcèlement» contre lui. «Un mot monté en épingle par quelques gens influents et aussitôt la boucle s’enflamme, de Twitter aux chaînes d’info et ainsi de suite, écrit-il. D’une émission d’une heure […] ce ne sont ni les accidents du travail, ni les féminicides, ni les subventions aux religions, ni Biden, ni rien qui ressort : juste un bon coup monté à partir d’une phrase.» Le candidat à la présidentielle poursuit : «Quand Le Pen récupère l’émotion d’un crime pour faire sa propagande, c’est génial ; quand quelqu’un met en garde contre ce type de manipulation, c’est qu’il est complice avec les meurtriers.»

Sa réponse ne freine pas totalement les interrogations. Ses copains prennent sa défense en tirant un peu la langue. Jean-Luc Mélenchon ne tombe pas dans le complotisme, disent-ils sans en faire des caisses. Un lieutenant insoumis argumente : «Peut-être qu’il s’est mal fait comprendre. Mais il dit juste que les terroristes maîtrisent leur calendrier en frappant pendant une campagne présidentielle. Et on ne peut pas dire que cela ne porte aucune conséquence sur le scrutin car cela arrange tous ceux qui jouent sur les peurs et qui tentent de diviser la nation.»

Des propos «inadmissibles» pour Latifa Ibn Ziaten

Une phrase intéressante : «Peut-être qu’il s’est mal fait comprendre.» Très bien. Le candidat à la présidentielle devrait peut-être revenir sur ses propos afin de «mieux» se faire comprendre. Pas pour répondre à ses adversaires qui attendent le moindre de ses faux pas pour lui coller une étiquette sur le dos. Il pourrait s’adresser à ses électeurs (ou non) qui s’interrogent mais aussi à la mère d’une des victimes, Latifa Ibn Ziaten, qui juge les propos de Jean-Luc Mélenchon «inadmissibles».

La semaine passée, lors d’un échange, le candidat insoumis à la présidentielle est revenu sur sa trajectoire. Il a parlé «d’expérience». On a retenu une phrase : «En politique, lorsque tu montes dans un toboggan, il n’y a pas de marche arrière, tu glisses jusqu’au bout.» Espérons pour lui qu’il n’a pas grimpé dans celui du complotisme.

Source: liberation.fr

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