Pour permettre une prise en charge efficace des tumeurs au cerveau réputées les plus agressives, une équipe de chercheurs de l’Harvard Medical School développe un outil utilisant l’intelligence artificielle pour séquencer l’ADN de la tumeur pendant l’opération chirurgicale.
Les informations délivrées en temps réel grâce à un échantillon de tissu tumoral permettent au chirurgien de prendre les décisions les plus adaptées au profil de la tumeur.
Une fois le diagnostic posé, le temps est compté. La durée médiane de survie avec un gliome, la tumeur au cerveau la plus fréquente et la plus agressive, peut aller de quelques mois à plusieurs années selon le moment et l’efficacité de sa prise en charge. Bien que de plus en plus rapides, les procédures actuelles de séquençage du génome des tumeurs, qui permettent d’en connaître parfaitement l’identité, ne sont toujours pas optimales.
Des scientifiques de la Harvard Medical School (HMS) ont conçu un outil d’intelligence artificielle, appelé CHARM (« Cryosection Histopathology Assessment and Review Machine »), capable de décoder l’ADN d’une tumeur cérébrale durant une intervention chirurgicale.
Un gain de temps et de précision qui pourrait permettre de guider les chirurgiens vers les décisions chirurgicales et thérapeutiques les plus adaptées. Les premiers résultats de ces travaux sont publiés dans la revue Med.
L’identité moléculaire de la tumeur, une information indispensable
Chaque tumeur a son identité moléculaire propre : il existe par exemple trois sous-variants principaux du gliome, qui n’auront pas la même vitesse de développement ni la même réaction aux traitements. Connaitre cette identité permet alors aux neurochirurgiens de prendre les meilleures décisions pour traiter efficacement une tumeur en particulier.
« Certaines tumeurs bénéficient par exemple d’un traitement sur place avec des plaquettes enduites de médicaments placées directement dans le cerveau au moment de l’opération », explique Kun-Hsing Yu, auteur principal de l’étude et professeur à l’Institut Blavatnik de l’HMS. Des décisions qui concernent également la quantité de tissu cérébral à retirer, si une ablation trop importante peut affecter les fonctions cognitives du patient, laisser des tissus cancéreux est un risque de voir la tumeur se propager de nouveau.
L’identité de la tumeur fournit de précieux renseignements sur la propagation, l’agressivité et la réaction aux traitements. Seulement, cette information cruciale peut prendre quelques jours, voire quelques semaines à être délivrée par les méthodes actuelles, qui consistent à prélever du tissu cérébral en amont, le congeler et l’examiner au microscope. Cette technique tend également à abimer les échantillons lors de la congélation, augmentant les risques d’imprécisions.
« À l’heure actuelle, même une pratique clinique de pointe ne permet pas d’établir le profil moléculaire des tumeurs au cours d’une intervention chirurgicale », déplore Kun-Hsing Yu. Pour y remédier, son équipe a mis au point un outil permettant l’identification en temps réel du type moléculaire de la tumeur.
Un outil d’oncologie de précision en temps réel
Loin de voler la vedette au médecin, l’outil CHARM a été développé dans le but d’accélérer et d’optimiser la prise en charge des tumeurs au cerveau, en procédant à leur identification moléculaire durant l’opération chirurgicale. Ces informations, délivrées en temps réel grâce à un échantillon de tissu tumoral, permettent au chirurgien de prendre les décisions les plus adaptées au profil de la tumeur, sans délai d’analyses supplémentaires, ni congélation.
CHARM utilise l’intelligence artificielle pour identifier la signature moléculaire des tumeurs à partir de données issues de 2.300 échantillons congelés.
« Tout comme les médecins humains qui doivent s’engager dans une formation continue, les outils d’IA doivent se tenir au courant des dernières connaissances pour rester performants », avertit le chercheur, qui veille au développement d’un outil visant à guider le médecin en améliorant l’efficacité de la prise en charge pour le patient.
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