Depuis bientôt deux ans, les taux immobiliers sont engagés sur une pente ascendante qui ne devrait pas s’adoucir avant encore plusieurs mois. De 1 % en octobre 2021, ils tutoient aujourd’hui les 4 %, et pourraient sans surprise gagner un point de plus d’ici la fin de l’année. Moins de crédits sont accordés. Le marché de l’immobilier en souffre, forcément.
Qu’il semble loin et difficile à imaginer, cet été 2021 où les banques prêtaient à moins de 1 % pour un achat immobilier. Depuis, les taux de prêt n’ont fait qu’augmenter de façon spectaculaire, si bien que deux ans plus tard, de nombreuses offres de prêt affichent déjà 4 % sur 25 ans. Ce ne sont encore que les fourchettes hautes des taux d’emprunts signés, le taux moyen restant encore en dessous de la barre des 4 %, mais ça ne va pas durer…
Dès septembre, le seuil devrait être franchi, et selon la grande majorité des experts du secteur, un autre cap encore plus symbolique devrait être atteint puis dépassé d’ici la fin de l’année : celui des 5 %. Inimaginable encore il y a quelques mois, quand on s’attendait à ce que l’envol des taux se calme bien plus tôt.
Que s’est-il passé depuis ? Une Banque centrale européenne qui n’a de cesse que de relever ses taux d’usure pour juguler l’inflation qui frappe la zone Euro. Ces taux d’usure fixent directement la limite à ne pas franchir pour les banques qui accordent les prêts immobiliers. Et en juillet, ils ont été rehaussés à 5,09 % pour les prêts de plus de 20 ans.
De leur côté, les banques se montrent plus frileuses dans ce contexte inflationniste, d’autant que leurs coûts de fonctionnement augmentent et que le coût du risque pris – qui conditionne en partie la valeur du taux – est forcément plus élevé. Les banques n’ont par ailleurs jamais réalisé de gros bénéfices sur les crédits immobiliers ces dernières années, et sont d’autant moins disposées à jouer sur leur marge pour freiner la hausse des taux : elles n’en ont – quasiment – pas.
Les refus de prêts augmentent et les transactions chutent
Conséquence : les refus de prêts augmentent, le pouvoir d’achat immobilier chute tout comme le nombre de transactions conclues. Les vendeurs refusent encore de faire baisser les prix, et le marché immobilier subit une forme… d’immobilisme.
« Quand on arrivait à emprunter 300 000 € à 1,8 % il y a un an ou deux, aujourd’hui, avec le même dossier, on a 250 000 €», commente, impuissant, un agent immobilier toulousain. Les enveloppes se réduisent, mais les prix affichés peinent à suivre. « Les vendeurs n’ont pas encore intégré que ce sont les acheteurs qui font le marché aujourd’hui.
Ils refusent de négocier à la baisse et quand ils se rendent compte un ou deux mois plus tard qu’ils n’obtiendront pas mieux, ils changent d’avis mais le dossier de l’acheteur ne passe plus parce qu’entre-temps les taux ont encore augmenté. Tout le monde se retrouve coincé. »
Alors les seules ventes – ou presque – qui arrivent à terme suivent la règle « des trois D : Déménagement, Divorce, Décès », souffle l’agent immobilier, qui plaint les nouveaux qui doivent se lancer dans le métier. Beaucoup de « petites » agences à Toulouse disent d’ailleurs souffrir dans cette période, au point de ne pas savoir si elles passeront l’été…
Il leur faudra sans doute attendre encore pourtant, car les taux ne devraient pas se stabiliser avant 2024. Après ? « Difficile de savoir comment le marché va se comporter », estime Laura Martino, directrice des partenariats bancaires à la Cafpi (Conseil à l’accession et au financement en prêts immobiliers), « mais je ne pense pas que nous reverrons des taux inférieurs à 1 % et un marché de l’immobilier aussi dynamique.
Si on peut dire que la situation est ‘’anormale’’ aujourd’hui, on peut tout aussi bien souligner qu’elle était également anormale à la fin des années 2010 ».
Reste l’éternelle question : est-ce le bon moment pour acheter malgré tout dans la mesure où, demain, ce pourrait être pire ?
ladepeche