L’Afrique peut devenir une place majeure des chaines d’approvisionnement mondiales, selon la CNUCED

Forte de l’abondance de ses ressources naturelles et d’un marché à la consommation en pleine expansion, le continent africain a une opportunité historique de s’inviter dans les chaînes d’approvisionnement technologiques mondiales, a indiqué mercredi une agence de l’ONU basée à Genève.

Qu’il s’agisse de l’automobile, de la téléphonie, du photovoltaïque, l’Afrique peut ainsi devenir une destination manufacturière de premier plan pour les industries à forte intensité technologique et un maillon essentiel des chaînes d’approvisionnement mondiales, a expliqué la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) dans son Rapport 2023 sur le développement économique en Afrique.  
L’abondance en minéraux et métaux essentiels en Afrique, comme l’aluminium, le cobalt, le cuivre, le lithium et le manganèse, fait du continent une destination attrayante pour les secteurs manufacturiers. D’autant plus que les récents bouleversements causés par les turbulences commerciales, les événements géopolitiques et une conjoncture  incertaine obligent les fabricants à diversifier leurs sites de production.

Selon la CNUCED, l’abondance des ressources indispensables à la tech mondiale sur le continent et l’essor d’un marché de consommation local font de l’Afrique un endroit pertinent pour implanter des unités de production, notamment pour le marché des pièces automobiles, des batteries des smartphones, des médicaments de base ou encore des photovoltaïques.

L’atout du sous-sol africain

À titre d’exemple, en 2022, la République démocratique du Congo (RDC) était le plus grand producteur de cuivre en Afrique, avec 1,8 million de tonnes métriques – et au-delà de l’exploration et de l’extraction, le pays est une destination potentielle pour l’affinage de produits métalliques destinés au secteur des véhicules électriques.  
Comme pour la RDC, le premier atout de l’Afrique pour s’imposer dans ces domaines est son sous-sol, selon la CNUCED. Le continent recèle une petite moitié des réserves mondiales de cobalt et de manganèse – deux métaux essentiels à la fabrication de batteries électriques par exemple – mais aussi une production significative d’autres matériaux vitaux : argent, titane, nickel, lithium, graphite, etc.

Comme pour illustrer l’importance du sous-sol africain, le rapport rappelle que construire une usine fabriquant 10.000 tonnes de précurseur [un ingrédient essentiel de la fabrication des batteries] en RDC, par exemple, pourrait coûter 39 millions de dollars. « Ce qui est trois fois moins que pour une usine similaire dans un pays qui ne disposerait pas des ressources naturelles requises », détaille le rapport.

Mais pour favoriser un tel développement, les pays africains devraient toutefois obtenir de meilleurs contrats miniers et licences d’exploration pour les métaux utilisés dans les produits de haute technologie et les chaînes d’approvisionnement. Cela renforcerait les industries nationales, en permettant aux entreprises locales de concevoir, d’acheter, de fabriquer et de fournir les composants nécessaires.
Renforcer sa position dans les chaînes d’approvisionnement

Par ailleurs, l’Afrique offre également des avantages tels qu’une main-d’œuvre plus jeune, sensibilisée à la technologie et adaptable, et une classe moyenne en plein essor, connue pour sa demande croissante de biens et de services plus sophistiqués.
« C’est le moment pour l’Afrique de renforcer sa position dans les chaînes d’approvisionnement mondiales, alors que les efforts de diversification se poursuivent. C’est aussi l’occasion pour le continent de renforcer ses industries émergentes, de favoriser la croissance économique et de créer des emplois pour des millions de personnes », a déclaré Rebeca Grynspan, Secrétaire générale de la CNUCED.

La CNUCED assure aussi que miser sur les chaînes d’approvisionnement technologiques peut avoir un effet démultiplicateur sur les emplois. D’autant que les emplois à contenu technologique permettraient une augmentation des salaires sur le continent, actuellement fixés à un minimum de 220 dollars par mois, contre une moyenne de 668 dollars dans les Amériques. 

En outre, une intégration plus poussée dans les chaînes d’approvisionnement mondiales permettrait également de diversifier les économies africaines et de renforcer leur résistance aux chocs futurs.

L’expansion des chaînes d’approvisionnement en énergie en Afrique est également une occasion d’accélérer l’action climatique. À l’heure actuelle, seuls 2% environ des investissements mondiaux dans les énergies renouvelables sont destinés à l’Afrique.

Le financement des chaînes d’approvisionnement a augmenté de 40%

Selon le rapport, la valeur du marché africain du financement des chaînes d’approvisionnement a augmenté de 40% entre 2021 et 2022, atteignant 41 milliards de dollars. Mais cela ne suffit pas.

Le continent peut mobiliser davantage de fonds en éliminant les obstacles au financement des chaînes d’approvisionnement, notamment les défis réglementaires, la perception des risques élevés et l’insuffisance de renseignements en matière de crédits.

Le rapport est un appel aux dirigeants africains à se concerter et à mettre en place les réglementations et infrastructures adéquates pour décider les investisseurs à franchir le pas. « Nous exhortons les pays africains à éviter d’être enfermés dans la fourniture « simplement » de matières premières, ce qui se traduit par une intégration de très faible valeur aux chaînes d’approvisionnement mondiales », a écrit Mme Grynspan.

En attendant, dix-sept pays africains, dont l’Angola, le Botswana, le Ghana et l’Afrique du Sud, ont déjà mis en œuvre des réglementations sur le contenu local afin de soutenir la croissance des chaînes d’approvisionnement locales et de favoriser le transfert de technologies.

Sur un autre plan, la CNUCED souligne la nécessité d’un allègement de la dette pour offrir aux pays africains une marge de manœuvre budgétaire leur permettant d’investir dans le renforcement de leurs chaînes d’approvisionnement, étant donné qu’ils paient en moyenne quatre fois plus pour emprunter que les États-Unis et huit fois plus que les économies européennes.
A noter que le PIB du continent africain est passé de 4,5% 2021 à 3,7% en 2022.

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