Les pays sud-américains d’Amazonie ont décidé de former une « alliance » contre la déforestation, lors d’un sommet à Belem qualifié par le président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, de « tournant » dans la lutte contre le réchauffement climatique.
La création d’une entité intitulée « Alliance amazonienne de combat contre la déforestation » est stipulée dans une déclaration commune signée par le Brésil, la Bolivie, la Colombie, l’Équateur, le Guyana, le Pérou, le Suriname et le Venezuela. Il s’agit des huit pays membres de l’Organisation du traité de coopération amazonienne (OTCA), créée en 1995 dans le but de préserver cette vaste région qui abrite environ 10 % de la biodiversité mondiale.
L’alliance « a pour but de promouvoir la coopération régionale dans le combat contre la déforestation, pour éviter que l’Amazonie n’atteigne le point de non-retour ». Si ce point de non-retour était atteint, l’Amazonie émettrait plus de carbone qu’elle n’en absorberait, ce qui aggraverait le réchauffement de la planète.
Le sommet s’est ouvert le jour où le service européen Copernicus confirmait que le mois de juillet a été le plus chaud jamais enregistré sur terre. « Il n’a jamais été aussi urgent de reprendre et d’étendre notre coopération », a déclaré le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva dans son discours d’ouverture, évoquant un « nouveau rêve amazonien ».
Son homologue colombien Gustavo Petro a pour sa part appelé à ce que les discours se traduisent en actes concrets au plus vite. « Si nous sommes au bord de l’extinction, si c’est lors de cette décennie qu’il faut prendre des décisions, que sommes-nous en train de faire, à part des discours ? », a-t-il lancé.
Grands principes mais pas de délai précis
De retour au pouvoir en janvier, Lula s’est engagé à mettre un terme d’ici à 2030 à la déforestation, qui a fortement augmenté sous le mandat de son prédécesseur d’extrême droite Jair Bolsonaro. Les terres déboisées sont souvent transformées en pâturage pour le bétail, mais la destruction est également causée par des orpailleurs et des trafiquants de bois.
Un plan de sécurité régionale doit ainsi être établi pour réprimer l’orpaillage illégal, et les trafics en tous genres, rapporte notre correspondant à São Paulo, Martin Bernard. La protection des droits des peuples autochtones a été mise en avant et la déclaration de Belém pose de grands principes, mais ne fixe pas de délai précis : chaque pays sera ainsi libre d’établir ses propres objectifs en matière de déforestation.
Divergences régionales sur la question du pétrole
Mais le président colombien Gustavo Petro a affirmé que la « déforestation zéro » serait « insuffisante ». « La science nous a montré que même si on recouvre le monde entier d’arbres, ça ne suffira pas à absorber les émissions de CO2 […]. Il faut abandonner les énergies fossiles », a-t-il insisté. Selon lui, cette responsabilité est avant tout « des pays du nord », tandis que « nous [les pays amazoniens] devons protéger l’éponge », comme il décrit la forêt tropicale.
Mais cette transition énergétique est un sujet plus sensible pour d’importants producteurs d’hydrocarbures de la région amazonienne, comme le Venezuela ou le Brésil.
Mercredi, le sommet se poursuivra avec la participation de pays non membres de l’OTCA invités à Belém, comme la France, mais aussi l’Allemagne et la Norvège, principaux bailleurs du Fonds Amazonie. L’Indonésie, la République du Congo et le Congo-Brazzaville, qui abritent de vastes forêts tropicales dans d’autres continents, ont également été invités.
L’absence de la France, avec la Guyane française, « n’est pas sérieuse »
La grande absente de cette réunion sur l’Amazine, qui va durer jusqu’à mercredi 9 août est la Guyane française. Ses représentants locaux n’ont pas été dépêchés sur place et, alors qu’il était invité en personne par son homologue brésilien Lula, le président français Emmanuel Macron ne sera pas présent non plus à Bélem. Seule l’ambassadrice de France au Brésil est envoyée, une décision qui interroge pour un territoire couvert à 90% par la forêt primaire et pour un président qui a voulu s’afficher un leader dans des questions environnementales.
Le géographe et directeur de recherches au CNRS François-Michel Le Tourneau explique les raisons de l’absence d’un représentant de taille pour la France.
Les parlementaires guyanais n’ont pas été conviés. Le député Jean-Victor Castor, du groupe Gauche démocrate et républicaine (membre de l’opposition de la Nupes) et élu dans la 1ère circonscription de Guyane, fustige ce manque de représentation de la France dans cet évènement.
VivAfrik