Paris : Femmes enceintes, bébés… La préfecture promet une solution aux sans-abri qui campent place de l’Hôtel de ville

Selon nos informations, la préfecture d’Ile-de-France a mis à l’abri une cinquantaine de personnes ce lundi, et compte faire de même pour le reste des personnes présentes place de l’Hôtel de ville à Paris « d’ici la fin de la semaine »

« On a été agressées par des passants, les policiers ne surveillent plus. On a eu des insultes racistes comme  »sales négresses rentrez chez vous vous sentez », et toutes sortes d’injures », se plaint Fatoumata, enceinte de cinq mois, qui campe place de l’Hotel de ville à Paris depuis trois semaines

« On a été agressées par des passants, les policiers ne surveillent plus. On a eu des insultes racistes comme  »sales négresses rentrez chez vous vous sentez », et toutes sortes d’injures », se plaint Fatoumata, enceinte de cinq mois, qui campe place de l’Hotel de ville à Paris depuis trois semaines — A.L.

Depuis début août, quelques dizaines de familles campent près du parvis de l’Hôtel de ville à Paris : souvent des femmes avec des enfants très jeunes, venues notamment du Burkina Faso, de Côte d’Ivoire, du Sénégal ou du Mali.

« Nous sommes prêts à prendre notre part en mettant à disposition des lieux qui nous appartiennent. Il est temps maintenant que l’Etat fasse son travail, c’est sa compétence » a réclamé l’adjoint au logement, Ian Brossat.

Lundi, une cinquantaine de personnes ont été orientées pour une mise à l’abri, selon nos informations. Mais c’est loin de couvrir la totalité des personnes présentes.

Bambazenebou, 30 ans, est épuisée. Enceinte de neuf mois, la jeune femme au ventre bien arrondi campe sur la place de l’hôtel de ville à Paris depuis près de trois semaines, en plein cagnard, au milieu de dizaines de femmes et d’enfants, parfois âgés de quelques mois seulement. Il fait 28 degrés ce lundi et la voix de cette Ivoirienne, déboutée du droit d’asile et expulsée de son hébergement transitoire depuis mai, est si faible qu’elle en est presque inaudible.

« On est fatigués », dit cette mère qui doit aussi s’occuper d’un enfant de deux ans et demi, qu’elle n’arrive pas à inscrire à la crèche faute de logement. « Tout ce que je demande c’est une mise à l’abri » lâche Bambazenebou, qui participe à cette mobilisation spontanée de migrants et migrantes pour demander un logement pérenne.

« Le problème dépasse nos moyens »
Ce lundi matin, une cinquantaine de personnes ont été orientées pour une mise à l’abri, justement, direction Orléans dans un sas régional, selon nos informations, confirmées par la préfecture de région. Mais c’est loin de couvrir la totalité des personnes présentes. Sur les 200 personnes que comptait initialement le campement, il en reste ce lundi après-midi à vue d’œil une grosse centaine.

Une aberration pour Félix, qui s’occupe de la communication d’Utopia 56, association qui soutient ces personnes migrantes. « Lors des précédentes mobilisations, en mars et décembre, les personnes étaient hébergées sous 72 heures ». L’association aide les personnes migrantes à trouver des solutions d’urgence auprès d’hébergeurs et hébergeuses solidaires, ou dans des lieux qu’on lui prête, mais cette fois-ci, Félix se sent « démuni » : « Au mois d’août on n’a pas suffisamment de bénévoles pour accompagner les familles. On est au bout de nos limites pour combler le vide. Le problème dépasse nos moyens. »

Dispositifs saturés
C’est aussi l’avis de la Mairie de Paris, qui a demandé à l’Etat d’assumer ses responsabilités. « Nous ne cessons de réclamer à l’Etat une opération de mise à l’abri pour mettre fin à cette situation indigne », a souligné à l’AFP Ian Brossat, adjoint à la maire de Paris chargé du logement, de l’hébergement d’urgence et de la protection des réfugiés. « Nous sommes prêts à prendre notre part en mettant à disposition des lieux qui nous appartiennent. Il est temps maintenant que l’Etat fasse son travail, c’est sa compétence », a ajouté Ian Brossat.

Les dispositifs d’hébergement d’urgence de l’Etat, y compris pour des personnes en grande fragilité comme des femmes enceintes ou des enfants en très bas âge, sont complètement saturés. Fatoumata, 27 ans, enceinte de 5 mois et originaire de Côte d’Ivoire, nous montre le journal d’appel de son téléphone, avec les trois appels passés dans la matinée au 115, comme chaque jour. Elle n’en peut plus de ces conditions de vie, de dormir à même le sol sur des cartons, sans tente, sans sac de couchage.

« Des familles nous ont donné des tapis de sol, des packs d’eau, du lait, des couches, de la nourriture. Mais on a froid la nuit », dit-elle en montrant un petit garçon au nez qui coule. « On a été agressées par des passants, les policiers ne surveillent plus. On a eu des insultes racistes comme « sales négresses rentrez chez vous vous sentez », et toutes sortes d’injures. Des passants nous filment sans nous demander », se plaint-elle.

« Au milieu du gué »
Avec les riverains, la situation est parfois tendue. Une patrouille de la police municipale passe peu après notre entretien avec Fatoumata, nous expliquant agir pour que les enfants arrêtent de bloquer les ascenseurs du parking situé sous la place, ou pour libérer les accès à la station de métro, certains passants se sentant en insécurité. Une bagarre a explosé ce matin, à cause de nouveaux venus qui espèrent décrocher une mise à l’abri sans avoir campé ici pendant des semaines, selon une employée qui observe la situation depuis des semaines.

« Je vois des gens qui n’en peuvent plus d’avoir ça sous leurs fenêtres », commente Aurélien Véron, conseiller municipal et porte-parole du groupe Changer Paris. Pour autant l’élu de droite ne souhaite pas renvoyer ces personnes chez elles, préférant « une intégration active et rapide à l’allemande avec une stratégie pour obtenir l’autonomie financière ». Et de conclure : « Aujourd’hui, on est au milieu du gué, on laisse les portes ouvertes mais sans stratégie derrière. Il faut trancher : soit vraiment les renvoyer, soit les intégrer. Mais j’ai du mal à imaginer que ces femmes ne soient pas suffisamment dynamiques pour être capables d’avoir un boulot d’ici un an. »

Du côté de la préfecture de région, on se veut ce lundi soir plutôt rassurant : « Nous souhaitons régler la situation d’ici la fin de la semaine, avec toutes les personnes prises en charge. »

20minutes

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