Ce vendredi 25 août 2023, le Digital Services Act (DSA) entre en vigueur au sein de l’Union européenne. Mais que vont changer concrètement ces nouvelles règles qui s’attaquent aux pratiques des géants du web ?
La fin du « Far West » pour les géants du web ? Ce vendredi 25 août 2023, le Digital Services Act (DSA), l’ambitieux règlement sur les services numériques, entre en vigueur dans l’Union européenne. Il vise à mettre en place « des règles harmonisées pour un environnement en ligne sûr, prévisible et fiable » et concerne l’intégralité des contenus présents sur Internet.
Lutte contre la désinformation en ligne et la diffusion de contenus illégaux et le harcèlement en ligne, protection des utilisateurs, et notamment des mineurs… « Ce qui est interdit dans la vie courante le sera désormais également en ligne », résumait le commissaire européen Thierry Breton, en charge du dossier, sur son compte X (ex-Twitter) en janvier 2022.
Avec le DSA, l’Union européenne s’impose face aux géants du numérique et met en place un règlement strict aussi révolutionnaire, si ce n’est plus, que celui sur la protection des données (RGPD). Depuis 2016, le RGPD, protège la vie privée des internautes de l’usage abusif de leurs informations en ligne au sein de l’Union européenne. Ce règlement avait été mis en place au lendemain des révélations d’Edward Snowden. Cette fois-ci, le DSA ne concerne pas les données mais s’attaque directement à un grand nombre de pratiques en ligne. Voici ce qui change concrètement pour les utilisateurs et les plateformes.
Amélioration du signalement en ligne
Avec l’entrée en vigueur du DSA, le signalement de contenus problématiques (désinformation, harcèlement, racisme, appels à la haine, contenus pornographiques illicites…) sur les plateformes sera facilité. Le règlement devrait permettre aux utilisateurs de signaler ces contenus depuis un « canal prioritaire » directement sur la plateforme. Les contenus signalés devront être traités rapidement, en étant soit supprimer soit bloquer. Les internautes seront également en mesure de suivre l’avancement de leur signalement.
Le DSA organise aussi la création de « signaleurs de confiance », comme Pharos en France, des modérateurs qui auront la responsabilité de surveiller les contenus présents sur les plateformes et de signaler ceux qu’ils jugent illicites et dont la surpression est urgente. Leurs signalements seront ainsi prioritaires afin de supprimer au plus vite les contenus problématiques.
Plus de transparence pour les bannissements
Après avoir été bannis d’une plateforme, pour avoir partagé du contenu illicite par exemple, les utilisateurs concernés seront informés des raisons motivant cette décision. Les plateformes seront ainsi obligées de donner plus de détails sur le bannissement.
Autre mesure qui change en profondeur les pratiques des géants du web : l’affichage chronologique sera désormais obligatoire. Au cœur du modèle des réseaux sociaux, l’algorithme devra être plus transparent et ne pourra plus proposer des contenus en fonction des activités des internautes. Les utilisateurs pourront désormais choisir comment les publications des réseaux sociaux leur sont proposées. Ils seront libres de décider s’ils souhaitent voir les contenus par ordre chronologique ou selon les recommandations de l’algorithme.
Les plateformes devront aussi préciser pourquoi leur algorithme décide de montrer certaines publications, et il ne sera plus autorisé à cibler des utilisateurs sans leur expliquer les raisons. Enfin, les géants du web seront obligés de fournir leurs algorithmes à la Commission européenne et d’effectuer des contrôles annuels sur leur fonctionnement.
Régulation de la publicité ciblée
La publicité ciblée est dans le viseur du DSA. Cette pratique sera désormais interdite lorsqu’il s’agit d’utilisateurs de moins de 18 ans, mais également lorsqu’elle se base sur des critères liés à des opinions politiques, une appartenance ethnique ou encore une orientation sexuelle. Ainsi, Meta (Facebook) a annoncé dès le 1er août que la plateforme allait demander aux utilisateurs venant de pays de l’Union européenne de donner leur consentement avant de partager leurs données à des fins publicitaires.
L’Union européenne impose aux géants du web de livrer les secrets de leurs algorithmes. Concrètement, les plateformes devront par exemple indiquer aux utilisateurs les raisons pour lesquelles une publicité leur est proposée. Pour renforcer la transparence, des bibliothèques publicitaires, sur le modèle de celle lancée par TikTok en 2021, seront accessibles aux utilisateurs. Les critères de ciblage, l’audience et la durée de diffusion des contenus publicitaires seront visibles par les utilisateurs.
Vendeurs en ligne : renforcement de la fiabilité
Les vendeurs en ligne sont également concernés par le DSA. Ainsi, les personnes souhaitant vendre des produits en ligne devront donner davantage d’informations attestant de leur fiabilité, comme une adresse mail et un numéro de téléphone. Les hébergeurs, comme Amazon, devront améliorer la traçabilité des vendeurs présents sur leur plateforme et autoriser leur présence sur la plateforme uniquement après s’être assurés de leur traçabilité.
Les plateformes concernées dès ce vendredi
À partir de ce vendredi 25 août, les plateformes suivantes, qui réunissent plus de 45 millions d’utilisateurs mensuels en Europe (soit 10 % de la population), sont immédiatement soumises au DSA : Alibaba AliExpress, Amazon Store, Apple AppStore, Bing, Booking.com, Facebook, Google Play, Google Maps, Google Search, Google Shopping, Instagram, LinkedIn, Pinterest, Snapchat, TikTok, Wikipédia, X (ex-Twitter), YouTube et Zalando.
Today might be D-Day for the Digital Services Act!
Together with the European Parliament & Council, the Commission has worked in record time to protect 🇪🇺 citizens online.
Here are the 10 things you need to know about the #DSA ahead of our (hopefully) final trilogue.
🧵⤵️ pic.twitter.com/emiTEbgIsJ
— Thierry Breton (@ThierryBreton) April 22, 2022
Le DSA s’applique pour le moment aux plus grandes plateformes, mais l’objectif du règlement est de viser l’intégralité des plateformes en ligne, ainsi que les services de cloud et les fournisseurs d’accès internet, à partir du 17 février 2024. Les règles du DSA s’appliqueront uniquement pour les utilisateurs des 27 pays membres de l’UE.
Pour le non-respect des règles du DSA, les plateformes s’exposent à de très lourdes sanctions, qui pourraient atteindre jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial annuel. Le commissaire européen Thierry Breton a annoncé qu’en dernier recours, en cas de graves violations répétées, une plateforme pourrait être exclue du marché européen.
voa