Le nouveau président de transition au Gabon, le général Brice Oligui Nguema, a prêté serment lundi. Le nouvel homme fort du pays a promis de « préserver les acquis de la démocratie » ainsi que « des élections libres et transparentes » après la transition. Il s’est aussi engagé à amnistier les « prisonniers d’opinion ».
Cinq jours après avoir renversé Ali Bongo au Gabon, le général Brice Oligui Nguema a prêté serment, lundi 4 septembre, en tant que président d’une période de transition au terme de laquelle il a promis des élections sans en préciser la date.
« Je jure devant Dieu et le peuple gabonais de préserver en toute fidélité le régime républicain », « de préserver les acquis de la démocratie », a entre autre déclaré, devant des juges de la Cour constitutionnelle, le général de brigade en costume d’apparat rouge de la Garde républicaine (GR), l’unité d’élite de l’armée qu’il commandait.
Le général Brice Oligui Nguema a promis de « rendre le pouvoir aux civils » par des « élections libres, transparentes et crédibles », sans en préciser la date. Il a sollicité la participation de toutes les « forces vives de la Nation » pour élaborer une « nouvelle constitution », « qui sera adoptée par référendum », « pour des « institutions plus respectueuses des droits humains et de la démocratie ».
Au terme de ce processus, « nous entendons remettre le pouvoir aux civils en organisant des élections libres, transparentes et crédibles », a-t-il annoncé dans un discours.
Le nouvel homme fort du Gabon s’est aussi engagé à « amnistier les prisonniers d’opinion ». « J’instruis le futur gouvernement » qui sera nommé « à réfléchir sur les mécanismes visant à amnistier les prisonniers d’opinion » et « faciliter le retour de tous les exilés », a-t-il déclaré.
Depuis le putsch de mercredi, il s’affiche chaque jour entouré des généraux et colonels commandant les corps de l’armée, de la gendarmerie et de la police. En dehors d’une frange de l’ancienne opposition, qui l’exhorte à lui remettre le pouvoir, la population semble majoritairement afficher, dans de petites manifestations quotidiennes, sa gratitude envers une armée qui l’a « libérée du clan Bongo ».
La famille Bongo dirigeait sans partage depuis plus de 55 ans ce petit État d’Afrique centrale, parmi les plus riches du continent grâce à son pétrole mais dont la richesse était accaparée par une élite dans et autour de cette famille que l’opposition, et les putschistes depuis mercredi, accusent de « corruption » « massive » et de « mauvaise gouvernance ».
Ali Bongo Ondimba, 64 ans, en résidence surveillée depuis le putsch, avait été élu en 2009 à la mort de son père Omar Bongo Ondimba, qui avait déjà dirigé le pays plus de 41 ans. Le « patriarche » était aussi l’un des piliers de la « Françafrique », système de cooptation politique, chasses gardées commerciales et corruption entre la France et certaines de ses ex-colonies du continent.
« Un coup d’État institutionnel »
Mercredi à l’aube, moins d’une heure après la proclamation des résultats de la présidentielle du 26 août, et la réélection annoncée à près de 65 % d’Ali Bongo, des militaires ont proclamé « la fin du régime », l’accusant d’avoir truqué le scrutin.
Un putsch « sans effusion de sang », assure le général Oligui. Aucun mort ni blessé n’a été rapporté à ce jour.
Dès le lendemain, les militaires ont proclamé chef d’un Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) Brice Oligui Nguema, général de 48 ans pourtant jusqu’alors à la tête de la redoutable Garde républicaine (GR), garde prétorienne des Bongo père et fils depuis des décennies.
L’Union africaine, l’Union européenne, l’ONU et une grande partie des capitales occidentales ont condamné le coup d’État mais en insistant généralement sur une « différence » avec les putschs dans d’autres pays du continent (huit en trois ans) parce qu’il a été précédé, selon elles, d’une élection manifestement frauduleuse. « Un coup d’État institutionnel », a même souligné le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.
Promesse d' »élections libres »
Depuis, le général Oligui a enchaîné, à un rythme effréné, des heures de discussions très médiatisées avec l’ensemble des « forces vives de la Nation » : les clergés, les chefs d’entreprise, les syndicats, la société civile, nombre de partis politiques et anciens ministres, les ONG, les diplomates, les bailleurs de fonds, les journalistes… Il a consciencieusement pris des notes et répondu longuement aux interrogations et doléances.
Le nouvel homme fort de Libreville martèle qu’il a fait de la lutte contre la corruption et la mauvaise gouvernance son principal cheval de bataille avec le « redressement de l’économie » et la redistribution des revenus et richesses du pays aux populations.
La junte n’avait pas encore levé dimanche le couvre-feu décrété par l’ancien pouvoir au soir de la présidentielle. Pourtant, la vie a repris son cours dès le lendemain du putsch.
AFP