Opposition muselée, voix critiques du conflit ukrainien réprimées sans ménagement : la Russie a voté dimanche lors d’élections régionales sans suspense, avec l’offensive en Ukraine en toile de fond.
La Commission électorale centrale de Russie a affirmé dimanche soir que le parti Russie unie du président Vladimir Poutine arrivait en tête de ces élections régionales dans les quatre territoires annexés par Moscou en Ukraine.
La présidente de la Commission électorale, Ella Pamfilova, s’est félicitée d’élections se déroulant «de manière dynamique, avec peu de violations».
Avec ces élections réparties sur trois jours, de vendredi à dimanche, Moscou tente de légitimer ses annexions en Ukraine en faisant voter les territoires occupés dans l’est et le sud.
Malgré de vives condamnations des Occidentaux, la Russie a proclamé en septembre 2022 l’annexion de quatre territoires ukrainiens qu’elle ne contrôle que partiellement – Zaporijjia, Kherson, Donetsk et Lougansk -, à l’issue des «référendums» non reconnus par la communauté internationale. Kyïv et ses alliés ont d’ores et déjà dénoncé des scrutins «illégaux».
Les combats y font toujours rage et l’armée ukrainienne a lancé une contre-offensive.
Depuis plus d’un an et demi, des milliers de Russes ont eux été condamnés, parfois à de lourdes peines, pour avoir protesté contre l’offensive en Ukraine.
Aucune réelle opposition «hors-système» n’est représentée : les opposants sont soit en prison, soit en exil.
L’issue de ces élections organisées pour désigner des gouverneurs, des députés régionaux et des élus municipaux ne devrait ainsi pas entraîner de surprises.
Mais celles-ci interviennent cette fois à quelques mois de l’élection présidentielle prévue début 2024, qui pourrait conforter Vladimir Poutine au pouvoir jusqu’en 2030.
Dans les quatre régions ukrainiennes annexées, les autorités d’occupation se sont pliées en quatre pour présenter un semblant de normalité, malgré les combats en cours.
Dans la région de Donetsk, des électeurs ont ainsi déposé des bulletins de vote ornés de l’aigle russe bicéphale, tandis que dans celle de Kherson, le gouverneur Vladimir Saldo a décrété vendredi chômé pour que chaque citoyen puisse «exprimer sa position».
Dans plusieurs régions russes, où l’afflux d’électeurs est traditionnellement le plus important dimanche, le scrutin est également teinté par le conflit.
À Rostov-sur-le-Don, grande cité du sud-ouest de la Russie située non loin de l’Ukraine et touchée cette semaine par une attaque de drones, deux électeurs interrogés dimanche par l’AFP près d’un bureau de vote citaient spontanément ce conflit armé comme leur principale préoccupation.
«Nous voulons avant tout vivre en paix, nous et nos enfants», a déclaré Nina Antonova, spécialiste de protection au travail, 40 ans.
«Tout le monde n’est préoccupé que par un seul problème : la guerre. Nous n’avons pas d’autres problèmes», assure de son côté Anatoli, un retraité de 84 ans.
À Moscou, la campagne électorale se ressentait à peine, les affiches des candidats, parmi lesquels le maire sortant Sergueï Sobianine, un fidèle de Vladimir Poutine en poste depuis 2010, étant rares dans les rues.
M. Sobianine a en revanche été omniprésent à la télévision ces derniers jours en donnant le coup d’envoi à de nouvelles lignes de train régionales et à une autoroute payante ou en inaugurant des hôpitaux rénovés.
Des Moscovites rencontrés par l’AFP ont dit apprécier le virage moderne pris par la capitale russe sous l’impulsion de M. Sobianine.
«Moscou fleurit sous nos yeux!», s’exclame Roukhine Aliev, étudiant de 21 ans.
«Nous sommes uniquement pour lui!» embraye Olga, une retraitée de 67 ans.
Plusieurs centaines de kilomètres au sud-ouest de Moscou, dans les régions frontalières de l’Ukraine, régulièrement cibles d’attaques de Kyïv, les conditions de sécurité pour l’organisation du scrutin sont précaires.
La présidente de la Commission électorale, Ella Pamfilova, a déjà annoncé que le vote dans la ville de Chebekino, dans la région de Belgorod, a été «reporté en raison d’un niveau d’alerte élevé».
Seul fait politique marquant : dans le sud de la Sibérie, le candidat du Parti communiste, Valentin Konovalov, 35 ans, tente d’être réélu dans la région montagneuse et peu peuplée de Khakhassie. Il devance de loin ses adversaires, selon l’agence officielle TASS.
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