La France n’a pas respecté ses objectifs en matière d’émissions nettes de gaz à effet de serre l’an dernier, en raison notamment des forêts et des sols qui ont absorbé moins de CO2 qu’espéré. Les émissions des transports continuent aussi de croître.
La France n’a pas respecté sa Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) en 2022. Les émissions nettes de gaz à effet de serre sont 5,4 % au-dessus de l’objectif, selon une analyse de l’Observatoire climat-énergie, développé par le Réseau action climat (RAC) avec plusieurs partenaires comme l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), publiée ce jeudi 14 septembre.
«Le principal écart vient de la moindre absorption des émissions par les forêts et les sols», explique l’observatoire. La forêt et les sols, deux puits de carbone naturels, n’ont séquestré que 16,9 millions de tonnes équivalent CO2 (MtCO2e) là où l’Etat misait sur 41 MtCO2e. «La baisse des puits carbone ces dernières années, particulièrement dans les forêts, est liée aux sécheresses (renforcées par le changement climatique) aux incendies et aux maladies», souligne l’observatoire qui note au passage que les données de ce secteur sont difficiles à évaluer.
C’est un «sujet très inquiétant», avance Anne Bringault, directrice des programmes du RAC, lors d’une conférence de presse. «La précédente SNBC misait sur une hausse des puits de carbone alors qu’on aurait pu se douter que le changement climatique allait engendrer davantage de sécheresses et d’incendies», regrette-t-elle. Ce problème, déjà bien identifié, était encore souligné en juin par le Haut conseil pour le climat (HCC).
Dans son rapport annuel, ce dernier formulait plusieurs propositions, comme de «recalibrer» les cibles d’absorption ou de renforcer «l’adaptation des forêts métropolitaines au changement climatique». Anne Bringault suggère également de «replanter en intégrant les impacts du changement climatique», avec des espèces plus résistantes. Le RAC encourage aussi une transition vers des modes d’élevage plus durables pour protéger les haies et les prairies.
«Dans le cadre du projet de SNBC qui sera mis en consultation dans les prochaines semaines, nous doterons la France d’objectifs mis à jour, accompagnés de mesures concrètes pour les atteindre», a assuré de son côté le ministère de la Transition énergétique, rappelant notamment l’objectif porté par le président Emmanuel Macron de planter 1 milliard d’arbres sur les 10 prochaines années.
Côté recherche, un projet de 10 millions d’euros est lancé entre six établissements internationaux dont le laboratoire des sciences du climat et de l’environnement situé à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Il s’attachera à comprendre comme le réchauffement climatique atténue l’action des puits de carbone naturels (forêts, océans).
Des émissions brutes en baisse mais…
Dans le domaine des émissions brutes de gaz à effet de serre, l’Observatoire climat-énergie note que la France est dans la ligne de son objectif, avec 403,8 MtCO2e émis l’an dernier. Un bon résultat largement porté par un hiver clément et une envolée des prix de l’énergie qui a poussé industriels et particuliers à une sobriété inhabituelle. Les baisses d’émission dans le bâtiment (-14,7 %) ont ainsi plus que compensé la dérive continue du secteur des transports (+3,6 %).
«Notre objectif est d’accélérer encore la réduction de nos émissions brutes de gaz à effet de serre. En effet, si nous avons doublé le rythme de baisse au cours du premier quinquennat, il nous faut aller plus loin : c’est l’objectif de la planification écologique pilotée par la Première ministre», affiche le gouvernement.
Il va falloir faire encore beaucoup plus. L’exécutif doit donner sa nouvelle feuille de route avec sa planification écologique mais le Réseau action climat s’inquiète cependant qu’aucune date ne soit encore fixée pour le Conseil de planification écologique (CPE) que doit présider le chef de l’Etat. «Il y a comme un refus d’obstacle d’Emmanuel Macron» et «on espère un message fort de sa part pour contredire nos inquiétudes», plaide Anne Bringault.
AFP