La Commission européenne a proposé mercredi aux Etats membres de renouveler pour dix ans l’autorisation du glyphosate dans l’UE, sous conditions, après le rapport d’un régulateur estimant que le niveau de risque ne justifiait pas d’interdire cet herbicide controversé.
La proposition de l’exécutif européen, disponible en ligne, sera examinée vendredi par les représentants des Vingt-Sept, qui devront ensuite la valider à une majorité qualifiée d’Etats membres lors d’une réunion le 13 octobre.
L’autorisation actuelle du glyphosate dans l’UE, renouvelée en 2017 pour cinq ans, expirait le 15 décembre 2022, mais a été prolongée d’un an dans l’attente d’une évaluation scientifique sur l’herbicide.
Début juillet, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait finalement publié son rapport, indiquant ne pas avoir identifié de « domaine de préoccupation critique » chez les humains, les animaux et l’environnement susceptible d’empêcher son autorisation.
La proposition de la Commission autorise l’usage du glyphosate jusqu’au 15 décembre 2033, soit pour une durée deux fois plus longue que la précédente autorisation, mais en-deçà de la période de 15 ans initialement prévue.
Pour autant, les conditions d’utilisation de l’herbicide devront être assorties de « mesures d’atténuation des risques » concernant les alentours des zones pulvérisées, notamment par la mise en place de « bandes tampons » de 5 à 10 mètres et l’usage d’équipements permettant de réduire drastiquement les « dérives de pulvérisation ».
De même, Bruxelles fixe des niveaux-limites pour certaines « impuretés » issues du glyphosate.
L’EFSA avait par ailleurs relevé « un risque élevé à long terme chez les mammifères » pour la moitié des usages proposés du glyphosate et reconnu que le manque de données empêchait toute analyse définitive.
Pour en tenir compte, la Commission enjoint les Etats, chargées de délivrer les autorisations au niveau national et de fixer les conditions d’utilisation selon les spécificités locales, à « apporter une attention particulière » aux effets sur l’environnement.
Ils seront ainsi tenus d’examiner les « co-formulants » (autres composants présents dans les herbicides autorisés) et d’évaluer l’exposition des consommateurs aux « résidus pouvant être présents dans les cultures successives cultivées en rotation ».
De même, les Etats sont appelés à prêter attention à l’impact sur les petits mammifères, en envisageant « si nécessaire » des mesures d’atténuation ou des restrictions. S’ils identifient des effets indirects potentiels sur la biodiversité, ils devront examiner si d’autres méthodes de protection des cultures sont possibles, et pourront là aussi adopter des restrictions.
Enfin, ils devront veiller à la protection des eaux souterraines susceptibles d’être exposées via l’infiltration comme aux eaux de surface, notamment celles utilisées pour le captage d’eau potable.
En revanche, l’usage pour la dessiccation (épandage de glyphosate pour sécher une culture avant la récolte) est désormais interdit.
Le glyphosate, la substance active de plusieurs herbicides — dont le célèbre Roundup de Monsanto, très largement utilisé dans le monde — avait été classé en 2015 comme un « cancérogène probable » pour les humains par le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé.
A l’inverse, l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a jugé l’an dernier que les preuves scientifiques disponibles ne permettaient pas de classer le glyphosate comme cancérogène.
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