Cancer du poumon : un vaccin français permet de gagner plusieurs mois de survie

Avec 44% de survie un an après le début du traitement, ce vaccin contre le cancer du poumon – qui n’est pas encore commercialisé – montre des résultats encourageants. Il faut toutefois remplir plusieurs conditions pour espérer en profiter s’il est un jour mis sur le marché.

Avec 52.777 nouveaux cas en 2023, le cancer du poumon est le 3e cancer le plus fréquent et la 1re cause de décès par cancer en France. Les statistiques de survie sont très mauvaises, environ 20% des personnes diagnostiquées survivant à l’horizon de 5 ans. Avec un diagnostic souvent tardif, la marge de manœuvre reste faible face à la maladie.

Un vaccin baptisé Tedopi
En parallèle des thérapies classiques comme la chimiothérapie, l’immunothérapie et la radiothérapie, une équipe française espère mettre au point un vaccin contre ce type de cancer. L’idée n’est pas de se vacciner pour éviter la survenue d’une tumeur dans les poumons. Au contraire, ce vaccin est destiné à compléter les traitements déjà existants. Il permettrait de réduire de 41 % le taux de décès dans l’année, selon une étude de phase III publiée dans Annals of Oncology. Des résultats encourageants qui n’ont toutefois rien d’un « traitement miracle ».

Baptisé Tedopi, ce vaccin contre le cancer fonctionne de la même façon qu’un vaccin classique. L’injection apporte à l’organisme des antigènes semblables à ceux que portent les cellules des tumeurs. Le système immunitaire apprend ainsi à se défendre contre les cellules tumorales et sait les reconnaître. Lorsque les lymphocytes T rencontrent ensuite des cellules du cancer du poumon, ils les identifient et les éliminent.

Trois mois de survie en plus
Dans cette étude, 119 malades ont reçu en tout six injections espacées de trois semaines, puis toutes les huit semaines pendant un an, puis toutes les douze semaines. Le groupe ayant reçu le vaccin bénéficiait d’une médiane de survie de 11,1 mois, contre 7,5 mois pour le groupe de contrôle qui ne suivait pas ce traitement. « Trois mois de plus, ça peut ne pas sembler grand-chose », explique le Pr Benjamin Besse, oncologue à l’Institut Gustave Roussy et pilote de l’étude.

« Mais le cancer du poumon souffre d’un très mauvais taux de survie. Ces trois mois, ce n’est pas rien pour les malades. » Surtout, ces résultats signifient que 44% des patients étaient encore vie un an après avoir démarré le traitement vaccinal, contre 27,5% pour le groupe sous chimiothérapie.

Contrairement aux vaccins contre le Covid-19, il ne s’agit cette fois pas d’un vaccin à ARN mais d’un vaccin protéique plus « classique. » Il comprend 9 antigènes de 2 protéines, toutes à la surface ou intracellulaires du cancer du poumon non à petites cellules, le cancer du poumon le plus répandu (85 à 90% de l’ensemble des cancers du poumon). Le cancer du poumon non à petites cellules (CPNPC) se différencie en effet du cancer du poumon à petites cellules (CPPC) par la façon dont les cellules tumorales apparaissent au microscope.

« Avec cette formule, au moins une des cinq protéines pourra agir sur chaque malade atteint d’un cancer du poumon non à petites cellules », précise le Pr Besse.

Plusieurs conditions d’accès
L’effervescence suscitée autour de la publication de ces résultats ne doit pas faire oublier que ce vaccin ne concerne pas tous les patients atteints d’un cancer du poumon. Il n’est pour le moment que destiné aux personnes avec des métastases, soit environ la moitié des malades.

Il s’agit d’un traitement dit de « troisième ligne », qui intervient après la chimiothérapie et l’immunothérapie. Or il faut que le patient ait répondu à l’immunothérapie, soit encore environ la moitié des malades. Par ailleurs, le vaccin n’est destiné qu’aux personnes porteuses du gène HLA-A2. Le gène HLA joue un rôle important pour notre système immunitaire et il existe de multiples versions mais il est impossible de couvrir tous les sous-groupes de HLA dans une seule injection.

« 45% de la population européenne est porteuse la version HLA-A2 du gène. C’est presque la moitié de la population. Il a fallu faire un choix qui nous permettait de viser le plus de monde possible », explique Valérie Gabarre, directrice médico-marketing chez OSE Immunotherapeutics, la biotech nantaise à l’origine de ce vaccin.

Malgré les résultats encourageants de cette étude de phase III, le chemin reste long avant d’obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM). Une première demande à l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a été refusée début 2023. « L’étude a été tronquée à cause du Covid-19 », explique le Pr Besse. « L’inclusion ayant été stoppée aux 2/3 environ, l’ANSM a estimé que les données ne suffisaient pas à autoriser le vaccin. »

Un nouvel essai de phase 3 devrait donc démarrer en début d’année prochaine sur plus de trois cents personnes. La mise sur le marché ne devrait pas intervenir avant 2027.

sciencesetavenir

You may like