Le président azerbaïdjanais Ilham Aliev a pris la parole, ce mercredi 20 septembre, pour proclamer la victoire des troupes de Bakou dans leur offensive éclair au Haut-Karabakh contre les séparatistes arméniens. Alors que les bélligérants ont rendez-vous ce jeudi pour le début de nouveaux pourparlers, Erevena a accusé en soirée l’armée azerbaïdjanaise d’avoir ouvert le feu à l’arme légère sur ses positions à la frontière entre les deux pays.
Ils « ont commencé » à rendre les armes, a déclaré ce mercredi le président d’Azerbaïdjan, Ilham Aliev, lors d’une déclaration retransmise à la télévision. Il parlait des séparatistes des communautés arméniennes du Haut-Karabakh, assurant que ces derniers quittent désormais leurs positions militaires sur le terrain.
M. Aliev a précisé que l’Azerbaïdjan avait détruit « la plupart » des forces et équipements des séparatistes, concluant que son pays avait « rétabli sa souveraineté grâce à des mesures anti-terroristes réussies ».
Le processus de retrait des unités arméniennes illégales de leurs positions a commencé. Elles ont accepté nos conditions et ont commencé à rendre leurs armes.
« Nous avons des martyrs », déclare le président Ilham Aliev
Le cessez-le-feu annoncé en amont ce jour entre l’Azerbaïdjan et les séparatistes arméniens est pour l’instant respecté, ont de leur côté déclaré les forces de maintien de la paix russes déployées dans cette région de toutes les discordes. « Aucune violation du cessez-le-feu n’a été enregistrée », disent-elles.
Selon ce contingent russe, au sein de la population civile, quelque 3 154 personnes, dont 1 428 enfants, ont été évacuées par ses soins. Un nombre inconnu de civils a par ailleurs été escorté par les séparatistes arméniens.
Autre donnée : au moins 200 personnes auraient été tuées, et 400 autres blessées, dans l’opération, selon un nouveau bilan communiqué par les séparatistes arméniens délivré sur les réseaux sociaux. À noter que deux soldats russes ont perdu la vie, leur voiture ayant été visée par des tirs, selon le ministère russe de la Défense.
Ilham Aliev a reconnu que les combats avaient provoqué des morts et des blessés azerbaïdjanais aussi. « Nous avons des martyrs », a-t-il dit. « Nous avons des officiers et des soldats blessés », ajoute-t-il, sans quantifier.
Nouveaux troubles à Erevan autour des mécontents de Pachinian
La Russie insiste : cette crise est à ses yeux une « affaire intérieure » azerbaïdjaniase. Cela « ne fait aucun doute », a déclaré le porte-parole du Kremlin, relayé par l’agence Interfax. « L’Azerbaïdjan agit sur son propre territoire, ce qui est reconnu par les dirigeants arméniens », a précisé Dmitri Peskov, de même source.
De son côté, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian assure, par l’intermédiaire de son porte-parole sur le réseau social Facebook, avoir évoqué ce mercredi la situation au téléphone avec Vladimir Poutine.
Au cours de cette conversation, le président de la Fédération russe a promis que les pourparlers de paix entre l’Azerbaïdjan et les séparatistes, prévus jeudi, se dérouleraient avec la « médiation de la direction du contingent russe de maintien de la paix ». C’est ce qui ressort d’un communiqué du Kremlin après cet appel téléphonique.
Des milliers de personnes ont manifesté dans l’après-midi, à nouveau, devant le siège du gouvernement arménien à Erevan, où le Premier ministre est pris pour cible en raison du fait qu’il n’a pas envoyé d’aide aux séparatistes du Haut-Karabakh ces dernières 24 heures. Certains demandent son départ.
Des participants ont lancé bouteilles et pierres en direction de la police, qui a procédé à des arrestations, utilisé des grenades assourdissantes et prévenu qu’elles prendraient si besoin des « mesures spéciales ».
À Bakou, on fête une victoire qui sert le chef de l’État en place
Dans sa prise de parole, ce mercredi, le président azerbaïdjanais a confié qu’il avait été agréablement surpris par la retenue de l’Arménie ces dernières heures. « Hier et aujourd’hui, l’Arménie, de manière surprenante, a fait preuve de compétence politique, ce que nous apprécions », a-t-il lancé à l’adresse de ses compatriotes.
Pour lui, l’attitude du gouvernement de M. Pachinian aura « un impact positif sur le processus de paix ». Le président azerbaïdjanais estime « ne pas avoir de problème avec le peuple arménien ». Il ajoute que son pays « reconnaît l’intégrité territoriale de l’Arménie ». « Nous ne convoitons pas ses terres », dit-il encore.
Hikmet Hajiev, l’un des conseillers du président Aliev, a assuré que soin pays avait « pour objectif la réintégration pacifique des Arméniens du Karabakh » et une « normalisation » des relations avec Erevan. Il a promis « un passage en toute sécurité » aux forces séparatistes arméniennes, sous supervision russe.
Pour autant, la nouvelle donne fait craindre un départ en masse, pour les 120 000 habitants du Haut-Karabakh. Plus de 10 000 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, auraient été évacuées de leur habitat vers d’autres zones de la région, selon un responsable du camp séparatiste.
Ce dernier, Ghegham Stepanian, médiateur des droits pour le Karabakh, précise que ces gens n’ont « pas de nourriture adéquate, de médicaments ou de produits d’hygiène de base ». Il parle d’une « catastrophe », alors que M. Aliev garantit de « respecter tous les droits » des communautés arméniennes du Karabakh.
Pourparlers ce jeudi et dénonciations de tirs à la frontière en soirée
M. Aliev sort renforcé de cette opération éclair. Il est sur le point de reprendre la main sur une région qui fut le théâtre de deux guerres entre ces anciennes républiques soviétiques du Caucase que sont l’Azerbaïdjan et l’Arménie. La première entre 1988 et 1994 (30 000 morts), l’autre à l’automne 2020 (6 500 morts).
À Bakou, la population est descendue dans la rue pour célébrer ce succès, obtenu en utilisant la manne pétrolière pour renforcer l’armée. Les séparatistes ont été acculés par la puissance de feu des unités d’en face.
Les deux camps doivent se retrouver ce jeudi dans la ville azerbaïdjanaise de Yevlakh, en vue de participer à leurs premiers pourparlers sur « la réintégration » du Haut-Karabakh au sein de l’Azerbaïdjan.
Rien n’est gagné pour ces pourparlers. En soirée ce mercredi, Erevan a en effet accusé l’armée azerbaïdjanaise d’avoir ouvert le feu sur ses positions à la frontière. Des unités « ont tiré à l’arme légère sur les avant-postes de combat arméniens près de Sotk », a indiqué le ministère arménien de la Défense dans un communiqué.
Ce mercredi, le président français Emmanuel Macron demande à son homologue azerbaïdjanais « de donner des garanties sur les droits et la sécurité des habitants du Karabakh ». Lors d’un entretien téléphonique, il a « condamné le choix fait par l’Azerbaïdjan » de recourir à la force au risque d’aggraver la crise humanitaire.
agences