Le gouvernement français va rendre obligatoire la distribution à l’unité de certains antibiotiques en rupture de stock. L’exécutif veut ainsi éviter qu’après un traitement, des boîtes à moitié consommées ne traînent dans les placards alors qu’on en manque. La France n’est pas le seul pays confronté à des pénuries. Depuis une dizaine d’années, les alertes se multiplient en Europe et aux États-Unis.
La législation pharmaceutique européenne a plus de 20 ans
Le Bureau européen des consommateurs a publié en 2022 une étude menée auprès d’associations d’une demi-douzaine de pays du continent. La France a vu les alertes pénurie multipliées par 20, l’Espagne par douze en l’espace d’une décennie seulement. Selon cette étude, suivant les pays entre un cinquième et la moitié des patients se sont retrouvés confrontés à une pénurie. Il s’agit de médicaments considérés comme essentiels ou d’intérêt thérapeutique majeur.
Les causes sont soit des problèmes de logistique, de forte demande ou carrément de pénurie de substance active. La marge bénéficiaire, très faible pour les médicaments génériques, ne contribue pas non plus à soutenir l’offre des laboratoires européens. Aujourd’hui, il y a même des pénuries sur des médicaments aussi communs que le paracétamol.
La pandémie a mis en lumière l’obsolescence de la législation pharmaceutique européenne qui a plus de 20 ans. La Commission européenne a proposé une réforme en avril pour aider les laboratoires à financer la recherche. Elle proposait la mise sur le marché de génériques en réduisant de deux ans la propriété intellectuelle générale.
La Commission veut aussi donner plus de moyens à la recherche sur de nouveaux antibiotiques pour lutter contre ce qu’elle appelle la pandémie cachée : la résistance aux antibiotiques. Et puis, surtout, elle veut contraindre les entreprises pharmaceutiques à se prémunir contre des pénuries en établissant des plans de prévention et en constituant des stocks sur une liste de médicaments essentiels.
Aux États-Unis, 30% de pénurie en plus en deux ans
Aux États-Unis, les pénuries de médicaments peuvent durer un an et demi en moyenne, et certains produits pharmaceutiques essentiels sont même en pénurie depuis plus de 10 ans. C’est encore pire en 2023, d’après un rapport. Le nombre de médicaments touchés, 309, n’a jamais été aussi élevé depuis une décennie et c’est une augmentation de 30 % en deux ans.
Des pharmaciens hospitaliers ont déclaré avoir dû rationner, retarder ou annuler des traitements à cause des pénuries. Ce sont les patients atteints de cancer qui sont les plus touchés, mais les États-Unis manquent aussi d’antibiotiques, de médicaments pour les troubles cardiaques et de morphine.
Les marges trop faibles sur les génériques ont poussé les fabricants à se tourner vers une main-d’œuvre et des coûts de fabrication moins élevés à l’étranger, ce qui a créé une dépendance à l’égard de ces pays. Les politiques fédérales qui visent à contrôler les prix payés par les couvertures santé Medicare et Medicaid, affectent aussi considérablement la capacité de la chaîne d’approvisionnement à se remettre d’une pénurie.
Et comme si ça ne suffisait pas, une tornade a endommagé une très grosse usine de production et de stockage de Pfizer à Rocky Mount, en Caroline du Nord, au mois de juillet.
francetvinfo