Le 14 octobre 2023 aura lieu la prochaine éclipse solaire annulaire, où la Lune cachera partiellement le Soleil. Si l’éclipse ne sera pas visible en France, elle sera néanmoins aisément observable en Amérique du Nord, et la Nasa compte en profiter pour lancer sa mission Atmospheric Perturbations around the Eclipse Path (Apep).
À l’aide de trois sondes, cette dernière vise à étudier les effets de la chute brutale de la luminosité du Soleil lors d’une éclipse sur l’atmosphère, et plus particulièrement sur l’ionosphère, dont la dynamique est régie par les rayons ultraviolets provenant du Soleil.
C’est un évènement attendu pour les Américains amoureux du ciel : le 14 octobre prochain, la Terre, la Lune et le Soleil seront parfaitement alignés. Cet alignement éclipsera temporairement le Soleil qui se retrouvera caché derrière la Lune. On appelle ce phénomène une éclipse solaire annulaire, qui diffère d’une éclipse solaire totale.
Lors d’une éclipse solaire totale, la Lune cache entièrement le disque solaire, de sorte que ce dernier est remplacé par une silhouette lunaire très sombre, ne laissant apparaître que la couronne solaire.
Lors d’une éclipse solaire annulaire, en revanche, la taille apparente de la Lune dans le ciel est légèrement inférieure à celle du Soleil : les observateurs regardant le ciel voient alors apparaître lors du pic de l’éclipse un anneau très brillant autour du disque lunaire, qu’on appelle aussi « anneau de feu ».
L’éclipse solaire annulaire du 14 octobre ne sera visible que depuis le continent américain, où la luminosité apparente de notre Soleil baissera jusqu’à atteindre 10 % de sa luminosité habituelle.
Des effets sur l’ionosphère, une couche atmosphérique contrôlée par la lumière du Soleil
L’ionosphère d’une planète correspond à la partie de son atmosphère où les gaz sont ionisés, c’est-à-dire que les atomes et les molécules perdent ou gagnent un ou plusieurs électrons, devenant ainsi des particules chargées (des ions). Sur Terre, l’ionosphère occupe une grande partie de l’atmosphère, et se situe environ entre 60 et 1 000 kilomètres d’altitude.
Ce sont les rayonnements ultraviolets provenant du Soleil qui sont à l’origine de l’ionosphère : ces derniers réagissent avec les molécules atmosphériques, permettant parfois de les dissocier (par exemple, les rayonnements ultraviolets peuvent séparer une molécule de dioxygène en deux atomes d’oxygène), mais aussi de les ioniser.
Les rayonnements ultraviolets peuvent en effet arracher un électron à une molécule ou un atome, produisant une soupe composée d’ions (à laquelle il manque un électron) et d’électrons libres, en quantités égales. Grâce à ces processus, les gaz de l’ionosphère agissent comme un filtre absorbant, permettant de limiter la quantité de rayonnements ultraviolets atteignant la surface de la Terre.
Pendant la journée, les rayonnements solaires constants permettent à ces particules de rester séparées ; mais quand la nuit tombe, beaucoup se recombinent en molécules ou atomes neutres, avant de se détacher à nouveau au lever du jour.
Une dynamique encore mal comprise lors d’une éclipse solaire
Lors d’une éclipse solaire, la lumière du Soleil disparaît pour réapparaître presque immédiatement sur une petite partie de la surface de la Terre. En très peu de temps, la température et la densité de la ionosphère baissent pour remonter à nouveau, produisant des sortes d’ondes se déplaçant à travers la matière, à l’image d’un point d’eau dans lequel se déplacerait un bateau, créant des vagues (ou des ondes) dans son sillage.
Pour étudier ces phénomènes, la Nasa a prévu de lancer son programme Atmospheric Perturbations around the Eclipse Path (Apep), mené conjointement avec des chercheurs de l’Embry-Riddle Aeronautical University, en Floride. Petite anecdote, l’acronyme « Apep » fait référence au dieu égyptien Apophis (Apep en égyptien), une divinité représentée comme un serpent qui, selon la mythologie, aurait poursuivi le dieu solaire Râ au point de presque totalement le faire disparaître, produisant une éclipse solaire.
L’Agence spatiale américaine prévoit donc de lancer trois sondes dans l’ionosphère, la première 35 minutes avant le pic de l’éclipse, la deuxième pendant le pic de l’éclipse, et la dernière 35 minutes après. Elles voyageront à travers notre atmosphère à des altitudes comprises entre 70 et 325 kilomètres pour déployer quatre instruments scientifiques qui mesureront les variations dans les champs électriques et magnétiques de l’ionosphère, ainsi que les changements de température et de densité.
Au cours de leurs trajectoires (montante puis descendante), ces sondes pourront mesurer avec précision des changements qui se produisent à différentes altitudes. Les sondes seront récupérées en fin de mission pour être lancées à nouveau lors de la prochaine éclipse solaire totale du 8 avril 2024.
De l’influence de l’ionosphère sur les satellites de télécommunication
Dans le même temps, plusieurs observations au sol compléteront la mission. Des chercheurs de l’observatoire Haystack, dirigé par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) utiliseront leurs instruments pour mesurer les perturbations ionosphériques un peu plus loin de la trajectoire de l’éclipse. Une équipe d’étudiants de l’Embry-Riddle Aeronautical University déploiera quant à elle des ballons sondes en haute altitude pour mesurer les changements météorologiques au fur et à mesure du passage de l’éclipse.
L’ensemble de ces mesures contribuera à dresser un modèle précis de la dynamique de l’ionosphère. Sa compréhension est de plus en plus nécessaire, car toutes nos communications par satellite passent par l’ionosphère avant d’atteindre la Terre. Il apparaît ainsi capital de bien comprendre le comportement de l’ionosphère et de pouvoir prédire les perturbations qui peuvent y avoir lieu.
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