Un patient paralysé des bras reçoit des implants dans le cerveau et la moelle épinière

Un patient tétraplégique de 46 ans vient d’être greffé de deux implants, l’un au cerveau et l’autre à la moelle épinière, pour tenter de lui faire retrouver l’usage de ces bras. Ce procédé a déjà permis à un patient tétraplégique de remarcher. Interview avec Daver Marver, le directeur d’Onward, la société qui a mis au point l’implant de la moelle épinière.

Pour la première fois, un patient tétraplégique vient de recevoir un implant cérébral couplé à un implant stimulant la moelle épinière dans l’espoir de lui permettre de retrouver l’usage de ses bras, ses mains et ses doigts. La combinaison de ces deux types d’implants a déjà permis à un patient paraplégique de retrouver la motricité de ses jambes.

La marche lui est revenue de façon naturelle, grâce à la pensée. Cette première avait fait l’objet d’une publication dans la revue Nature.

Cette fois, il s’agit d’un homme suisse de 46 ans qui a perdu l’usage de ses bras après une chute et qui a été pris en charge au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) à Lausanne (Suisse). Interview avec Dave Marver, le directeur d’Onward, la société néerlandaise qui a fabriqué l’implant de la moelle épinière.

« L’implant placé sur la moelle épinière fait environ la taille d’une boîte d’AirPods »

Sciences et Avenir : Vous avez déjà réussi à faire remarcher un homme paralysé des jambes. Comment avez-vous su que c’était le bon moment de tenter de rendre sa motricité à un patient paralysé des bras ?

Dave Marver : Nous avons réalisé plusieurs études précliniques sur des modèles animaux et avons estimé que la technologie était mûre pour la tester sur les membres supérieurs. En mai 2023, nous avons notamment publié le cas d’un patient qui est parvenu à remarcher grâce à notre technologie. Il était même capable d’avoir un contrôle plus précis de ses jambes.

Il peut stopper sa marche spontanément et s’aventurer sur des terrains plus complexes qu’un traditionnel sol d’intérieur. Ces résultats obtenus grâce à l’interface entre l’ordinateur et le cerveau sont très encourageants.

Retrouver la motricité des membres supérieurs est-il plus compliqué que de retrouver l’usage de ses jambes ?

Oui. Les membres supérieurs demandent bien plus de précision, notamment les doigts dont la motricité est très fine. C’est très différent d’un mouvement répétitif comme la marche, et qui est sans cesse le même.

Comment savez-vous exactement où placer ces implants ?

L’implant placé sur la moelle épinière fait environ la taille d’une boîte d’AirPods. On l’installe très haut sur la colonne vertébrale, au niveau du cou, où se trouvent les nerfs qui contrôlent les membres supérieurs. L’implant cérébral est lui placé dans un petit trou réalisé au niveau de l’aire du cortex moteur, qui contrôle tous les mouvements volontaires de notre corps.

Après l’implantation, le patient tente de réaliser toute une série de mouvements : faire un pas ou attraper quelque chose sur une table, selon que l’on travaille sur la motricité des jambes ou des bras. Le patient doit s’entraîner avec ce nouveau système dont il est équipé. Nous avons par exemple des exercices à faire sur écran, avec un avatar.

 Crédit : Jean-François Desmarchelier / ONWARD

L’implant d’Onward destiné à la moelle épinière à gauche et l’implant cérébral à droite

« L’interface cerveau-ordinateur et l’implant à la moelle épinière ont le potentiel d’aider dans tant de domaines »

Cette opération est une coopération entre Onward, une société néerlandaise, Clinatec à Grenoble, qui s’occupe de l’implant cérébral, et le CHUV de Lausanne. Comment est née cette collaboration ?

Je me dois de mentionner et tirer mon chapeau au Pr Grégoire Courtine et au Pr Jocelyne Bloch [qui ont déjà permis au patient tétraplégique de remarcher]. En réalité, ce sont eux qui ont fondé notre entreprise parce que personne d’autre ne l’avait fait au préalable. Ils sont tellement passionnés par l’idée d’aider les patients et de les aider à retrouver la motricité. Soit ils arrivent à trouver quelqu’un qui a créé la technologie dont ils ont besoin. Soit ils la fabriquent eux-mêmes, et c’est ce qui s’est passé dans ce cas.

Comment va le patient de 46 ans qui a reçu les deux implants à Lausanne ?

Il est encore trop tôt pour en dire plus mais pour le moment, tout s’est passé comme prévu.

Aimeriez-vous aller encore plus loin ? Peut-on imaginer encore autre chose que de retrouver l’usage de ses bras et de ses jambes ?

Oui, cette technologie pourrait aussi être utilisée pour des fonctions autonomes, comme aller aux toilettes ou traiter la tension artérielle instable. Deux problématiques importantes après des blessures à la moelle épinière. L’interface cerveau-ordinateur et l’implant à la moelle épinière ont le potentiel d’aider dans tant de domaines. Pas uniquement une seule personne qui vient de retrouver l’usage de ses jambes.

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