Activement recherché par la justice militaire, l’ancien inspecteur général de la police, proche de Joseph Kabila, a publié un long message vidéo dans lequel il s’en prend violemment au chef de l’État congolais.
Corruption, tribalisme…
« Corruption institutionnalisée », « tribalisme à outrance », « prédation des richesses du pays », « instrumentalisation de la justice », « assassinats politiques »… John Numbi a dressé dans cette intervention un tableau très sombre de la gouvernance actuelle.
Il reproche d’abord à Félix Tshisekedi d’avoir « déboulonné le système qui l’a mis au pouvoir ». « Les élections de 2018 ont consacré une passation pacifique du pouvoir […], une paix des braves qui s’est matérialisée par un accord dont la majorité des acteurs sont encore vivants », a-t-il lancé, évoquant le fameux « compromis » trouvé entre Joseph Kabila et l’actuel chef de l’État – compromis qui aurait permis à ce dernier d’arriver au sommet de l’État. Pour Numbi, « Tshisekedi a perdu toute légitimité en reniant l’accord qui lui a permis d’accéder au pouvoir ».
L’ancien inspecteur général a également évoqué les prochaines élections, prévues le 20 décembre. Organisées selon lui « pour une tricherie à grande échelle », elles « seront le feu qui va embraser la poudrière ». Estimant que « les politiciens qui vont y participer sont des complices », il a assuré qu’il ne reconnaîtrait pas « le pouvoir qui viendrait des élections à venir » si les conditions restaient les mêmes.
Appel à la sédition
Versant dans la sédition, l’ancien sécurocrate de Joseph Kabila a lancé plusieurs appels aux forces de sécurité. Pour lui, « l’armée et la police ainsi que toutes les forces de sécurité de la nation ne sont plus liées au devoir d’obéir dès lors que le commandant suprême est devenu un danger par son immaturité, son incompétence notoire, son népotisme et son comportement tribaliste qui menace l’unité nationale ».
S’associant « aux compagnons d’armes des FARDC », il a déclaré : « Si, d’ici au 20 décembre, rien ne change, nous serons dans l’obligation d’appliquer et de faire appliquer l’article 64 de la Constitution. » Article selon lequel « tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution ».
« Fatshi doit se retirer »
Numbi n’y va pas par quatre chemins : « Fatshi doit se retirer dans l’intérêt de la nation. » Et de poursuivre : « Seul le fabricant du monstre est capable de le détruire. Autant nous lui avons donné le pouvoir, autant nous sommes capables de le lui reprendre. De gré ou de force. »
Ce pavé dans la mare ne va pas faire redescendre la tension entre le camp présidentiel et celui de Joseph Kabila. Début septembre, les avenues autour du domicile de ce dernier ont été rouvertes sur instruction de Félix Tshisekedi et demeurent sous la protection des éléments de la Garde républicaine et de la police militaire. Elles avaient été fermées au public lorsque l’ancien président était aux affaires. Une nouvelle « provocation » pour les proches de l’ex-chef de l’État, qui estimaient au moment des faits que « Félix Tshisekedi faisait tout pour aller au clash ».
En exil au Zimbabwe
Poursuivi par la justice militaire pour « association de malfaiteurs » et « assassinat de Floribert Chebeya et Fidèle Bazana », le général John Numbi s’était retiré dans sa ferme située en périphérie de Lubumbashi, dans le Haut-Katanga, en juillet 2020. Il a ensuite fui la RDC en mars 2021. Sous sanctions américaines, européennes et onusiennes depuis 2016, il réside au Zimbabwe, où il a obtenu le statut de réfugié politique. Les autorités congolaises réclament en vain son extradition. Une demande appuyée directement par Félix Tshisekedi auprès d’Emmerson Mnangagwa lors de son déplacement à Harare, début septembre.
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