Le procès des auteurs présumés du massacre du 28 septembre 2009 a reçu aujourd’hui la déclaration du Journaliste Amadou Diallo, ancien correspondant de la BBC qui a livré sa part de vérité. Ce courageux correspondant qui a fait son Reporter avec des sons de crépitement des armées a fait le grand déballage. Lisez plutôt…
« Si j’ai décidé de prendre la parole, ce n’est pas pour charger ou pour disculper, enfoncer ou anéantir une personne. Si je prends la parole c’est parce que je tiens aussi à livrer ma part de vérité dans un évènement qui a endeuillé des familles entières. C’est un évènement majeur de l’histoire de la Guinée ».
Amadou Diallo raconte au stade très tôt le matin, quelques minutes après, le colonel Moussa Thiégboro Camara est arrivé sur les lieux et il a été applaudi par le petit groupe: « Puisque la discussion montait en intensité, sur fond de désaccord, le colonel Moussa Thiégboro Camara je l’ai vu faire un geste de la tête avant de se retirer. Dès qu’il s’est retiré les policiers et gendarmes qui étaient déployés là-bas ont lancé des gaz lacrymogènes pour disperser le petit groupe.
Nous tous avons été dispersés violemment. Il y a eu des interpellations, des journalistes ont eu leurs matériels brisés notamment Mouctar Bah de Rfi. J’étais à côté lorsque les policiers ont brisé son matériel. Moi j’ai continué en allant vers l’université, mon sac en bandoulière dans le but d’aller chez le Jean Marie Doré pour retrouver les leaders des forces vives ».
A l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry, Moussa Thiégboro Camaraest arrivé en compagnie des pickups de la gendarmerie. Soudai. » Sidya Touré lui demande de les laisser aller à l’esplanade du stade pour livrer un message aux militants. Le colonel a dit « non.
Lorsque le président (Dadis) vous a appelé hier nuit qu’est-ce qu’il vous a dit ? . Sidya Touré lui répond : Il m’a dit qu’il souhaiterait que la manifestation soit reportée, mais je n’y pouvais rien faire parce qu’il était 01h du matin. Moussa Thiégboro Camara répond : « Non, ce n’était pas 01h parce que j’étais assis à ses côtés »
Colonel Moussa Thiégboro Camara selon Amadou Diallo a perdu son sang de froid et a commencé à insulter : « Celui qui parle encore je lui (…). Moi je suis bien éduqué, que quelqu’un parle encore. Je m’adresse aux doyens » à qui il demande de le suivre « suivez-moi ».
Amadou Diallo poursuit: « Ils ont commencé à lancer des projectiles sur les gendarmes qui ont riposté par des gaz lacrymogènes. C’était la débandade. Les gendarmes ont replié face à la masse compacte venue de la banlieue. Les leaders ont continué et y ont pénétré. Lorsque j’arrivais, ils étaient déjà installés à la tribune. A la pelouse, il y en a qui priaient, d’autres chantaient l’hymne national.
C’était une joie extrême. A 11h 40’, j’ai quitté la pelouse parce que je devais passer en direct. Je suis allé derrière la tribune pour chercher un endroit calme. Jusqu’à 12h 20 je n’ai pas reçu d’appel de la BBC. C’est à cet instant précis que j’ai commencé à entendre les premiers tirs (…) J’ai vu mon ami Mouctar Bah à distance qui courrait aussi. Je l’ai interpelé, il est venu vers moi. On est resté là pensant que le pire qui allait nous arriver c’est l’arrestation . Il était très menaçant. Lorsqu’on s’est présenté, il s’est déchainé sur nous en disant que c’est nous qui vendons l’image de la Guinée à l’étranger.
Il a braqué l’arme sur nous et nous a intimé à se mettre à genou au même moment. Je n’ai jamais vu pareil. Il nous a demandé de mettre les mains au dos. C’est à cet instant précis que j’ai eu peur parce que je pensais qu’il voulait nous exécuter. Entretemps, un militaire plus gradé que ce soldat est arrivé, il lui a dit : laisse-les, ce sont des journalistes, on était ensemble à Labé.
C’est ce qui nous a sauvés. Cet officier a commis un policier de nous escorter. Mais les militaires étaient déployés sur tout le parcours qui menait à la sortie du stade. Tout le long du chemin, j’ai vu des corps allongés les yeux hagards tournés sur le soleil. Je ne pouvais dénombrer le nombre de victimes que je voyais parce que la violence se poursuivait sans répit. C’était effrayant » affirme l’ancien correspondant de la BBC.
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