Des singes survivent deux ans avec un rein de porc génétiquement modifié

Lors d’essais précliniques, des singes ont survécu jusqu’à deux ans après une transplantation de reins de porcs génétiquement modifiés pour « humaniser » leur profil immunologique.

Vue au microscope d’un rein de porc génétiquement modifié pour être plus compatible avec la biologie humaine. Des protéines humaines CD46 apparaissent en fuchsia, ainsi que les cellules endothéliales du rein (vert) et le noyau cellulaire (bleu).

Des singes greffés d’un rein de porc génétiquement modifié ont survécu un an en moyenne et jusqu’à deux ans dans le meilleur des cas selon des essais effectués par la société américaine eGenesis et présentés dans la revue Nature. Ce record de durée pour une telle xénogreffe, normalement rejetée en quelques jours, marque un progrès important dans la possibilité de transplanter, un jour, des reins de porc chez des patients humains.

Le fruit de plus de 40 ans de recherche
Les besoins de greffe de rein sont énormes, notamment pour les diabétiques souffrant d’insuffisance rénale ou avec une glomérulonéphrite chronique : 100.000 patients sont en attente d’une transplantation aux États-Unis, et près de 10.000 en France, avec moins d’un patient sur deux greffé et une accumulation des demandes non satisfaites au fil des ans.

Les recherches sur la possibilité d’utiliser le rein ou le cœur de porcs comme greffons chez des patients ont débuté il y a plus de 40 ans, car cet animal facile à élever possède des organes d’une taille et d’une anatomie proches des nôtres.

En septembre 2021, une équipe de l’université de New York avait montré pour la première fois que des reins de porcs génétiquement modifiés pouvaient fonctionner normalement une fois greffés à des personnes en état de mort cérébrale.

Une première qui n’avait duré que 54 heures toutefois. Après d’autres essais, la même équipe a annoncé à l’été 2023 avoir fait fonctionner, sans rejet immunologique, ce même type de rein porcin humanisé durant 32 jours ; toujours sur un patient en état de mort cérébral ayant fait don de son corps à la science.

Début 2023, avait été réalisée la toute première transplantation d’un cœur de porc modifié cette fois, à un patient en insuffisance cardiaque terminale. Une opération réalisée par le Pr Muhammad Mohiuddin de l’Université du Maryland qui nous en avait alors dévoilé les détails en exclusivité. Le patient, David Bennett, avait lui survécu 61 jours.

70 modifications génétiques nécessaires
Dans les essais récemment menés chez des macaques, près de 70 modifications génétiques ont été nécessaires sur des porcs miniatures pour réduire les risques de rejet du greffon. Les plus nombreuses ont éliminé par précaution des virus dormants dans le génome porcin qui pourraient théoriquement contaminer des tissus humains.

Plus critique, trois gènes du porc ont aussi été inactivés pour rendre le tissu rénal moins visible par le système immunitaire humain et sept gènes humains ont été introduits pour limiter des risques de coagulation et réduire l’inflammation dans le greffon.

Les 15 macaques xénogreffés, un nombre inédit pour ce genre d’expérience, avaient aussi reçu un traitement immunodépresseur.

Mais à terme, l’objectif des scientifiques est d’arriver à s’en passer en rendant le greffon plus furtif encore grâce à d’autres manipulations génétiques. Même si le temps très variable de rejet des greffons selon les singes pose encore question, les chercheurs américains estiment être bientôt proches des premiers essais chez des patients humains bien vivants cette fois.

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