La Mezza, le fléau de l’OL

Mise sous le feu des projecteurs il y a deux semaines lors des incidents survenus au Vélodrome à l’occasion de l’Olympico, la Mezza est présente dans les tribunes lyonnaises depuis près de 20 ans. Et l’OL ne parvient pas à se débarrasser du groupe d’extrême droite.

Elle a quasiment réussi à voler la vedette aux énergumènes qui, à coups de projectiles, ont démoli les bus de l’Olympique lyonnais et la soirée de 65 000 personnes, le 29 octobre dernier. À Marseille, la Mezza Lyon a fait énormément parler d’elle et a pris un coup de projecteur sans doute plus important que ce qu’elle aurait aimé. Habitué à se cacher et à ne s’afficher que très discrètement en tribunes, ce groupe d’extrême droite, pour ne pas dire néonazi, gangrène les travées lyonnaises depuis bientôt 20 ans.
« À intervalles réguliers, depuis 2006, nous avons l’étendard Mezza Lyon dans les tribunes », précise Xavier Pierrot, le stadium manager de l’OL.
Difficile toutefois de savoir combien de personnes constituent ses rangs : « Je connais le nom de deux leaders parce que j’écoute ce qu’il se dit sur l’extrême droite lyonnaise, mais sinon je ne sais pas s’ils sont 10 ou 20. Dans la liste des 600 supporters présents à Marseille, je ne saurais pas vous dire s’ils étaient 3 ou 10. »

Matraques télescopiques, et Totenkopf et Mussolini

Les circonstances de la création de ce groupe qui n’existe pas légalement, puisque ce n’est pas une association de loi 1901, sont également floues. Depuis le milieu des années 2000, la Mezza se montre donc sporadiquement en compagnie des supporters lyonnais et se distingue de différentes manières, notamment pour sa rivalité extrêmement tendue avec les Magic Fans, un des groupes ultras de Saint-Étienne, au début des années 2010.

Des membres de la Mezza sont notamment soupçonnés d’avoir tagué le local des Stéphanois avec des inscriptions racistes et antisémites en octobre 2011.

Quelques mois plus tard, six d’entre eux, accusés d’avoir vandalisé des véhicules appartenant à des membres des Magic Fans, sont même arrêtés. C’est surtout en volant la bâche des MF, en avril 2013, que le groupuscule lyonnais fait parler de lui.

Une vendetta est lancée, les Verts répondent, et deux hommes appartenant à la Mezza sont finalement arrêtés le 19 septembre pour avoir tabassé à coups de matraques télescopiques un fan de l’ASSE qui se rendait à son travail.

Outre ces actions d’« ultras », la Mezza donne parfois rendez-vous à d’autres groupes pour se bagarrer.

Et filme ses combats, notamment un 15 contre 15 face aux Camside Tolosa, en avril 2016 (on n’a pas le vainqueur de la baston, désolé).

La Mezza aurait des liens avec certains groupes identitaires du Vieux-Lyon, squatterait la Traboule, le bar historique de l’extrême droite lyonnaise, et serait impliquée dans les violences commises lors de la crise des Gilets jaunes, en étant affilié au fameux Guignols Squad, sorte d’Avengers identitaires, qui se montre souvent en manifestations lorsqu’il y a du grabuge.

Au stade, ils se font finalement plutôt discrets. En tout cas, on ne les voit avec leur étendard que très rarement. Lors des matchs à domicile, ils se calent dans le virage Sud, et ne sortent quasiment jamais leur fameux drapeau. C’est surtout à l’extérieur que le groupe se fait voir.

Avant Marseille, ils s’étaient montrés à Reims cette saison et y avaient déployé leur étendard. Celui-ci reprend le nom du groupe avec l’hexagone dessiné en dessous.

On y voit également Guignol, qui tient une lanterne dans laquelle on distingue un blason : celui de la 33e division SS Charlemagne.

Enfin, ce n’est pas vraiment le même blason. Les plus férus d’histoire de la Seconde Guerre mondiale auront remarqué que le griffon utilisé par cette division d’infanterie de la Waffen-SS est ici remplacé par un lion, évidemment.

Ce qui fait qu’il n’est techniquement pas illégal de le montrer en France. Justement, c’est tout le problème de l’OL, qui cherche à se débarrasser de ce groupe. Il est difficile de dissoudre un groupe qui n’existe pas, et la Mezza joue souvent avec les limites.

Elle se garde bien, par exemple, de ramener son « vrai » drapeau au stade, qui comporte une Totenkopf, un autre symbole SS, lui totalement illégal, surplombé par l’inscription « Mezza Lyon ».

Un étendard qui a même été déployé au sein du mausolée de Benito Mussolini, lors d’une virée du groupe en Italie.

Quant aux dérapages racistes que l’on a vus à Marseille, il est encore impossible de savoir si les auteurs des saluts nazis et des cris de singe sont bien des membres de la Mezza.

Selon nos informations, l’OL a demandé, le lendemain de la soirée à Marseille, à récupérer les images de vidéosurveillance du parcage, mais ne les a reçues qu’en fin de semaine dernière.

L’OL est parfois critiqué pour laisser faire ce genre de comportements et ne pas suffisamment sanctionner ces brebis galeuses. Mais le club assure faire son maximum. 

« Les adhérents du Kop Virage Nord et de Lyon 1950, on les connaît, ils sont dans leur base de données. Mais les “adhérents” de la Mezza, je ne les connais pas », explique Xavier Pierrot.

Souvent cagoulés, les membres ne sont pas forcément encartés au sein des groupes officiels, et même lorsqu’ils se montrent à visage découverts, le travail est loin d’être fini.

 « Leur nom n’est pas écrit sur leur visage ! On n’est pas en Chine où chacun est fiché. Celui qui tient l’étendard Mezza Lyon à Marseille, on distingue tout à fait son visage sur les photos sorties dans la foulée.

Mais je ne le connais pas », insiste le stadium manager. Même constat lorsque l’on voit un individu qui semble tenir l’étendard du groupe serrer la main à Jean-Michel Aulas lors du tour d’honneur de ce dernier, en mai.

« Aujourd’hui, il faut arrêter de demander à la LFP et aux clubs de foot de faire des choses que même la justice n’arrive pas à faire, exhorte Xavier Pierrot. On fait le maximum avec les moyens juridiques qui sont les nôtres. » 

Peut-on également demander au Virage Sud, et notamment à Lyon 1950, le principal groupe de cette tribune, de s’autogérer en filtrant ses supporters ? D’autant plus que les 1950 entretiennent une relation étrange avec la Mezza.

Certains habitués des déplacements ont déjà pu voir un membre notoire du groupuscule monter au perroquet, pour lancer les chants, en tant que représentant du Virage Sud (et non des Lyon 1950, mais ils ont forcément dû donner leur accord).

Ce fut le cas quelques fois à domicile lors des derniers mois à Gerland (2015), puis d’autres fois en 2019 et surtout à Prague en octobre 2021, alors que la Mezza avait sorti son drapeau pour la première fois depuis un moment.

En tout cas, ils ont condamné les débordements racistes dans un communiqué publié le lendemain. « Il y a peut-être du bon dans ce qu’il s’est passé à Marseille.

Le communiqué des Lyon 1950, puisque c’est la première fois qu’ils s’expriment sur ce sujet-là, démontre que les leaders des groupes commencent à se rendre compte qu’il y a des choses qui ne sont pas tolérables », se réjouit Xavier Pierrot.

Tandis que John Textor découvre le problème et montre « la même intransigeance que le président Aulas ». Au moins un sujet sur lequel ces deux-là ne s’engueuleront pas.

sofoot

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