Avant l’arrivée du grand froid en Ukraine, la population entre dans une période de terreur qu’elle a connue en 2002, explique au HuffPost la spécialiste Caroline Brandao.
Eau courante, gaz et électricité. Ces éléments, pourtant essentiels pour passer un hiver au chaud, cet hiver encore, les Ukrainiens risquent de devoir s’en passer.
Bref retour en arrière. Entre octobre 2022 et mars 2023, la Russie avait opté pour une tactique de terreur singulière en Ukraine qui consistait à cibler systématiquement les infrastructures énergétiques ukrainiennes comme les barrages hydrauliques, les centrales électriques ou les raffineries de pétrole à l’aide de missiles et de drones kamikazes. Et comme nous l’expliquons dans la vidéo en tête d’article, l’armée russe a déjà sa campagne de bombardements.
« Le droit international humanitaire est très clair : il est interdit de cibler des infrastructures civiles et des infrastructures essentielles, également des infrastructures qui peuvent libérer des forces dangereuses. Ce qui interdit de cibler des barrages, des centrales électriques, des centrales nucléaires », explique au HuffPost l’enseignante-chercheuse en droit international humanitaire Caroline Brandao.
Un quart des Ukrainiens sans énergie en 2022
D’après elle, « viser ces infrastructures à des conséquences graves pour la population ». Car sans eau et sans moyen de chauffage cela « oblige les civils à sortir de chez eux » pour s’approvisionner. « Sauf qu’avec l’hiver, la neige et la glace recouvrent les chemins et les lieux de passage, mais il y a dans ces lieux des restes explosifs qui sont jonchés sous les sols, que l’on ne voit pas et qu’on ne détecte plus », développe la chercheuse.
Au plus fort de l’hiver dernier, plus d’un quart des 40 millions d’Ukrainiens avaient ainsi été privés d’accès à l’énergie de manière totale ou partielle. Pour prendre la mesure de ce chiffre, Kiev a d’ailleurs fait ses calculs : « Chaque foyer ukrainien a dû subir cinq semaines de coupures de courant intermittentes », comme indiqué dans un entretien à The Economist par Oleksandr Kharchenko, directeur du Centre de recherche sur l’industrie de l’énergie, et conseiller auprès du gouvernement ukrainien.
Conséquence directe des destructions occasionnées par les bombardements russes sur les infrastructures énergétiques Ukrainiennes, cette photo de la NASA montre une Ukraine noire, privée d'électricité et donc de lumière.#RussieEtatCriminel#SlavaUkraini pic.twitter.com/CSeFjpJSuL
— Neo Fight 🇪🇺 🇮🇱 🇺🇦 (@AtmosFear55) November 25, 2022
Des « actes de terreur » interdits par le droit international
Cette tactique du Kremlin a pour objectif de terroriser une population déjà épuisée par près de 21 mois de guerre. « La notion juridique exacte, c’est “ acte de terreur ”. Des actes visant à répandre la terreur dans la population (…) et le fait de mener des campagnes de bombardements ou de tirs isolés contre des civils en zone urbaine est constitutif du fait de répandre la terreur parmi la population civile », observe Caroline Brandao.
Ces actes sont totalement contraires au droit humanitaire international alors même que ces bâtiments présentent une signalétique qui est censée les protéger d’éventuelles attaques. « Ces infrastructures qui peuvent libérer des forces dangereuses ont une signalétique qui est prévue dans les Conventions de Genève de 1949. Ce sont trois points orange, précise la chercheuse. Il faut imaginer qu’ils sont sur des grands drapeaux.
Ces lieux sont également cartographiés pour savoir où se trouvent exactement ces infrastructures ».
Pour limiter les dégâts cet hiver, l’Ukraine a donc pris les devants, entre formation de personnel qualifié, réserves de charbon et livraison de systèmes de défense antiaérienne plus performants que l’année précédente.
L’hiver s’annonce donc crucial pour la suite du conflit, d’autant plus que la contre-offensive ukrainienne lancée en juin est à la peine. Seulement 17 kilomètres ont été grappillés en l’espace de 5 mois.
huffpost