La prochaine conférence internationale sur le climat débute le 30 novembre prochain. Organisée à Dubaï par les Émirats arabes unis, elle est présidée par Sultan al-Jaber, qui dirige également la compagnie pétrolière nationale.
La COP28 sera-t-elle celle des hydrocarbures et énergies fossiles ? Alors que les rapports se succèdent et se répètent, alertant sur le rythme trop faible de la baisse des émissions de gaz à effet de serre, de nombreux observateurs déplorent la place de plus en plus accrue réservée au monde du pétrole, du gaz et du charbon à l’occasion des rendez-vous internationaux sur le climat.
L’an dernier, à Charm el-Cheikh lors de la COP27, sur les 33 000 participants, 636 lobbyistes étaient présents pour défendre ces secteurs. Un chiffre conséquent, plus important que n’importe quelle délégation nationale, mis à part les Émirats arabes unis qui avaient envoyé le plus gros contingent en Égypte. C’est surtout l’illustration d’une tendance : avec une augmentation de 25% par rapport à la COP26 de Glasgow, le monde fossile est de plus en plus présent.
Le plus souvent, ces personnes viennent avec un statut d’observateur. Il faut pour cela être accrédité via une association. C’est par exemple le cas de Patrick Pouyanné, le patron de TotalEnergies, venu à la COP27 grâce à l’association des entreprises pour l’environnement que le groupe pétrolier préside. S’ils parviennent à faire partie d’une délégation, les promoteurs des énergies fossiles peuvent cependant s’asseoir à la table des négociations.
Toujours en Égypte, l’ancien patron du groupe pétrolier BP faisait ainsi partie de celle de la Mauritanie.
Une coalition d’ONG a ainsi fait le compte : depuis la COP9 de 2003, ce sont ainsi 7 200 accréditations qui ont été données aux lobbyistes des énergies fossiles lors des différents sommets climatiques. Il s’agit par ailleurs d’une estimation basse : à l’image de l’image de Patrick Pouyanné présent au titre d’une association et non de son entreprise, les affiliations ne sont pas souvent claires.
La COP28 organisée chez le 7e producteur de pétrole mondial ne devrait pas déroger à cette règle. La société civile s’est donc posé la question d’un éventuel boycott, pour éviter de cautionner cet état de fait. « On se l’ai posée avec sincérité au moment de l’annonce de la présidence de cette COP », se souvient Gaïa Febvre, responsable des politiques internationales au Réseau Action Climat – France (RAC).
« On s’est consulté avec le réseau international, environ 1 900 ONG dans 130 pays. On s’est demandé ce qu’on perdrait ou gagnerait à y aller. » L’hésitation n’a pas duré longtemps : « Nous avons choisi de faire de cette COP une opportunité pour continuer à pousser nos messages, notamment sur les énergies fossiles.
Il faut contrer le discours des lobbyistes, qui pourraient essayer d’introduire des solutions technologiques et expliquer qu’il sera ainsi toujours possible de faire du charbon, du pétrole et du gaz « propre ». Nous serons là pour rappeler qu’il faut s’attaquer à la racine du problème et qu’il faut le faire de manière juste. »
Pour les ONG, pas question donc de laisser la place aux lobbys ; d’autant plus que cette COP devra avancer sur plusieurs dossiers d’importance : le fonds « pertes et préjudices », une éventuelle mention de la sortie des fossiles dans la déclaration finale, ou encore le premier bilan des action mondiales entreprises depuis l’adoption de l’Accord de Paris.
RFI