Une meilleure gestion des fermetures de mines peut aider à lutter contre l’orpaillage illégal en Afrique (dossier)

En Afrique, malgré les différentes stratégies mises en œuvre ci et là pour lutter contre l’orpaillage illégal et mettre fin aux pertes liées au manque de contrôle sur cette activité, les résultats restent mitigés. Pour certains analystes, étant donné la complexité du phénomène, la priorité serait de se concentrer sur les causes du phénomène, parmi lesquelles se trouve la mauvaise gestion des fermetures de mines.  Bien des gouvernements ignorent cette cause, et pourtant… 

Dans presque tous les pays miniers africains, la question de l’orpaillage illégal est une épine dont les gouvernements n’arrivent pas à se débarrasser. Selon un rapport publié plus tôt cette année par Megatrends Afrika, le nombre de mineurs artisanaux actifs au Zimbabwe s’élèverait à environ 1,5 million, en hausse par rapport aux chiffres officiels qui estiment à 500 000 le nombre de petits exploitants miniers et à 3 millions le nombre de personnes vivant indirectement de l’activité.

Les raisons qui expliquent cette croissance sont, apprend-on, la crise économique qui force les populations à chercher des moyens de survivre, ce qui les conduit vers plusieurs activités informelles comme l’orpaillage clandestin.

Au Ghana, l’exploitation artisanale illégale (Galamsey) a pris de l’ampleur, et environ un million de Ghanéens se livrent à cette pratique qui ferait vivre environ 4,5 millions de personnes dans le pays selon des sources concordantes. En Côte d’Ivoire, le Groupement spécial de lutte contre l’orpaillage illégal a détruit 801 sites d’orpaillage illégal entre le 14 juillet 2021 et le 27 mai 2022, dans les 31 régions du pays. 

En Côte d’Ivoire, le Groupement spécial de lutte contre l’orpaillage illégal a détruit 801 sites d’orpaillage illégal entre le 14 juillet 2021 et le 27 mai 2022, dans les 31 régions du pays.

Dans des pays comme le Mali, le Niger, le Burkina Faso, ou encore le Cameroun, la RDC, etc., le phénomène est également présent. Pour tenter d’en réduire l’ampleur, certains Etats mettent en place des stratégies de répression, alors que d’autres optent également pour l’encadrement du secteur en cherchant des moyens de motiver les orpailleurs clandestins à s’enregistrer. Dans d’autres pays, des moyens alternatifs de subsistance sont proposées aux orpailleurs.

Mauvaise gestion des fermetures de sites miniers, une cause sous-estimée 

Exposant ses préoccupations quant à la gestion inadéquate des fermetures de mines en Afrique du Sud lors d’une conférence le 24 novembre dernier, David van Wyk, chercheur chez Bench Marks Foundation, a soulevé un pan du phénomène peu documenté jusque-là.

Selon les propos rapportés par Creamer Medial’expert a cité l’exemple de milliers de travailleurs miniers récemment licenciés dans le pays. Pour lui, comme ils n’ont de compétences qu’en matière d’exploitation minière et qu’il y a simultanément un manque d’opportunités d’emploi dans les zones d’envoi de main-d’œuvre, un grand nombre de ces travailleurs pourraient rejoindre des exploitations minières illégales et occuper des mines abandonnées. 

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En Afrique du Sud, près de 30 000 emplois ont été perdus dans le secteur minier depuis 2014.

Il a ainsi appelé à une reconversion des mines en fin de vie dans une transition juste vers une économie post-minière, afin de sauver ces emplois.

Si l’on en croit ses propos, la Mining Qualifications Authority, entité sud-africaine établie pour promouvoir le développement des compétences et des qualifications dans l’industrie minière, a un grand rôle à jouer.

Elle pourrait aider à la reconversion des anciennes mines et des infrastructures minières telles que les bureaux, les ateliers, les centres de formation, les installations sportives et récréatives, ainsi que les postes de transformation électrique, dans le but de créer des emplois et de soutenir et de relancer les villes minières. 

Réduire le nombre de mines abandonnées

En Afrique du Sud, pays reconnu pour le nombre de fermetures de mines à la suite d’un épuisement de réserves dans un passé récent, le nombre de mines abandonnées s’élève à plus de 6000. Selon un rapport de La Mine d’Infos, disponible sur la plateforme Ecofin Pro, ce chiffre s’accompagne d’une diminution des investissements fixes dans l’industrie au cours des dix dernières années, tandis que près de 30 000 emplois ont été perdus depuis 2014. 

En Afrique du Sud, le nombre de mines abandonnées s’élève à plus de 6000. 

« Nous n’avons pas une seule étude de cas d’une fermeture de mine réussie en Afrique du Sud, car c’est plus compliqué et plus coûteux que les compagnies minières ne l’imaginent », a déclaré Robert Appelbaum, associé chez Webber Wentzel, selon des propos relayés par ce rapport.

Selon le document, l’Afrique du Sud n’est pas le seul pays du continent où les fins d’exploitations minières sont mal gérées.

Quand ces sites miniers qui ont déjà été exploités avec succès par des compagnies étrangères sont abandonnés, il est normal qu’ils attirent les orpailleurs en quête de nouveaux prospects pour leurs activités. Pour les orpailleurs, en effet, les raisons les plus minimes laissant penser à une richesse de la zone en ressources minérales sont toutes bonnes à prendre. 

La société basée à Johannesburg travaillait sur des plans pour réaménager la mine, lorsqu’elle a été envahie par des mineurs informels en 2016.

Pour illustrer cela, on peut citer le cas de la mine Obuasi au Ghana, où AngloGold Ashanti a été obligée de réduire ses activités en 2014 en raison de lourdes pertes financières. La société basée à Johannesburg travaillait sur des plans pour réaménager la mine, lorsqu’elle a été envahie par des mineurs informels en 2016.

Ces intrusions l’ont poussé à suspendre les opérations de redémarrage, laissant la mine en régime de maintenance et entretien pendant 5 ans, avant de rouvrir récemment. En outre, en 2020, plusieurs médias locaux ont rapporté qu’un projet de développement agricole (Obuasi Goes Agro) mis en œuvre dans la région minière a régulièrement été ralenti voire compromis par les mineurs illégaux et leurs activités à proximité des terres agricoles de la mine.

Au-delà de l’exploitation minière

Pour résoudre l’épineux et complexe problème que constitue pour eux l’orpaillage illégal, les gouvernements africains doivent non seulement redoubler d’efforts dans leurs stratégies mêlant répression et proposition de moyens de subsistance alternatifs aux orpailleurs, mais également s’attaquer à la question des mines abandonnées.

Mieux gérer les fermetures de sites miniers entraine en effet une réduction des champs potentiels d’activités des orpailleurs illégaux. Selon une note de The Conversation, citée dans le rapport d’Ecofin Pro susmentionné, il existe plusieurs opportunités au-delà de l’exploitation minière.

Les différents domaines explorés comprennent la réutilisation des infrastructures (pour l’agriculture par exemple), la diversification de l’économie locale en développant des industries en aval, notamment la fabrication de textiles et de meubles qui peuvent être produits à partir des fibres et des tiges de certaines plantes, etc.

Ces différentes solutions peuvent aider à reconvertir les travailleurs d’une mine fermée et les empêcher de s’orienter vers l’exploitation illégale faute de moyens de subsistance. 

ecofin

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