Les discussions ont peu avancé mercredi sur le projet de loi immigration. Le gouvernement s’interroge sur l’ampleur des concessions à apporter à la droite, avant un nouveau round de discussions ce jeudi en vue de la commission mixte paritaire qui jouera le destin du texte.
Après le revers de l’exécutif à l’Assemblée nationale, le gouvernement cherche un compromis avec Les Républicains. Mais les discussions ont peu avancé mercredi 13 décembre sur le projet de loi immigration, le gouvernement s’interrogeant sur l’ampleur des concessions à apporter à la droite, avant un nouveau round de discussions ce jeudi.
Alors qu’Élisabeth Borne cherche un équilibre politique pour ne pas fracturer sa majorité, Bruno Le Maire a clairement tendu la main à la droite en appelant à « reprendre » la version du projet de loi, plus conservatrice, votée au Sénat.
« Quel est le seul moyen aujourd’hui pour qu’une telle loi passe ? C’est de reprendre la version du Sénat », a estimé le ministre de l’Économie dans une interview publiée mercredi soir dans Le Figaro.
Bruno Le Maire a néanmoins appelé son ancienne famille politique à la « mansuétude » et a dit espérer que « les LR comprennent qu’il faut bouger les lignes sur deux points sensibles pour notre majorité : l’AME (l’aide médicale d’État) et les conditions d’accès aux aides sociales » pour les étrangers. Ces deux points avaient été restreints par la droite sénatoriale.
Renoncer à la suppression de l’AME « pourrait faire partie du compromis », confirme un cadre du groupe LR au Sénat. Mais « sur les fondamentaux du texte, il ne peut pas y avoir de négociation », prévient un proche du président de la chambre haute Gérard Larcher.
Un dialogue « pas très bien engagé »
« Notre travail c’est de trouver un accord avec les LR et centristes du Sénat à partir du texte du Sénat. Ce ne sera pas tout le texte du Sénat, mais ça se rapprochera du texte du Sénat », a consenti pour sa part sur CNews le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Devenue maître d’œuvre des négociations, la Première ministre a reçu mercredi en fin de matinée Éric Ciotti, Bruno Retailleau, Olivier Marleix ou encore Annie Genevard, repartis après plus de deux heures de rendez-vous sous tension, sans aucune déclaration à la presse. Les ténors de LR ne veulent plus discuter exclusivement avec un Gérald Darmanin « qui (les) insulte en permanence ».
Le ministre de l’Intérieur, comme celui des Relations avec le Parlement Franck Riester, étaient toutefois présents à cette réunion, qui ouvre un bal de concertations à Matignon en vue de trouver un accord en commission mixte paritaire (CMP). Une deuxième réunion est prévue avec les dirigeants LR ce jeudi matin à 8 h 30.
« Ce n’est pas très bien engagé. On sent qu’ils veulent aller vite quitte à ce qu’il n’y ait pas de texte », a indiqué une source sénatoriale LR à l’AFP.
« On se reverra mais ça nous parait difficile », a-t-elle ajouté. « Ce n’est pas gagné », a glissé pour sa part une source gouvernementale.
Élisabeth Borne s’est également entretenue avec le président du groupe Union centriste au Sénat, Hervé Marseille. Sortant de Matignon, celui-ci a émis l’hypothèse d’un accord « sur une partie du texte » seulement. Citant comme thèmes pouvant être sortis du projet de loi « l’aide médicale d’État, le code de la nationalité, les prestations sociales pour les étrangers » qui « pourraient donner lieu à des textes (…) parallèles ».
Il n’a pas évoqué la question de la régularisation des travailleurs sans-papiers dans les métiers en tension, principal sujet de discorde entre la droite et la majorité, alors que circule également l’hypothèse d’aborder ce sujet dans un texte séparé.
L’exécutif espère une loi votée « avant les vacances de Noël »
« Une option est de réduire le texte aux éléments essentiels qui protègent les Français », c’est-à-dire le volet répressif, explique également une source au sein de la majorité parlementaire.
« Il faut tenir les deux bouts pour être efficaces. Nous n’accepterons pas une petite loi saucissonnée, qui aurait pour seul objectif de contourner les divisions de la majorité présidentielle », a cependant prévenu sur X Bruno Retailleau, le patron des sénateurs républicains.
Convoquée à la demande du gouvernement, la CMP se réunira à 17 h lundi, a annoncé le député macroniste Sacha Houlié. Ce fervent défenseur d’un assouplissement du texte présidera l’instance, dont fera également partie Bruno Retailleau notamment, selon une source parlementaire.
Benjamin Lucas, le député écologiste qui a défendu la motion de rejet adoptée lundi, a demandé au nom de la « transparence » à ce que la CMP soit publique.
Selon le ministère des Relations avec le Parlement, en cas d’accord en commission mixte, le vote des deux chambres du Parlement aurait lieu dès le mardi.
Cette CMP composée de sept députés et autant de sénateurs « se met au travail dès aujourd’hui » pour « préparer » un accord, a expliqué la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, espérant que la loi soit définitivement votée « avant les vacances de Noël ».
AFP