Le frère de l’ancien président Blaise Compaoré est poursuivi au Burkina Faso pour l’assassinat du journaliste d’investigation Norbert Zongo, en 1998.
La France a annulé, le 13 décembre, le décret ministériel de 2020 autorisant l’extradition de François Compaoré, frère de l’ancien président Blaise Compaoré, vers le Burkina Faso, où il est accusé de l’assassinat, en 1998, d’un journaliste, a appris l’Agence France-Presse, jeudi 21 décembre, auprès de la chancellerie.
L’abrogation de l’extradition de M. Compaoré est « intervenue à la suite de l’arrêt de la CEDH [Cour européenne des droits de l’homme] du 7 septembre 2023 qui a conclu à la violation de l’article 3 en cas d’extradition du requérant vers le Burkina Faso », résume le ministère de la justice. Cet article de la Convention européenne des droits de l’homme stipule que « nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou [à des] traitements inhumains ou dégradants ».
Le décret d’abrogation, signé par la première ministre, Elisabeth Borne, est un acte rare.
Les avocats de M. Compaoré, Mes Clara Gérard-Rodriguez et Pierre-Olivier Sur, n’ont pas souhaité s’exprimer suite à cette décision.
François Compaoré, frère cadet de l’ex-président (1987-2014) et l’un de ses proches conseillers, est poursuivi au Burkina Faso pour l’assassinat du journaliste d’investigation Norbert Zongo et de trois hommes qui l’accompagnaient, le 13 décembre 1998. Il avait été arrêté le 29 octobre 2017 à l’aéroport de Roissy en exécution d’un mandat d’arrêt international lancé par Ouagadougou.
« Le contexte a changé »
Le Burkina Faso avait réclamé à la France son extradition, assurant par la suite que, même s’il était condamné à mort, la peine ne serait pas mise à exécution. Remis en liberté sous contrôle judiciaire le 30 octobre 2017, M. Compaoré, qui vit en France, a multiplié les recours.
La justice avait autorisé son extradition dès 2018, puis un décret ministériel avait été signé en 2020, validé par le Conseil d’Etat en 2021. Mais la CEDH, saisie par la défense de M. Compaoré, a estimé le 7 septembre que la France devait réexaminer ce décret.
« Le contexte a changé », a relevé, lors d’une audience mercredi, le président de la chambre des extraditions de la cour d’appel de Paris, faisant allusion aux deux coups d’Etat successifs qu’a connus le pays en 2022.
Vêtu d’un costume bleu marine, M. Compaoré n’a pas souhaité s’exprimer lors de cette brève audience.
« M. Compaoré n’a eu de cesse de contester son extradition » qui comportait « des risques graves pour ses droits fondamentaux », a rappelé son avocate, Me Clara Gérard-Rodriguez. « Il n’a plus aucune procédure en cours » et rien ne justifie son placement sous contrôle judiciaire, a-t-elle ajouté.
Les relations entre la France et le Burkina se sont considérablement dégradées depuis l’arrivée au pouvoir, en septembre 2022, par un coup d’Etat, du capitaine Ibrahim Traoré.
Le Monde