Sur les traces de la scène punk en France

Il n’y a pas que l’Angleterre et ses Sex Pistols: le pogo a aussi remué la France, comme en témoignent un documentaire télé sur la scène punk des années 1980 et une exposition dédiée à Bérurier Noir, groupe phare.

« Punk is not vraiment dead ?! », documentaire de Lionel Boisseau, diffusé vendredi soir sur France 5, ouvre le bal des riffs et épingles de nourrice, prolongé par « Même pas mort ! Archives de Bérurier Noir », exposition au site François-Mitterrand de la Bibliothèque nationale de France du 27 février au 28 avril.

Tout un symbole: Bérurier Noir stoppe sa carrière dans un concert abrasif à L’Olympia en 1989, refermant ainsi les portes du succès qui s’ouvraient. C’est un des piliers d’un mouvement hexagonal né à la charnière années 1980, écho des déflagrations britanniques des Sex Pistols et des Clash surgis au milieu des années 1970.

Outre les « Bérus », des groupes auto-produits comme Oberkampf, Lucrate Milk, La Souris Déglinguée, Ludwig Von 88 ou encore Washington Dead Cats passent des squats à des salles plus ou moins confidentielles sous François Mitterrand.

« T’y allais n’importe comment, de n’importe quelle manière, tu sautais partout, on pouvait entrer sans payer » relate aujourd’hui dans le documentaire Béatrice Dalle, égérie punk qu’on voit mannequin d’un défilé underground, quelques années avant le succès de « 37°2 le matin ».

Ca tombe bien, l’entrée sera gratuite pour l’exposition à la BnF. « Par dépôt légal, nous recevons mécaniquement des partitions musicales, mais jusqu’à l’entrée des +Bérus+ dans nos archives, nous n’avions pas de fonds consacré à la musique dite actuelle, populaire ou underground », rembobine pour l’AFP Benoît Cailmail, commissaire de l’exposition, adjoint au directeur du département de la musique de la BnF.

« Résonance aujourd’hui »

Les documents donnés à la BnF en 2021 par le chanteur Fanfan (François Guillemot) et le saxophoniste mastO (Thomas Heuer), deux figures de Bérurier Noir, éclairent sur le parcours du groupe mythique et plus largement sur le creuset français de cette contre-culture.

On y trouve brouillons de textes, accessoires de scène — tels tambour, groin en plastique, etc — ou encore leur fanzine « Le Mouv’ment d’la jeunesse ». « Dans le premier numéro, il y avait une rognure d’ongle, on a la rognure d’ongle », s’amuse Benoît Cailmail.

François Guillemot, surnommé Fanfan, chanteur du groupe mythique de rock alternatif Bérurier Noir, se produit après 15 ans d'absence, le 5 décembre 2003 aux Transmusicales de Rennes
François Guillemot, surnommé Fanfan, chanteur du groupe mythique de rock alternatif Bérurier Noir, se produit après 15 ans d’absence, le 5 décembre 2003 aux Transmusicales de Rennes 

 

Mais cette scène n’a pas laissé qu’humour potache et provocation en héritage, à l’image des Olivensteins chantant « Fier de ne rien faire » ou « Euthanasie ».

« Beaucoup de gens ne connaissent pas les +Bérus+ mais ont entendu +La jeunesse emmerde le Front National+, un des marqueurs de cette époque », souligne le responsable de la BnF.

Cette célèbre punchline — greffée au titre « Porcherie » en live à L’Olympia en 1989 — est devenue un classique des manifestations face à la montée des extrêmes dans les urnes.

Les Bérus « sont engagés », « ils réveillent les consciences » déroule Beatrice Dalle parlant encore du groupe au présent.

Sans doute parce que cette formation « reflet de la jeunesse d’une époque » trouve une « résonance aujourd’hui » décrypte Benoît Cailmail.

La preuve, un autre hymne du Bérurier Noir, « Salut à toi », a refait surface en 2020 dans une version devenue virale pendant la crise sanitaire, « Merci à toi ô soignant ».

Et quoi de mieux qu’un hommage impertinent: un groupe punk d’aujourd’hui, Dalle Béton, éructe sur scène « La jeunesse emmerde le vin conventionnel ».

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