Quarante migrants tunisiens disparus en mer, activement recherchés par les autorités

Une quarantaine de migrants tunisiens qui tentaient de rallier clandestinement l’Italie par la mer sont portés disparus depuis cinq jours, a annoncé mardi 16 janvier la Garde nationale tunisienne.

Les Tunisiens qui ont pris part à cette « opération d’émigration irrégulière » étaient partis de la ville de Sfax (centre-est du pays) dans la nuit du 10 au 11 janvier à bord d’une embarcation qui devait les transporter jusqu’aux côtes italiennes, a précisé la Garde nationale dans un communiqué.

Elle a ajouté avoir lancé des recherches mobilisant d’importants moyens pour tenter de retrouver les personnes disparues après avoir été alertée par des proches ayant perdu tout contact avec elles. Des vidéos et des photos publiées sur la page Facebook des autorités montrent le déploiement des opérations de recherche en mer.

La Tunisie est, avec la Libye, le principal point de départ pour des milliers de migrants qui cherchent à se rendre en Europe.

Écrasante majorité de Subsahariens dans les départs depuis Sfax

Sur les 11 premiers mois de l’année 2023, le nombre de candidats à l’émigration clandestine interceptés par les autorités tunisiennes s’était établi à 69 963 personnes, soit plus du double pour la même période l’année précédente, selon des statistiques transmises à l’AFP par le porte-parole de la Garde nationale.

Dans le détail, 77,5% (plus de 54 000) étaient des étrangers, en majorité des ressortissants d’Afrique subsaharienne, et le reste des Tunisiens (plus de 15 000).

Ces départs de Noirs vers l’Europe ont connu une accélération en Tunisie après un discours fin février du président Kaïs Saïed, dénonçant l’arrivée « de hordes de migrants clandestins » qu’il avait présentés comme une menace démographique pour son pays.

L’écrasante majorité des candidats au départ est donc originaire d’Afrique subsaharienne. Et peu d’opérations de recherche sont lancées quand leurs canots disparaissent en mer – ou sont en difficulté.

Expulsions aux frontières

Pis, de nombreux exilés subsahariens accusent même les militaires tunisiens de maltraitance. Depuis le mois de septembre, InfoMigrants a recueilli plusieurs témoignages d’exilés subsahariens qui racontent avoir été immédiatement emmenés de force vers les zones frontalières du pays après leur interception en mer.

Ces expulsions ne sont pas nouvelles et rappellent celles observées durant l’été lorsque des milliers de migrants avaient été arrêtés à Sfax puis abandonnés dans le désert de Libye et d’Algérie. Des images de migrants subsahariens, à bout de force sous un soleil de plomb, avaient été largement diffusées sur les réseaux sociaux.

Des migrants abandonnés dans le désert libyen à l'été 2023. Ici, un exilé pris en charge par les garde-frontières libyens.
Des migrants abandonnés dans le désert libyen à l’été 2023. Ici, un exilé pris en charge par les garde-frontières libyens.

 

Les histoires de Fati, une Ivoirienne, et de sa fille Marie, avaient également fait le tour du monde.

La mère et son enfant étaient mortes de soif et d’épuisement à la mi-juillet dans le désert après avoir été abandonnées là par les autorités de Tunis. Le 25 juillet, les garde-frontières libyens avaient publié une autre vidéo, relayée par le compte X (ex-Twitter) Refugees in Libya. On y apercevait le corps d’un homme et à côté, celui d’un enfant. Tous les deux gisaient l’un contre l’autre, sur le sable, au beau milieu du désert. La Tunisie a toujours rejeté ces accusations d’expulsions collectives.

Plus de 100 exilés sont morts dans le désert tuniso-libyen pendant l’été, selon les sources humanitaires.

En mer, le bilan est tout aussi dramatique. Plus de 2 270 personnes sont mortes en 2023 en Méditerranée centrale en tentant de rallier clandestinement l’Europe, soit 60% de plus que l’année précédente, selon les chiffres de l’Organisation internationale des migrations (OIM).

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