Le PIB français a finalement augmenté de 0,9% en 2023, a annoncé mardi l’Insee, proche de la prévision de 1% du gouvernement, mais sur un rythme atypique, avec un très bon deuxième trimestre et les trois autres nuls.
La croissance du Produit intérieur brut est ainsi restée atone d’octobre à décembre, comme au premier et au troisième trimestres (révisé de +0,1 point à 0%), alors que le deuxième a été beaucoup plus flambant, à 0,7% (révisé de +0,1 point également).
Cette bonne croissance trimestrielle survenue presque en début d’année, ainsi qu’une contribution de 0,3% de 2022, permet d’arriver à une hausse du PIB de 0,9% sur l’année entière.
« On peut voir le verre à moitié vide », a commenté mardi sur France Inter le directeur général de l’Institut national de la Statistique, Jean-Luc Tavernier, « avec effectivement un ralentissement assez sensible en cours d’année 2023; ou le verre à moitié plein, on s’en sort sans récession » malgré un contexte de crise inflationniste.
La France s’en sort aussi mieux que la zone euro en général, dont la croissance a atteint 0,5% sur l’année écoulée, et que l’Allemagne qui pourrait connaître deux années successives de récession, après -0,3% quant à elle en 2023.
Le quatrième trimestre a cependant été marqué par une baisse de l’investissement des entreprises (-0,7% après +0,2% au troisième trimestre) et de la consommation des ménages (-0,1% après +0,5%).
À l’inverse, le commerce extérieur a contribué positivement à la croissance du PIB au quatrième trimestre.
Mais c’est moins en raison des exportations, à peine stables (-0,1% après -0,6%), que d’importations en forte baisse (-3,1% après -0,4%).
Pour Maxime Darmet, économiste France chez Allianz Trade, « il est difficile de voir des éléments positifs dans ce rapport » de l’Insee, « avec une économie qui fait du surplace dans quatre des cinq derniers trimestres ».
« Ce qui est inquiétant, c’est le repli de la demande intérieure », observe-t-il, avec « une consommation des ménages qui ne redémarre toujours pas, et surtout l’investissement des entreprises qui finit par céder ».
« Motif d’espérance »
M. Darmet relève particulièrement le recul de 0,8% de l’investissement des entreprises en produits manufacturés, au quatrième trimestre : « il n’y a pas de réindustrialisation, contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis », déplore-t-il.
Pour la suite, tout repose sur une reprise de la consommation des ménages. La dernière enquête de conjoncture de l’Insee a montré un regain d’appétit pour les achats.
« C’est un motif d’espérance pour 2024 », a estimé M. Tavernier, qui mise sur une poursuite du ralentissement de l’inflation et un regain de pouvoir d’achat.
L’institut voit l’inflation revenir à 2,5% fin juin, et même autour de 2% si on exclut les produits aux prix les plus volatils.
Malgré ces espoirs, et sur fond de chômage qui pourrait remonter légèrement, selon l’Insee, la prévision gouvernementale d’une croissance de 1,4% cette année semble plus qu’optimiste.
Allianz Trade a une prévision de 0,7%, similaire à celle de nombreux économistes. La Banque de France anticipe plutôt 0,9%.
« Les raisonnements pourraient conduire à ce que ça accélère fin 2024, pas jusqu’à aller jusqu’à 1,4% sans doute », a prudemment remarqué M. Tavernier mardi.
L’horizon de prévision de l’Insee s’arrête en effet fin juin, et l’Institut anticipe deux premiers trimestres consécutifs à +0,2% de croissance. A ce rythme, et avec un faible acquis de croissance de 0,1% en 2023, même deux derniers trimestres à 1% de croissance chacun n’y suffiraient pas.
Le ministre des Finances Bruno Le Maire doit déjà faire face à un dérapage de deux milliards d’euros du déficit de l’Etat fin 2023.
Une prévision de croissance qui ne serait pas au rendez-vous limiterait encore la possibilité de ramener cette année le déficit public à 4,4% du PIB, avant un retour espéré sous les 3% en 2027.
Et encore plus difficile si les revendications sociales actuelles, comme celles des agriculteurs, se traduisent par des dépenses supplémentaires.
AFP