L’Arménie a annoncé mardi la mort de quatre de ses soldats, tués par des tirs azerbaïdjanais à la frontière entre les deux pays du Caucase. C’est le premier incident mortel depuis la reprise des pourparlers à l’automne entre Erevan et Bakou pour tenter de normaliser les relations entre les deux anciennes Républiques soviétiques.
La hache de guerre n’est pas encore enterrée entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Les deux pays se sont accusés mutuellement mardi 13 février d’avoir procédé à des tirs à la frontière, un incident qui a fait au moins quatre morts parmi les soldats arméniens selon Erevan.
Mardi matin, « les tirs des forces armées azerbaïdjanaises en direction des positions de combat arméniennes près de Nerkin Hand (dans le sud-est de l’Arménie, NDLR) ont fait quatre morts au combat et un blessé du côté arménien », a indiqué le ministère arménien de la Défense dans un communiqué.
Un précédent bilan donné par Erevan faisait état de deux militaires tués dans cet accrochage frontalier.
De son côté, le Service azerbaïdjanais des gardes-frontières a affirmé que l’armée azerbaïdjanaise avait mené une « opération de vengeance » en réponse à une « provocation » des forces arméniennes commise lundi soir selon Bakou et ayant blessé un soldat azerbaïdjanais.
Le Kremlin appelle « à la retenue »
Selon un communiqué du ministère azerbaïdjanais de la Défense, les forces arméniennes ont tiré à deux reprises lundi soir sur ses positions « en direction du village de Kokhanabi, dans la région de Tovouz » (nord-ouest de l’Azerbaïdjan).
À l’issue de l’opération mardi, « le poste militaire d’où provenaient ces tirs (…) a été entièrement détruit », a assuré le Service azerbaïdjanais des gardes-frontières, promettant une « riposte encore plus sévère et résolue » à « chaque provocation » à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
Le ministère arménien de la Défense a de son côté rejeté ces accusations en affirmant qu’elles « ne correspondent pas à la réalité ».
Le Kremlin a lui appelé « les deux parties à la retenue ».
Cet incident survient quelques jours après la réélection à la tête de l’Azerbaïdjan d’Ilham Aliev, au pouvoir depuis deux décennies dans ce pays riche en hydrocarbures.
L’homme fort de Bakou, âgé de 62 ans, surfe sur sa victoire militaire contre les séparatistes arméniens du Haut-Karabakh en septembre 2023, qui a mis fin à trois décennies de sécessionnisme marquées par deux guerres.
En septembre 2023, l’armée azerbaïdjanaise, à la faveur d’une offensive éclair, a pris entièrement le contrôle de cette enclave montagneuse qui était dirigée par des séparatistes arméniens depuis des décennies, poussant à la fuite vers l’Arménie de dizaines de milliers d’habitants.
Équilibre précaire
Le président azerbaïdjanais est cependant suspecté par Erevan d’avoir d’autres ambitions territoriales : le contrôle de la région arménienne de Siounik pour relier l’enclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan au reste de l’Azerbaïdjan.
Dans cette optique, l’Arménie a rejoint officiellement fin janvier la Cour pénale internationale, qui mène des enquêtes et juge les personnes accusées des crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale.
L’Azerbaïdjan nie de son côté toute volonté d’expansion territoriale.
Mais l’équilibre reste fragile entre les deux voisins ennemis du Caucase : des incidents armés comme celui de mardi ont toujours régulièrement lieu à la frontière. De quoi pousser de nombreux observateurs avisés à rester prudents sur l’avancée des négociations entre Bakou et Erevan, tant les désaccords et sources de tensions entre les deux pays se sont accumulés en trente ans.
Ces derniers mois, plusieurs cycles de négociations chapeautées séparément par l’Union européenne, les États-Unis et la Russie – allié traditionnel de l’Arménie – n’ont pas donné de résultats.
Fin janvier, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian avait affirmé avoir proposé à l’Azerbaïdjan de signer un « pacte de non-agression », dans l’attente d’un traité de paix, quelques semaines après que son homologue azerbaïdjanais, Ilham Aliev, avait assuré ne pas vouloir d’une « nouvelle guerre ».
Début décembre 2023, les deux pays s’étaient engagés à prendre des « mesures concrètes » pour « normaliser » leurs liens. Moins d’une semaine plus tard, ils échangeaient des prisonniers de guerre.
AFP