Le dernier sommet extraordinaire de la Cedeao convoqué dans un contexte assez particulier a marqué, comme on pouvait s’y attendre, à une nouvelle doctrine de l’organisation communautaire. C’est heureux puisqu’on s’acheminait tout droit vers une impasse qui à terme risquait de saper durablement les fondements de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Au siège à Abuja, on semble percevoir l’ampleur du profond malaise qui secouait l’organisation suite à la vague de sanction plus ou moins disproportionnées imposées à au trio Mali, Burkina, Niger, auquel s’est ajouté la Guinée Conakry.
Les mesures prises, si elles visaient à contraindre les différentes juntes au pouvoir à se rendre à la table des négociations pour présenter un calendrier de transition conduisant vers le rétablissement de l’ordre constitutionnel, ont pour le moins échoué.
Pis elles ont réussi à provoquer une sorte de résilience/ défiance qui a permis aux différentes économies de trouver des alternatives, quoique sur le plan de la sécurité, le nœud gordien, la situation est quasiment restée la même.
Il ya même un retour de manivelle, d’autant que les pays favorables aux sanctions ont très tôt vus que leurs intérêts économiques étaient menacés. Le Sénégal, la Côte d’ivoire, le Nigéria, qui étaient les têtes de pont de la « radicalité », sont des pays côtiers, qui sont les portes d’entrée des pays sous sanction, mais en même temps ils sont en compétition féroce avec le Togo, le Ghana et le Bénin au niveau de leurs ports respectifs.
Le Sénégal par exemple en plus de son port de Dakar a énormément investi dans deux autres ports minéralier et vraquier respectivement à Bargny et à Sendou.
Or le Mali, le Burkina et le Niger sont en train de trouver des alternatives à leur sur enclavement imposé, en s’ouvrant la Mauritanie voisine pour quelques kilomètres de plus et vers la Guinée qui se trouve quasiment dans la même position. Mieux, le trio a mis en place une organisation sous régionale, l’Alliance des Etats du Sahel (AES), et vient de poser un ultimatum pour les importations venant de Côte d’ivoire, notamment s’agissant du Burkina Faso.
Le Bénin, lassés par les contre coups de la sanction sur son économie a décidé de manière tout à a fait officielle de lever le blocus à sa frontière, avant même que la Cedeao ne se ravise.
Du point de vue géostratégique, la CEDEAO n’avait presque plus de choix autre que d’engager la voie de la décrispation. Les décisions issues de ce sommet extraordinaire de ce samedi 24 donnent des indications claires sur la volonté de l’organisation de renouer avec le dialogue pour se consolider. Sage décision si l’on sait qu’aujourd’hui l’on est dans l’aire des grands ensembles sans lesquels il est difficile de peser sur les grandes décisions du monde. Espérons que ce n’est pas trop tard.
Comme par hasard un vent de décrispation souffle aussi Sénégal et en Côte d’ivoire.
Le Président Macky Sall, poursuivi par la clameur citoyenne pour avoir reporté sine die la date de l’élection présidentielle vient de libérer près de 700 détenus politiques, selon les estimations de la société civile, et dans la foulée va déposer un projet de loi d’amnistie à l’Assemblée nationale pour la période 2012-2024.
En Côte d’ivoire au même moment, le Président Alassane Ouattara vient de gracier ce 22 Février 2024, 51 personnes civiles et militaires proches de l’ancien président Laurent Gbagbo et de l’ancien Premier ministre Guillaume Soro, condamnées pour des présumés crimes commis lors des crises post-électorales 2010-2011 ou pour atteinte à la sûreté de l’Etat.
Plus qu’une coïncidence, ce mouvement semble être une dynamique imposée par l’évolution de la situation politique en Afrique, dans laquelle tout porte à croire qu’il marque la fin d’un cycle, où pour parler comme l’autre le renouvellement des élites au sommet.
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