Près de cinq mois après l’attaque meurtrière du Hamas contre Israël, l’ONU conclut qu’il existe « de bonnes raisons de croire que des victimes du 7 octobre ont été violées, tout comme certains otages détenus à Gaza ». Toutefois, la représentante spéciale de l’ONU sur les violences sexuelles lors des conflits, Pramila Patten, précise ne pas pouvoir estimer le nombre de ces violences. Cela a donné lieu à une passe d’armes avec le représentant d’Israël à l’ONU, qui dénonce un rapport qui arrive « trop tard ». Mais en Israël, ce travail est quand même salué par les milieux féministes.
On pensait que leur relation ne pouvait s’émailler bien plus, et pourtant, les échanges entre l’ONU et Israël se sont encore tendus hier, lundi 4 mars, alors que les pays médiateurs tentent d’imposer une trêve à Gaza après presque cinq mois de guerre. Israël a accusé, sur les réseaux sociaux et devant les 193 pays membres, l’Agence pour les réfugiés palestiniens d’abriter « des centaines de terroristes ».
Et puis, coup de théâtre, Israël a rappelé aussi son ambassadeur à l’ONU, pour protester contre le « silence » de l’organisation quant aux violences faites aux Israéliennes lors des attaques du 7 octobre, alors que justement, l’ONU publiait le rapport réalisé par son envoyée spéciale sur les violences sexuelles dans les conflits.
Et que Pramila Patten a estimé « crédibles » les accusations de viols et violences faites aux Israéliennes.
Début février, Pramila Patten et son équipe technique de neuf personnes ont pu se rendre en Israël et en Cisjordanie pendant deux semaines et demie. Ils y ont rencontré des témoins et des victimes des attaques, des otages libérés — même si aucune victime directe de violences sexuelles n’a souhaité les voir. Ils ont visionné 5.000 photos et 50 heures d’images des attaques.
Et sans avoir la capacité de vérifier le nombre de victimes, l’envoyée spéciale de l’ONU a estimé qu’il y avait de bonnes raisons de croire que des viols ont été commis lors de l’attaque du Hamas, que des otages ont subi diverses formes de violences sexuelles – et que certainement, de tels traitements ont toujours cours. Mais le rapport n’établit pas le caractère systématique de ces crimes, comme le revendique Israël.
C’était un rapport attendu, car depuis plus de quatre mois, Israël reproche aux Nations unies de ne pas avoir « suffisamment » dénoncé ces violences sexuelles faites aux Israéliennes, même si le secrétaire général les déplore dans ses discours.
Étonnement, le chef de la diplomatie israélienne a rappelé son ambassadeur pour protester contre des tentatives des Nations unies de vouloir « passer sous silence » ce rapport — ce qui a été immédiatement démenti par le porte-parole d’Antonio Guterres.
Un rapport attendu avec impatience en Israël
« Il marque un tournant », estime Ruth Halperin Kaddari, directrice du centre Rackman pour le droit des femmes, en Israël. « Il y a une reconnaissance claire des violences sexuelles et sexistes lors de l’attaque et du massacre commis par le Hamas le 7 octobre. Grâce à ce rapport, plus personne ne pourra nier que des crimes sexuels ont bien eu lieu ».
Israélienne, juriste internationale, Ruth Halperin Kaddari est mobilisée depuis le 7 octobre. Elle se bat sur plusieurs fronts.
Elle s’est rendue à plusieurs reprises au siège de l’ONU à Genève. Objectif : faire reconnaître ces crimes par les instances internationales. Et surtout faire condamner le Hamas. « J’espère que ce rapport permettra de classer le Hamas sur une liste noire de ces organisations qui ont commis, cautionné ou permis des violences sexuelles. J’espère que cela entraînera des sanctions, et que le Hamas sera considéré par tout le monde comme un groupe terroriste ».
Le rapport de l’ONU qui vient d’être rendu public, estime qu’il y a « de bonnes raisons de croire que des victimes du 7 octobre ont été violées ». Mais il n’établit pas le caractère systématique de ces crimes, comme le revendique Israël.
rfi