Le film « HLM Pussy » de Nora El Hourch suit le combat de trois adolescentes après l’agression de l’une d’elles. Une histoire de féminisme et d’inégalités, mais surtout d’amitié.
Il n’y a pas féminisme sans lutte des classes, et les héroïnes d’HLM Pussy l’illustrent bien. Le premier film de la réalisatrice française Nora El Hourch, en salles ce mercredi 6 mars, met en scène trois adolescentes de la génération post MeToo.
Amina, Djeneba et Zineb sont inséparables depuis l’enfance, mais leur amitié va prendre un tournant suite à l’agression sexuelle de cette dernière.
Les trois amies décident de filmer l’agresseur pour avoir une preuve, et Amina publie la vidéo sur les réseaux sans leur accord. HLM Pussy est mené par un trio lumineux de jeunes actrices, Leah Aubert, Médina Diarra et Salma Takaline, avec la participation de Bérénice Bejo dans le rôle de la mère d’Amina.
Le film dresse un portrait sincère d’une génération qui a grandi en entendant les termes de « consentement » et « harcèlement » mais n’en maîtrise pas encore tous les ressorts.
La scène d’ouverture, dans laquelle deux adolescents abordent le trio de copines dans un fast-food, pose d’emblée le réalisme du film.
Génération post MeToo
Loin de la caricature trop souvent utilisée pour parler des « jeunes » au cinéma, Nora El Hourch les filme sans jugement et même avec une certaine admiration. « J’ai voulu parler de cette génération parce que je crois fortement en eux et je pense, peut-être naïvement, qu’ils portent la solution de demain », explique la réalisatrice dans une interview vidéo au HuffPost.
Elle raconte que lorsqu’elle avait l’âge de ses héroïnes, « il n’y avait pas tous ces mots, tous ces codes. Jamais on n’aurait dit : “ça, ça s’appelle une agression” ». À 18 ans, Leah Aubert a bien conscience que le baiser forcé subi par le personnage de Zineb aurait été considéré comme « normal » à une époque qu’elle n’a pas connue.
Un féminisme à plusieurs vitesses
La force d’HLM Pussy est de s’attaquer à la question des inégalités au sein d’un même combat. Ce n’est pas un hasard qu’Amina, la plus privilégiée des trois, soit celle qui décide de publier la vidéo et de mener une révolution féministe. « Elle est née avec les codes du féminisme, avec cette mère avocate qui lui explique les choses, sans problème d’argent », détaille la réalisatrice.
Ses amies sont issues de milieux sociaux moins favorisés et ont d’autres problèmes à gérer, mais Amina est aveuglée par sa colère contre les violences sexistes et sexuelles. « Elle part du principe que tout le monde est sur la même marche. Sauf qu’en fait pas du tout. C’est en ça qu’elle est un peu naïve », développe Leah Aubert à propos de son personnage.
« HLM Pussy » ne recule devant aucun sujet
Le film de Nora El Hourch montre avec justesse que les femmes ne sont pas à égalité au sein d’une même société sexiste. « Les différences de culture, d’éducation, de milieu social, tes traumas, tes blessures font que tu ne peux pas te battre avec la même intensité », rappelle la réalisatrice.
Alors qu’elle n’a pas encore fini le collège, Djeneba s’inquiète déjà de savoir comment elle va gagner de l’argent et reproche à Amina de leur imposer ses « combats de Blancs ».
« Quand tu dois payer le loyer, que tu es victime de racisme, que ta religion est pointée du doigt, tu as d’autres priorités dans la vie avant de te sauver en tant que femme », nous dit la réalisatrice. Leah Aubert voit ces priorités « comme un entonnoir » : « au départ on se bat tous pour nos droits humains, hommes comme femmes ». Viennent ensuite les discriminations contre la couleur de peau, la religion, puis le sexisme.
« Personne ne va commencer par le bas », estime-t-elle.
HLM Pussy aborde aussi bien le sujet du racisme que celui des inégalités financières ou la notion de double culture et d’assimilation culturelle à travers le père d’Amina, joué par Mounir Margoum.
Zineb illustre, elle, la complexité de ce que ressentent les victimes lorsque leur agresseur fait partie du cercle proche. Toutes ces problématiques apportent autant de couches de réalisme à ce premier film réussi. Mais aucune n’est présentée comme une fatalité grâce à un maître-mot : sororité.
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