Tunisie : Christian Kwongang, l’ex-président d’une association d’étudiants africains, a été libéré

Christian Kwongang, ex-président de l’Association des étudiants et stagiaires africains en Tunisie (AESAT), a été libéré. Le ressortissant camerounais « a été retrouvé et se porte bien physiquement », a annoncé l’association vendredi 5 avril.

Son président actuel, le Malien Yaya Traoré, a précisé à l’AFP que Christian Kwongang était « en état de liberté depuis le 29 mars ». Il avait été transféré la veille depuis le centre de détention de Ouardia, au sud de Tunis, vers un hôtel. Mais il faisait encore ce jour-là l’objet d’une mesure « de surveillance policière ».

L’AESAT a donc attendu quelques jours pour communiquer sur sa libération le temps de clarifier sa situation, et pour s’assurer qu’il n’était plus soumis à une surveillance de la part des autorités, a précisé Yaya Traoré.

Celles-ci n’ont fait aucun commentaire sur le cas de Christian Kwongang.

« Prises de position »

Inscrit à l’université privée Upes (gestion et technologie) à Tunis, le Camerounais était détenu depuis le 19 mars après qu’il s’est rendu dans un poste de police pour « récupérer sa carte de séjour ». « On déplore surtout la manière dont cela s’est fait, avait déploré à InfoMigrants Yaya Traoré. Disparaître pendant huit jours ce n’est pas normal pour un étudiant, et encore moins pour un membre de la société civile. Même les trois avocats qu’on a dépêchés sur place n’ont pas réussi à le voir ».

L’étudiant avait pourtant « suivi les règles en vigueur en déposant tous les documents nécessaires pour l’obtention de sa carte de séjour conformément à la loi, indique un communiqué de l’AESAT. Il est d’ailleurs en possession d’un reçu de dépôt encore valide ».

Lors de sa détention à Ouardia, Christian Kwongang a été interrogé sur « les activités » de l’association et sur « ses prises de position lors de la crise migratoire de février 2023 ». Le 21 février 2023, le président tunisien Kaïs Saïed avait dénoncé l’arrivée dans son pays de « hordes de migrants » clandestins d’Afrique subsaharienne dans le cadre d’un complot « pour changer la composition démographique » du pays.

Au cours des semaines suivantes, des centaines de ressortissants d’Afrique subsaharienne avaient été chassés de leur travail et logement, et beaucoup s’étaient réfugiés près de leurs ambassades avant des rapatriements en urgence notamment en Côte d’Ivoire, au Mali et en Guinée.

Insultes, rafles, arrestations

Depuis, le quotidien des Noirs – migrants comme étudiants – s’est considérablement compliqué dans le pays, aux abords de Sfax (centre-est) surtout, point névralgique des départs d’embarcations vers l’Italie.

L’été dernier, des milliers de migrants ont été interpellés dans la région et envoyés dans le désert, à la frontière entre la Libye et l’Algérie. Selon les ONG, une centaine d’entre eux y sont morts de soif.

Depuis, les expulsions n’ont pas cessé et les exilés subsahariens vivent aujourd’hui reclus, de peur des représailles d’une certaine partie de la population comme de la police.

Le 18 mars, plusieurs associations et ONG de défense des droits humains ont dénoncé une « normalisation des violations des droits humains des personnes migrantes en Tunisie ». Selon Romdhane Ben Amor, leur situation « est encore pire qu’avant ».

Camp de migrants près de Sfax, à Jebiniana, en Tunisie, le 4 septembre 2023. Crédit : Reuters

De vastes camps de fortunes se sont par exemple constitués ces plusieurs mois entre Sfax et Al Amra, dans des champs d’oliviers. Des hommes, des femmes et des enfants y survivent dans des conditions déplorables.

« Pour manger et boire, on compte sur la solidarité des habitants. Certains viennent directement à nous pour nous donner de la nourriture. Souvent, on va toquer à la porte des fermes des environs, a raconté Miguel, un migrant camerounais, à InfoMigrants. Mais il y a des jours où je ne mange rien ».

infomigrabts

You may like