D’après des documents du Home Office consultés par la presse britannique, l’expulsion et l’hébergement des demandeurs d’asile au Rwanda coûterait au gouvernement plus de 5 milliards d’euros. Un chiffre rendu public alors que le Parlement se penche de nouveau sur la faisabilité du projet de loi, ce lundi.
La note est salée. D’après des documents du Home Office consultés par la presse britannique, le projet rwandais « pourrait coûter au Royaume-Uni près de 5 milliards de livres sterling [5,8 milliards d’euros] au cours des cinq premières années », pour l’expulsion et l’hébergement de 30 000 exilés au total.
Une somme qui comprend l’hébergement des migrants, la nourriture, l’éducation et les services médicaux.
Le texte précise également que seuls 500 migrants seront expulsés à Kigali la première année, bien que l’accord soit conçu pour « inciter » le Rwanda à accepter « des volumes plus élevés ».
Cette révélation intervient alors que le projet de loi est de nouveau examiné ce lundi 15 avril à la Chambre des Communes.
Depuis plusieurs mois, les députés s’écharpent sur la faisabilité de la loi, notamment sur la mesure qui présente le Rwanda comme un « pays sûr » pour les demandeurs d’asile. Mercredi 20 mars, le traité a une nouvelle fois été retoqué par la Chambre des Lords, qui y ont apporté sept amendements.
Projet « illégal »
Depuis son annonce en avril 2022 par l’ex-Premier ministre Boris Johnson, le projet d’expulsion au Rwanda peine à se concrétiser. Stoppé in extremis en juillet de la même année par la justice britannique, il a finalement été reconnu « illégal » en novembre dernier par la Cour suprême.
Le texte a donc été réécrit en décembre, à la suite d’une visite du ministre de l’Intérieur James Cleverly à Kigali. Objectif ?
« Répondre aux préoccupations de la Cour suprême, en garantissant notamment que le Rwanda n’expulsera pas vers un autre pays les personnes transférées dans le cadre du partenariat », avait indiqué un communiqué du Home Office.
Le nouvel accord comprend notamment la mise en place « d’un tribunal conjoint avec des juges rwandais et britanniques à Kigali pour garantir que la sécurité des migrants est assurée et qu’aucun des migrants envoyés au Rwanda ne soit expulsé vers son pays », avait affirmé le porte-parole adjoint du gouvernement rwandais, Alain Mukuralinda.
« Et il veillera également à écouter toutes les plaintes des migrants ».
Le gouvernement britannique prévoit par ailleurs de rémunérer à hauteur de 3 500 euros les demandeurs d’asile qui, de manière volontaire, souhaitent être délocalisés au Rwanda. Est éligible tout exilé débouté du droit d’asile au Royaume-Uni, et qui ne peut retourner dans son pays d’origine.
Les demandeurs d’asile relocalisés seront par ailleurs autorisés à travailler légalement au Rwanda, et recevront « un soutien des autorités rwandaises » pour une période allant jusqu’à cinq ans, notamment pour le logement.
Des expulsions rémunérées
Mais face aux difficultés rencontrés pour faire appliquer son projet, Londres songerait à le dupliquer ailleurs. D’après le Times, le gouvernement est en pourparlers avec le Costa Rica, l’Arménie, la Côte d’Ivoire et le Botswana, pour des programmes d’expulsions similaires.
D’autres pays figurent, eux, sur « une liste de réserve », à savoir le Cap-Vert, le Sénégal, la Tanzanie et la Sierra Leone. Toujours d’après le journal, des États d’Amérique du Sud ont également été envisagés, dont le Paraguay, le Pérou, le Brésil et l’Équateur.
Malgré tout, dimanche 14 avril, la secrétaire d’État la Santé Victoria Atkins a assuré que les premiers vols vers Kigali décolleraient « d’ici quelques semaines ».
Sans préciser toutefois qui sera chargée des expulsions. La compagnie nationale rwandaise RwandAir, pressentie pour ces transferts, a déjà fait part de son refus, craignant « des dommages potentiels pour son image de marque ».
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